Thèmes

humour jeune air homme chez enfants femme mort musique message fille film fleurs cheval revenu pouvoir

Rechercher
Derniers commentaires

auteur prétentieux !
Par Anonyme, le 28.02.2025

tres beau film et chaque fois je mets un film de john wayne . le meilleur des meilleurs. ca fait du bien de le
Par Anonyme, le 14.12.2024

mehganelessonn efitpeutainfit eputaebfztsoit a
Par Anonyme, le 03.04.2023

mehgabeveuxlul u1ifimoutainle ssoneluroveggo ldrmogolitonsa la
Par Anonyme, le 03.04.2023

mamaveuxpaopit abiymangerpome nrtpaquedonebi ybitdonemanger tizrzpetiviole pakiolehcetpmb erilepzvioledo neman
Par Anonyme, le 03.04.2023

Voir plus

Articles les plus lus

· LES COLLINES DE LA TERREUR : Bronson justicier du désert
· LA HORDE SAUVAGE OU LES DELICES DE L’EUTHANASIE DE MASSE
· SERAPHIM FALLS : PIERCE BROSNAN vs. LIAM NEESON
· Un Colt pour une corde : dernier western de l'impecc' Peck
· LA COLLINE DES POTENCES : UN GRAND COOPER DE PLUS

· Une introduction au western américain
· LA CONQUETE DE L'OUEST : LE WESTERN EN MODE CINERAMA
· LE SOUFFLE DE LA VIOLENCE : chef d'œuvre à réhabiliter
· Le Trésor du Pendu : une pépite à redécouvrir
· COUP DE FOUET EN RETOUR : UN WIDMARK NERVEUX A SOUHAIT !
· LE DUEL DES HEROS : DERNIER ROUND POUR DOUGLAS ET COBURN
· LA BRIGADE DU TEXAS : KIRK DOUGLAS REALISATEUR SARCASTIQUE
· VALDEZ : « 100 $ pour un shérif » à la mode Burt Lancaster
· CONVOI DE FEMMES : L’AMOUR EST DANS LA PRAIRIE POUR WELLMAN
· LE FILS DU DESERT : Les Rois Mages version John Ford

Voir plus 

Statistiques

Date de création : 16.07.2012
Dernière mise à jour : 16.02.2025
208 articles


LA LANCE BRISEE : SPENCER TRACY CHANTRE DE L'ANTI RACISME

Publié le 24/02/2014 à 21:34 par vivelewestern Tags : jeune air homme chez enfants femme mort musique message fille film fleurs cheval revenu
LA LANCE BRISEE : SPENCER TRACY CHANTRE DE L'ANTI RACISME

Au générique, le nom de Spencer Tracy, inscrit en grosses lettres domine de loin ceux des autres stars (Robert Wagner, Richard Widmark et Jean Peters) sur le même carton. De même, dans le film, la présence de Spencer Tracy est écrasante ; cela tient à son charisme autant qu’à son rôle : Tracy est le pivot de « La Lance brisée », il est Matthew Devereaux, le propriétaire d’un ranch immense, fort de 50 000 têtes de bétail, qu’il a bâti de ses mains. Il règne sur ses terres en souverain, n’hésitant pas à pendre les voleurs de bétail sans autre forme de procès, tout comme il règne sur sa famille, une fratrie éclatée de quatre fils issus de deux lits différents. Et c’est là le problème.

 

Le récit de « La Lance Brisée » (Broken Lance, 1954) est en effet centré sur les conflits du père avec ses fils : la domination écrasante de Matthew Devereaux a empêché ses rejetons de s’épanouir ; le peu d’affection qu’il a dispensée et ses absences dues à une intense activité professionnelle les ont privés d’un soutien bienveillant. Du reste, le film s’ouvre sur la sortie de prison de Robert Wagner alias Joseph Devereaux, le dernier fils de Matthew. Joseph vient de purger une peine de trois ans de prison : le temps d’un apprentissage. C’est maintenant un adulte fait. En revanche, on ne sait pas ce qui lui a valu cette condamnation.

