Affichage des articles dont le libellé est Mangeaille. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Mangeaille. Afficher tous les articles

jeudi 4 janvier 2018

Les aventures de la sarma. Suite, fin et la recette

Seule dans la cuisine, face à ma cuvette de farce à sarma, à ma montagne de feuilles de chou fermenté rincées et égouttée et me voilà dans l'état d'esprit d'un gars qui va sauter en parachute pour la première fois. Ayde Jano!

Une de mes vieilles amies, Nadezda (son blog, c'est par ici ---> 👉) m'avait prévenue que les femmes allait guetter ma manière de replier les feuilles autour de la farce.
Je m'étais donc informée des différents styles de pliage en usage outre Danube. J'ai finalement opté pour le niveau 1: petit pliage des deux côtés latéraux, avant l'enroulage de la feuille sur elle-même, façon nem. Le système de pliage en biais, avec un petit doigt dans le derrière de la sarma pour bloquer le bazar, ce sera pour la prochaine fois, au niveau d'expertise 2.

Je n'ai pas rougi de mon premier plateau. C'était bien parti. Mon gentil mari n'allait pas être forcé de me répudier comme une pesteuse.


Est alors venu le moment de garnir le fond de mon chaudron d'une couche moelleuse de feuilles impropres au roulage, agrémentées de quelques lardons dodus. L'idée, c'est de ne rien laisser perdre et d'aménager un coussin amortisseur de sarma. Car la sarma supporte l'empilement haut la main (dixit ma belle-soeur qui avait raison), mais pas les soubresauts. En cas de mauvais traitements, la sarma se délite et va même jusqu'à éclater et de mémoire de Serbe, personne n'a jamais osé servir des sarma éclatées.

Une fois le coussin en place, les sarmas s'installent, bien calées les unes contre les autres. Il est permis de combler les interstices avec des lardons et de poser délicatement quelques feuilles de laurier pour parfumer subtilement. Dans ce chaudron-là, j'en ai empilé quatre épaisseurs.


On recolle une couche de feuilles déchirées ou moches sur le dessus et là, un saupoudrage léger de poivre et de paprika doux est bienvenu. Reste à recouvrir d'eau, à couvrir et à mettre sur le feu.


J'en ai fait encore un gros faitout et une cocotte pleine à ras-bord. Une invasion de sarma!!
J'y ai tout de même passé deux bonne heures.

Ensuite, pour la cuisson, j'ai fait un pari risqué.
Je savais qu'il fallait faire cuire les sarma très très doucement et très longtemps.
Très longtemps comment? Là, l'information se diluait.
Ma fille, débrouille-toi.

D'autre part, mes informateurs étaient unanimes sur la question du réchauffement-bonificateur de sarma. Pour une fois que les Serbes sont d'accord sur quelque chose, l'information méritait toute mon attention.

Nous étions mercredi. Je les ai chauffées environ trois heures à bouillons à peine frémissants. Ensuite, j'ai collé mes chaudronnées de sarma sur le balcon. Mon frigo a ses limites.
Le lendemain, jeudi soir après ma journée, je leur ai redonné un coup de jus d'une heure, histoire de ne pas faire perdre son fumet balkanique à la maison (en vérité, ça sent très bon: un peu comme la choucroute, mais en plus épicé). Retour sur le balcon.
Vendredi je les ai laissées tranquilles, au frais.
Samedi, je les ai fait recuire une petite heure.

Dimanche, le grand jour, elles ont rerecuit tout doucement encore une heure avant d'être servies.

Nous avions mis la nappe blanche, versé le vin, disposé sur la table des mets choisis, les convives étaient prêts à recevoir les sarma (et à rendre leur verdict). Imaginez un peu ce que ça fait, pour une pauvre Française, d'être dans cette situation. D'accord, ils étaient déjà aux trois-quarts gavés de burek (feuilleté au fromage bien crapuleux) et d'ajvar (confit de poivrons), mais les sarma, ils les attendaient!

Elles n'étaient pas éclatées,
pas débraillées,
 moelleuses,
goûtues,
Ouf!
Ils étaient contents!!

Comme l'exige la tradition, chaque invité (ils étaient douze) est rentré patafiolé de sarma, avec un sac plein pour continuer la fête à la maison.
C'est ainsi que se termine toute slava digne de ce nom.

Dès le dernier convive parti, je me suis écroulée et mon adorable mari a tout rangé et tout nettoyé.  Quand je vous disais que c'était une crème d'homme.
 


Et maintenant, la recette vraie de vraie, la mienne:
Pour six kilos de feuilles de chou fermentées, il faut trois kilos de viande: un tiers de boeuf (gîte), un tiers de veau (blanquette), un tiers de porc (échine).
1kg de poitrine fumée-salée grasse (on en trouve dans les boutiques balkaniques).
1kg de côtes fumées avec beaucoup d'os et peu de viande (pour parfumer, également dans les boutiques balkaniques). Ça ressemble à ça:


500g de riz rond.
Deux oignons.
Deux belles gousses d'ail.
Un bouquet de persil.
Poivre, laurier, paprika.
Huile d'olive.

1/ Hacher l'oignon, puis un beau morceau de poitrine grasse (300-400g). Hacher aussi le persil.
2/ Faire revenir l'oignon haché dans l'huile. Dès qu'il commence à colorer, ajouter l'ail écrasé et ajouter les viandes. Faire raidir sur feu vif en remuant.
Quand les viandes sont cuites, ajouter le persil haché et le riz. Poivrer, "paprikater". Réserver et laisser refroidir. Cette préparation, une fois refroidie, peut attendre plusieurs jours au frais.
3/ Le jour venu, séparer les feuilles de chou de leur base délicatement. Les faire tremper une petite heure dans l'eau froide. Egoutter.
4/ Prendre le temps d'affiner la base de la tige de chaque feuilles avec un couteau, mais il ne faut pas la percer. Les feuilles doivent être fines et assez grandes. Garnir chaque feuille de farce et replier en serrant bien (voir description du pliage plus haut).
5/ Garnir le fond du récipient avec des feuilles abimées et des lardons gras. Disposer les sarma de façon qu'elles ne bougent pas. Glisser des lardons gras et maigres dans les interstices. Disposer deux feuilles de laurier sur chaque couche. Il est possible de faire beaucoup de couches de sarma.
Terminer avec encore une épaisseur de feuilles abimées. Saupoudrer abondamment de poivre et de paprika. Ne pas saler!
6/ Remplir d'eau à hauteur. Placer une assiette à soupe retournée pour empêcher les sarma de remonter, au cas où le couvercle ne suffirait pas.
7/ Faire cuire à bouillons à peine frémissants trois à quatre heures. Goûter. S'il faut saler, là, c'est possible. Recuire une heure le lendemain. Idéalement, encore une heure le surlendemain.
8/ J'ai servi avec une purée de pommes de terre, pour absorber la sauce. C'est possible aussi de présenter de la crème fraîche.

Prijatno!








jeudi 28 décembre 2017

Les aventures de la sarma. Premier épisode.

Voilà un an et demi, j'ai épousé un Serbe.
Je ne suis pas peu fière, parce qu'en plus d'être serbe, mon époux est beau, tendre, joyeux et attentionné.
En prime, je me suis trouvée initiée à la Slava familiale. La Slava, c'est la fête du Saint patron de la famille, Saint Nikola en l'occurrence. 

Sveti Nikola lui-même

A cette occasion, il convient de préparer  une montagne de victuailles pour un tas de gens. Seulement attention!
Pas n'importe quelles victuailles.
Pour ne pas déshonorer la famille, il faut faire des sarma en abondance.
Le béotien esquisse déjà un sourire: comment ça: "Il faut"? Eh bien oui, pas question de se rabattre sur une quelconque ersatz tout préparé de chez Picard ou autre mercenaire du tout fait. L'honneur chez les Serbes, ce n'est pas une plaisanterie et Dieu sait comment pourrait finir une Slava, et donc des sarma, bâclées.
Les sarma, ce sont des délicieux petits pâtés de viande enrobés d'une feuilles de chou fermenté.