 

Il arrive en ville, entre dans le palais de justice où l’on a invité à venir voir le gouverneur. Un immense tableau de Matthew/Tracy, devant lequel Joseph s’immobilise quelques instants, orne le hall en marbre du bâtiment. « Je ne veux pas de bagarre au ranch Devereaux » prévient le gouverneur, un ami du père. Et de faire entrer dans le bureau les trois frères de Joseph, fort élégamment vêtus. Du bétail, ils sont passés aux concessions de pétrole et on comprend que les affaires marchent bien. L’aîné, Ben, incarné par l’excellent Widmark, propose à Joseph une terre dans l’Oregon, du bétail… et dix mille dollars cash. Joseph refuse tout net et claque la porte. « Un gars qui refuse dix mille dollars et les jette dans un crachoir m’inquiète » commente Ben/Widmark. Joseph se rend ensuite au ranch familial. Une maison bourgeoise à l’abandon, vestige fantomatique et empoussiéré d’une splendeur passée. Là encore, trône un grand portrait du patriarche. « Je suis revenu », murmure Joseph. Du portrait, on passe à Tracy en chair et en os. Flash-back habile sinon original, inhabituel en tout cas dans un western.

 

Cavalcade au grand air ; plans d’ensemble de la plaine surplombée d’un ciel nuageux. Nappes de violon inquiètes – la musique tonitruante et dramatique est signée Leigh Harline, visiblement un émule de Miklos Rosza, l’auteur de la musique de « Ben-Hur » dont on retrouve ici les accents. On se lance à la poursuite de voleurs de bétail. Matthew et ses fils (Joseph et Ben) finissent pas rattraper les fuyards : les voleurs sont les deux autres fils de Matthew Devereaux. « Tu ne les paies pas assez », lance Widmark au père. « Partez avec ces bêtes. Je ne vous connais plus », répond le cattle baron. Au retour, Katy Jurado, qui joue la femme de Devereaux (elle est la mère de Joseph), appelle son époux à la clémence : « Ils ont besoin de toi. Tu ne leur donnes rien de toi-même. Si tu te refuses à eux, ils prennent ». On ne peut pas être plus explicite sur les rapports père/fils, sachant que Joseph est le favori du patriarche, un jeune homme respectueux, sensible, juste et bon.

 

Nouvelle alerte. Cette fois, ce sont des bêtes empoisonnées au bord de la rivière que l’on découvre. L’eau de la rivière sent le cuivre. La mine en aval est aussitôt incriminée. Ni une ni deux, Matthew Devereaux décide de s’y rendre. La confrontation tourne à l’affrontement quand les cow-boys de Devereaux arrivent par dizaines pour soutenir leur patron. Les infrastructures de la mine sont détruites. Le rancher sait qu’il va devoir se justifier devant un tribunal, ce qui ne manque pas d’arriver : le propriétaire de la mine a porté plainte. Devereaux va voir le gouverneur, son vieil ami, qu’il a poussé à faire de la politique (« je t’ai fait maire, sénateur et même gouverneur ! »), pour qu’il désigne un juge clément. Le gouverneur met une condition : que Joseph laisse sa fille, avec laquelle il vit une idylle, tranquille. Devereaux est accablé – et c’est l’une des plus belles scènes du film : il sait que si le gouverneur veut cette rupture c’est parce que Joseph est le fils d’une Indienne. Le thème du racisme introduit ici ne sera pas développé, mais il est amené avec justesse. Ici, un blanc ne doit pas épouser une Indienne, explique Joseph lui-même à Barbara.            

On est en 1954. L’Amérique est encore violemment ségrégationniste. Et le message progressiste du film est encore assez peu répandu dans le western américain (les deux films précurseurs sont « La Flèche brisée » et « La Porte du diable », tous deux de 1950). Le procès a lieu. Et le seul moyen pour Matthew de s’en sortir, c’est selon son avocat de donner les terres sur lesquelles la mine est implantée, de verser des dommages et intérêts… et de désigner, parmi ses fils, un coupable de l’agression des mineurs. Joseph se dévoue spontanément. Matthew laisse faire, la mort dans l’âme. Tout se passe comme prévu. Joseph est condamné. Et Matthew regagne son ranch. Détail qui m’a frappé, il semble las et traîne les pieds à la manière de Gabin. La comparaison peut sembler saugrenue, pourtant les points communs entre les deux acteurs sont nombreux ; à bien des égards, Tracy fait figure de "Gabin américain". 