Chaque famille a sa recette et veille jalousement à sa transmission. Chez les Serbes, on ne rigole pas avec la tradition.
Je suis moi-même d'origine normando-champenoise et ma culture de la sarma est pauvre.
J'ai donc consulté ma belle-soeur qui, maillon féminin du clan serbe, s'y connaît mieux.
Après une explication détaillée au téléphone, constellée de mots serbes désignant de charcutailles mystérieuses, je me suis crue armée. Pas d'agneau, pas d'ail, un peu d'oignon et des oeufs. Dobro (bien).
Erreur!
Ma belle-mère, également avertie de mes intentions, a précisé la chose: beaucoup d'oignon. Et puis elle a appelé la Serbie pour des renseignements à la source. Là-dessus, ma belle-soeur me rappelle. En fait, c'est beaucoup d'oignons, de l'ail et de l'agneau éventuellement.
Tout le monde était suspendu à mes sarma pas encore commencées et j'avais une pression terrible.
C'est là que mon tendre époux s'y est mis.
Il a eu peur de mon inexpérience et surtout, peur de manquer de sarma (l'horreur absolue). Alors il m'a accompagnée jusqu'aux Pavillons sous Bois, chez" Kod dva blizanca" pour acheter tout le nécessaire. Là, on s'est disputés parce qu'il n'y avait pas assez de" kiseli kupus"(le choux fermenté) et ma commande de viande lui semblait hésitante. Effectivement, je tâtonnais un peu, j'avoue.
Une fois revenus avec le chargement, il a fallu trancher, faire la part des choses entre la belle-soeur, la belle-mère et les copines serbes, me réconcilier avec mon cher mari et me jeter à l'eau.
Plus exactement, me jeter dans la viande. J'en ai acheté trois kilos chez le boucher: un tiers de veau (tendron), un tiers de boeuf (gîte) et un tiers de porc (échine), que je lui ai demandé de hacher. Cette viande, j'ai dû la préparer tout de suite. Nous étions samedi et la Slava, le dimanche en huit. Pas question de servir des sarmas avariées. Alors, j'ai fait frichtouiller deux gros oignons hachés, deux belles gousses d'ail dans un peu d'huile. Quand le mélange a commencé à brunir, j'ai ajouté les viandes, agrémentées d'environ 200 grammes de poitrine fumée-salée serbe hachée aussi, c'est à dire bien grasse. Tout ça touillé et bruni sur un feu vif.  En fin de cuisson, j'ai ajouté un bouquet de persil plat frais haché et une petite moitié d'un paquet de 1 kg de riz rond. J'ai saupoudré largement de paprika, de poivre noir (mais pas de sel) et j'ai laissé refroidir. Ensuite, j'ai tout fourré au frigo.

Quatre jours plus tard, mercredi, j'ai attaqué la confection des sarmas pour de bon. J'ai commencé par déplier les feuilles une par une et les faire tremper une bonne heure dans l'eau froide.

Je m'excuse pour la qualité de la photo: il faisait sombre dans la cuisine.

Ensuite:
J'ai enfermé les chats.
Mis mon tablier.
Lavé mes mains.
Respiré un bon coup.
Et j'ai attaqué.

La suite dans le prochain épisode.




mardi 15 août 2017

Hymne à l'Alsace du nord

Me voilà de retour dans la ville, avec un enthousiasme modéré. J'admets que c'est agréable de retrouver mes chats chéris, mais si j'avais pu, je serais restée pour toujours encore un moment en Alsace.
Centre de sauvegarde de la faune sauvage de Loosthal. Les cigognes libres viennent tenir compagnie à leurs copines en cage qui sont soignées.

 Alsace du nord s'il-vous-plaît. Là où le touriste ne va pas, faute de vinasse en suffisance ou d'abondances fleuries aux balcons. Parce que c'est un bout du monde aussi, sans doute.

Le chat chéri aîné trônant devant les courgettes alsaciennes.

Pourtant, c'est beau. De cette beauté pas fardée qui fait la charme des lieux qui peuvent encore vivre sans touristes.

Zittersheim, vue du jardin où nous prenions notre petit déjeuner.

 Les forêts sont sombres, pentues et tourmentées à souhait, pleines de rochers majestueux enserrés par les racines des arbres immenses. A défaut des trolls qu'on s'attend à voir surgir de derrière les fougères, quelques chevreuils nous sont passés sous le nez.


A l'occasion d'une de ces promenades, j'ai eu le grand honneur de faire connaissance avec les fourmis des forêts. Celles qui construisent des tumuli énormes qui communiquent les uns avec les autres.


Essayez un peu d'approcher pour observer ces dames. Elles attaquent direct. J'ai eu beau fuir sans demander mon reste, elles ont continué à me mordre très loin des précieuses fourmilières. Les bestioles n'aiment pas les étrangers.

Vue d'en bas
 Vue d'en haut.

  
Dans les forêts, on trouve aussi des châteaux qui ont de la gueule, bien que tous ravagés par les armées de Louis XIV au cours de la conquête du Palatinat.

Par exemple, Fleckenstein. 


Même du temps de sa splendeur, l'endroit devait être un poil austère, surtout sans électricité, chauffage et tout le bazar. Ça vous pétrit de respect son gueux.

C'est ainsi que, tout étourdis devant ces sévères édifices, nous sommes allés nous encanailler chez les faiseurs de feu. L'Alsace du nord demeure en effet un endroit où on le dompte de toutes les manières possibles, pourvu qu'il chauffe dur et qu'il soit maîtrisé.  D'où l'existence de cristalleries et de potiers. Lalique et Saint Louis, c'est ici. Des merveilles de délicatesse sorties d'un enfer de chaleur et de manipulations stupéfiantes. Et encore, les ouvriers d'aujourd'hui travaillent dans des conditions correctes; il y a cinquante ans ou plus, c'était autre chose.

Premiers Gallé exposés à 'ancienne cristallerie de Meisenthal

Cristallerie Lalique: extraction d'un four en terre refractaire. Pas plus de trois secondes devant le four chauffé à plus de 1400°C obligent à un ballet, où chacun sait exactement quand il doit intervenir pour relayer le collègue. Imaginons l'époque où les tenues ignifuges n'existaient pas.
Les potiers de Betschdorf ou de Soufflenheim travaillent chez eux, encore en famille pour beaucoup. Eux aussi ont appris à maîtriser les caprices des cuissons au four: la poterie, c'est autre chose que de passer un poulet à la broche. En flânouillant, j'ai atterri dans l'atelier de Monsieur Ruhlmann, un ancien des Arts Décoratifs  qui travaille encore à l'ancienne (four à bois et vernissage au sel) avec sa femme. Un superbe capharnaüm  plein de merveilles.

Les poteries gravées et peintes à l'oxyde de cobalt, en attente de cuisson, laquelle n'est organisée qu'après quelques mois, tant la préparation du four est longue.

Deux des précieuses tasses achetées à Monsieur Ruhlmann. Technique du grès au sel: du sel est projeté dans le four à 1250°C en fin de cuisson: les vapeurs de sodium s'amalgament à la silice présente dans l'argile pour former une fine couche de verre un peu granuleux en surface. Les poteries ainsi traitées sont absolument étanches.

Comme la vie n'est pas faite uniquement de forêts et de poteries, il a été parfois question de manger. Là, inutile de commenter, les images parlent d'elles-mêmes.

Eaux de vie diverses de chez Hepp: abricot, coing, framboise... et une belle réserve de miel de sapin et de forêt.
Le kugelopf de chez Boistelle, à Saverne

Sublime choucroute de chez Meisenlocker à Strasbourg                                  































































    Charcutailles achetées au marché 
de Wingen sur Moder, 
chez la plantureuse Madame Schwab.





Je m'arrête là? J'ai pitié?
Allez, encore une petite!

N'oublions pas la tarte flambée. Les gens qui la proposent sont éleveurs en semaine. Les vendredis, samedis et dimanches soirs, ils deviennent restaurateurs pour arrondir leurs fins de mois. Pas des feignants... On s'en est collé des ventrées scandaleuses en rugissant d'extase.