 

Comme le dit Bertrand Tavernier dans le bonus du DVD sorti chez Sidonis, Spencer Tracy parvient admirablement à rendre les sentiments mêlés de Devereaux, la puissance et la frustration, l’espoir et la désillusion, l’aspect tyrannique et les regrets qui suivent. A mon sens, dans cet emploi, il est meilleur que Cagney (« La loi de la prairie ») ou le cabot Lee J. Cobb (« Les Quatre Cavaliers de l’apocalypse »), et presque aussi bon que le débonnaire Mitchum dans « Celui par qui le scandale arrive ». Mais reprenons. Devereaux, mortifié par la condamnation de son fils favori, veut obliger ses autres enfants à signer le partage du ranch (même si on ne comprend pas bien en quoi cela peut faire sortir Joseph de prison…). Ils refusent, Ben, le frondeur, en tête. Devereaux prend son fouet pour le frapper au sol. Les coups pleuvent, avant que le cattle baron ne s’effondre, terrassé par une attaque.

 

C’est un nouveau point de bascule dans le film – on pourrait presque dire le troisième acte de cette tragédie familiale : elle est marquée par une autre séquence magnifique, après la confrontation entre Devereaux et le gouverneur, puis la scène du procès, durant laquelle Tracy impérial, traite avec le mépris les arguments de l’avocat représentant son adversaire. Ben ose ouvertement s’opposer à son père, désormais diminué par son attaque. « M’as-tu jamais demandé ce que je ressens ou ce dont j’ai besoin ? », bégaie Ben à la manière de James Stewart : « Tu n’as plus d’ordre à donner à personne ».

 

Le vieux Devereaux veut empêcher ses fils de signer un acte de vente pour des terres cédées aux pétroliers. Il sait que monter à cheval peut le tuer. Il le fera quand même pour arrêter les « félons ». Il parvient à les devancer, puis marche sur eux. Ben arme sa carabine et renonce à tirer… Devereaux avance toujours, sur son cheval, comme un somnambule, arrive à la hauteur de ses fils et les dépasse. Il est mort en selle, droit sur son cheval...

 

A l’enterrement, Joseph, qui vient d’être libéré, plante une lance indienne au pied de la tombe : la guerre est déclarée avec ses frères. « Ils l’ont tué à petit feu ». Sa mère le convainc de partir avec Barbara plutôt que de s’engager dans une vendetta : « quand vous serez ensemble, tu sauras que tu n’as besoin ni de sang, ni de lui, ni de ça ».Joseph est décidé à renoncer à venger son père… mais tombe dans le traquenard tendu par Ben. Celui-ci craint les réactions de Joseph. Il est décidé à l’éliminer pour pouvoir dormir sur ses deux oreilles. Règlement de comptes dans les rochers. Joseph se jette dans une rivière en sautant du haut d’une falaise. C’est le domestique indien de son père qui le sauve en abattant Ben d’une balle dans le dos. Dernière scène : sur le point de partir avec Barbara, Joseph se rend sur la tombe de son père. Il dépose des fleurs et brise la lance restée fichée là. Le rideau tombe.

 

Indéniablement, ce film est plus un mélodrame qu’un western dont il a toutes les apparences. J’allais oublier de dire que « La Lance brisée » est un remake de « La Maison des étrangers », de John Mankiewicz (1949), avec Edward G. Robinson, Richard Conte et Susan Hayward. Justement un mélodrame dans lequel le pater familias s’est enrichi comme prêteur sur gages, à New York. « La Lance brisée » est certainement meilleur que l’original qui développait les intrigues, le conflit père/fils et l’histoire d’amour du fils (Max Monetti dans « La Maison des étrangers », Joseph dans « La Lance brisée). « Au lieu de s’enrichir mutuellement, les deux aspects du film se concurrencent, et, si chacun est remarquablement traité, l’ensemble paraît manquer d’unité », écrit Pascal Mérigeau, biographe de Mankiewicz (Denoël, 1993).

 

Ajoutons que Philip Yordan est crédité comme scénariste de « La Maison des étrangers » et comme auteur de l’histoire de « La Lance brisée » ; pour ce dernier, il obtiendra l’Oscar… du meilleur scénario. On sait aujourd’hui que Yordan n’était pas l’auteur du scénario de « La Maison des étrangers » (c’est Joseph Mankiewicz), pas plus que de « La Lance brisée ». Yordan est réputé pour avoir été un formidable mystificateur : crédité pour des dizaines de films, il avait en fait constitué une écurie de scénaristes victimes de la Liste noire, qu’il faisait travailler pour son compte, à vil prix. Pendant des décennies, il a eu la réputation d’être un formidable scénariste et ses « nègres », certainement reconnaissants malgré tout, n’ont brisé que tardivement le concert d’éloges autour de son nom.

 

Christophe Leclerc