LA tarte flambée. La Grange. Neuwiller.

vendredi 14 juillet 2017

Virée gourmande chez Christophe Michalak

Jamais je n'aurais envisagé d'aller faire un stage de pâtisserie où que ce soit. Pour le prix, je préfère aller carrément me taper la cloche quelque-part où c'est vraiment bon avec mes filles, mon mari chéri ou des copines.
Et puis, l'idée de me fader la compagnie de bourgeoises diversement arrogantes et expertes en crème chiboust (ce que je ne suis pas) ne m'enthousiasmait pas du tout.

Sauf qu'il ne faut jamais dire jamais.

Les parents d'élèves m'ont offert une carte cadeau vraiment mimi: un cours de pâtisserie à la masterclass de Christophe Michalak. Ils m'ont bien cernée, les bougres! Voilà où ça mène, de prendre des exemples de boustifaille pour faire comprendre les fractions aux enfants.
C'est ainsi que j'ai rejoint aujourd'hui-même un de ces fameux groupes tant redoutés. Dans la mesure où le prix n'était plus un problème, la curiosité l'a emporté sur la méfiance. Et je n'ai pas été déçue!

Le groupe en question, une dizaine de personnes, n'était pas arrogant du tout, mais plutôt intimidé. Une des dames a d'ailleurs avoué lors du traditionnel tour de table ne rien connaître à la pâtisserie, mais aimer beaucoup manger. Elle accompagnait sa copine et entendait goûter ensuite à ce qui résulterait du cours. Ces sages paroles ont détendu tout le monde.

Nous avons été accueillis ("is", oui, parce qu'il se trouvait tout de même deux messieurs parmi nous) par Alex, pâtissier expert et grand maître de la cérémonie et Nicolas, apprenti pâtissier et débarrasseur de vaisselle sale.
Très sympa, Alex. Très rassurant. Pas du tout le style des cuistots de "Ratatouille".
On nous a gentiment proposé du thé ou du café, offert de l'eau et présenté la séance intitulée: "Variation autour des best of". En trois heures, trois réalisations:

une pavlova vanille fraise,

un biscuit au limoncello

et un kosmik yuzu fruits rouges meringue.

A part peut-être le biscuit, exactement le genre de choses que je n'aurais probablement jamais envisagé de préparer. Je me suis donc disposée à apprendre et j'ai ouvert mes yeux et mes oreilles.

Alex était un parfait pédagogue: clair, organisé et attentif à tous. Tout le monde est venu faire un petit quelque-chose facile. A moi par exemple, il a demandé de touiller des framboises et du sucre sur le feu pour faire une compotée. Fastoche!
D'autres ont été invités à façonner des meringues ou a fabriquer de beaux rubans de crème chantilly. Pas évident, d'ailleurs. C'est là qu'on se rend compte que la pâtisserie, c'est un sacré coup de patte.
Les meringues
Les rubans










C'est aussi une base technique implacable. Alex, il savait au quart de tour à quelle température fondre le chocolat pour ceci, ou comment cuire les blancs d'oeufs pour cela. Moi, j'ai de fiches et de bouquins pour ça. D'accord, c'est son boulot, mais ça impressionne quand même.

Dès qu'une réalisation était terminée, tout le monde se précipitait pour la photographier et ensuite, arrivait le moment tant attendu de la dégustation. Alors là, attention M'sieurs Dames, on ne rigolait plus.
Le délice le plus renversant de tous, c'était de kosmik. Là vraiment, ces quelques bouchées vous transportaient dans une autre dimension. La meringue, on peut s'en passer, mais le reste, ah! Le reste! Une merveille d'équilibre entre l'acidulé de la framboise et le moelleux un peu astringent de la crème yuzu-citron. Et le croustillant de crumble par là-dessus, le tout bien froid: terrible!


La pavlova était intéressante aussi, très légère et parfumée, mais qui nécessite des manipulations de dernière minute pas évidentes à réaliser si on a des invités. C'est typiquement le genre de dessert qu'un chef pâtissier peut réaliser pour une clientèle exigeante, mais je crains fort qu'un tel trésor de délicatesse, si on le garde au frais quelques heures, ne tienne pas ses promesses.



J'aurais toujours appris quelques trucs utiles sur la chantilly et la meringue.




 Quant au biscuit, j'avoue que j'en aurais bien repris une part. Pas exactement le genre qu'on sert d'habitude aux anniversaires des gosses ou aux kermesses, mais j'ai appris qu'avec une base simple et bien menée, on obtenait un dessert léger, parfumé et frais. Je m'en vais exploiter ça.


Le (très bon) gâteau de kermesse des écoles


Le même après un passage chez le pâtissier 


 Par chance, je suis allée faire une cueillette il y a deux jours à la ferme du Logis, dans les Yvelines.
 J'en ai rapporté des masses de fruits.
Ma brouette, là, devant.
Ma brouette chargée à bloc





















J'ATTAQUE DES DEMAIN!










dimanche 2 juillet 2017

Courrier de Russie

J'ai reçu il y a peu un colis de Russie.

Je m'étonne encore qu'il soit arrivé.



J'aurais été embêtée qu'il reste bloqué, parce qu'il était plein de jolis rouleaux en bois tels que ceux présentés lors d'un précédent billet.
Nous avions organisé une rouleaux-party avec des copines et commandé en nombre des rouleaux sculptés à Vera, qui habite à Astrakhan et tourne le rouleau comme un chef.
Outre ses talents, elle est honnête, parce que j'ai cafouillé en lui faisant le réglement et je lui ai envoyé le double de ce que je lui devais. Elle m'a remboursé rubis sur l'ongle vie Paypal immédiatement.

D'autres sites russes sur lesquels on peut acheter de quoi se tenir bien au chaud l'hiver ont retenu toute notre attention et la rouleaux-party a illico tourné à la rigolade régressive la plus débridée.

Caleçon hivernal qui pense à tout


La chapka de la mort





Du coup, j'ai réattaqué une séance de petits gâteaux, sauf que là, j'ai suivi mon instinct franchouillard et fait dans le sablé terroir. Les recettes russes à base de lait concentré ne m'inspiraient pas.






Le problème, c'est que je n'ai pas de recette; tout est au pif. En substance: farine, sel, sucre, puis beurre mou en quantité suffisante pour qu'en mélangeant du bot des doigts, on obtienne une pâte grasse qui forme des sortes de grumeaux.



Lier avec un ou deux ou trois jaunes d'oeuf, selon la quantité de mélange, jusqu'à former une boule lisse qui se tient bien. 
 Laisser reposer au frais une petite heure, étaler au rouleau normal, puis au rouleau décoré, sur un plan de travail légèrement fariné.

Je graisse légèrement le rouleau à l'huile de tournesol avant usage et je saupoudre la pâte d'un petit peu de farine.

Pour le nettoyer, il suffit de le gratter avec une vieille brosse à dents et de l'essuyer.


Ensuite, dorer au pinceau léger avec un jaune d'oeuf mêlé à un peu de lait et au four, jusqu'à ce que les sablés soient bien dorés.


A la cuisson, les motifs s'estompent un peu. Il va falloir que j'étudie la question.

mercredi 5 avril 2017

Et un durian pour le dessert! Un!

Je reviens tout juste du quartier asiatique, du côté de l'avenue d'Ivry, où je suis allée faire quelques emplettes.
J'aime beaucoup ce quartier.
Pourtant franchement, il est moche. Des tours qui vieillissent mal, du béton, ce qui reste de bicoques et de petits immeubles fait gavrocheux. Mais ça grouille de vie et de boutiques de boustifaille, les gens tapent la discute dans tous les coins et même assis au pied des arbres. L'ambiance est détendue et sympathique et ça rattrape les égarements des architectes.



J'y vais souvent pour acheter des victuailles introuvables ailleurs. Par exemple les desserts viet-namiens à la châtaigne d'eau, lait de coco et aux feuilles de pagan. J'en raffole. La plupart des Européens que j'ai essayé de convertir à cette merveille ont eu l'air dégoûtés, les pauvres ignorants.


On trouve aussi du durian.


Je suis passée tout à l'heure devant un magasin qui en vendait des montagnes. Rien que pour voir et humer ça, le coin mérite le détour.
En outre, il faut avoir fait l'expérience de ce fruit dément au moins une fois dans sa vie.

Attendez que je vous raconte.

D'abord, partout dans les boutiques, il est question de durian. Gâteau au durian par-ci, biscuits au durian par-là, crème au durian et j'en passe. C'est visiblement le fruit roi.
Alors l'an passé, malgré le prix élevé (autour de 20 euros le kilo tout de même), j'en ai acheté un. La caissière a pris la peine de me glisser qu'il fallait attendre quelques jours avant de le déguster. Très bien. Je l'ai donc posé sur le balcon, encore tout emmitouflé dans son emballage tressé. Oui, parce que sinon, pas moyen de le manipuler: le durian est gros, pesant et hérissé de pointes qui entament les mains.


Au bout de quelques jours, une odeur pas désagréable, mais assez violente s'est dégagée du fruit: un mélange de fruit de la passion, de chou et de je ne sais quoi encore. En tout cas, ça sentait.
Il était à point, les lobes piquants commençaient à s'entrouvrir.
Je n'ai eu qu'à les écarter pour qu'ils révèlent un intérieur fait de compartiments emplis de sortes de sacs mordorés, contenant tous une chair pâteuse, compacte, assez poisseuse et agressivement parfumée.

Mon cher et tendre est un gourmand qui ne craint pas de tester de nouveaux goûts. Il était là, les papilles frémissantes, impatient de déguster enfin ce fameux fruit. J'ai plongé une cuillère à soupe dans cette chair opulente pour lui en servir le contenu et j'ai fait de même pour moi.
Et là, quelque-chose d'extraordinaire s'est produit:
Le premier goût est plutôt agréable. Un peu de mangue souffrée, de fruit sec, de champignon et un soupçon de céleri, le tout mis en valeur par une consistance de chair d'avocat douçâtre très, mais alors TRES riche. On avale et on en reprend une autre, curieux de tester plus avant, parce le goût est tout de même complexe.
Seulement en même temps, le deuxième goût de ce qui vient d'être avalé se déploie en queue de paon et on ne s'y attend pas. Il vous prend par surprise alors que la deuxième bouchée est en route et là, ça fait drôle, parce que ça ressemble beaucoup à de l'oignon pourri, en plus nuancé. Non pas que j'aie une expérience très approfondie du goût d'oignon fermenté, mais j'en ai senti et on est dans le ton. Et puis évidemment la queue de paon continue à déployer ses charmes et à l'oignon pourri succède une déclinaison variée de goûts qui tous, évoquent quelque chose de soufré qui fermente. C'est un goût passionnant, mais qui exige une certaine résistance à l'envie de vomir.

J'ai réussi à terminer ma cuillère, mais la dernière bouchée a été difficile.

Mon mari chéri, lui, n'a pas pu, malgré sa bonne volonté. Pourtant, il a un estomac d'autruche.
Il s'est d'abord précipité sur le riz pour éteindre ce goût traître. Puis il a vidé le pot de cornichons pour le noyer dans un bain d'acide.
Quant à moi, j'en a repris le lendemain, ça passait déjà mieux.

Mais le reste du fruit a fini au congélateur, emballé sous plusieurs couches de plastique hermétique. Malgré cette précaution, il a entrepris de le parfumer  et avec lui, la cuisine.
Alors je l'ai enfoui au fond de ma plus robuste boîte tuppermachin, celle qui résiste à tout. Moyennant quoi, mon congélateur ne sent plus le durian.

Il paraît que chaque année, dans le beau pays du durian, à la saison idoine, les gens se précipitent pour en acheter, tellement ils en sont fous. J'ai même découvert que parmi les plus intoxiqués, certains faisaient de overdoses de durian et passaient l'arme à gauche.

En tout cas, ce qui est sûr, c'est qu'il ne faut en aucun cas associer ce fruit fou à l'alcool. Le foie lâche, tout simplement.

Dire que les étrangers se pincent le nez à l'évocation du camembert...