Jour merveilleux

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Jour merveilleux

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Toi aussi, cela fait longtemps que tu n’as pas ressenti une joie équivalente ; longtemps également, que tu n’as pas discuté avec un homme aussi simplement ! D’ailleurs, cela t’est-il déjà arrivé ? Tu n’en es pas sûre. Parler avec un homme comme tu le fais à cet instant avec Bruno ? Non, tu n’en as pas le souvenir. La dernière fois doit remonter avant Damien. À partir du moment où l’on est en couple, marié qui plus est, le regard que posent les hommes sur les femmes devient différent. Généralement, ils s’adressent dès lors à elles avec distance, presque avec déférence, même si au fond d’eux ils brûlent de désir. C’est comme si une barrière invisible avait été érigée entre eux et elles, comme si sur nos fronts il était tatoué la mention « occupée ! » Donc, avant Damien, qui connaissais-tu ? Des types brûlants d’envie de coucher avec toi et qui ne savaient que te flatter en te dévorant des yeux. Certains d’entre eux, les plus veules, auraient rampé à tes pieds si tu l’avais exigé, mais pour d’autres, les plus pervers, si l’occasion s’était présentée, tu ne doutes pas qu’ils auraient été tentés de recourir à la force pour te posséder. Tu t’es toujours méfiée de ceux-là. Par chance, tu avais le don de deviner la violence qui faisait bouillonner leur petite cervelle de satyre. La vie est dangereuse lorsqu’on est une femme. Il suffit de lire les journaux pour s’en convaincre ou d’ouvrir les yeux sur le monde. La plupart des femmes sont aux ordres des hommes avec lesquels elles vivent. Comme preuve visible, la multiplication des foulards depuis ces dernières années quand ce n’est pas le déguisement de Belphégor qu’on leur impose. Sans parler des innombrables vexations, humiliations, violences ! Le sexe faible porte bien son nom. Toi, tu n’as jamais eu à en passer par là, tu n’aurais pas admis que l’on t’oblige à faire ceci ou cela contre ton gré. Bien que dans certains milieux, certains pays, la question ne se pose pas : tu obéis ou tu trinques ! Sans parler de la pornographie et de la prostitution qui se répand sur le monde comme une nouvelle industrie prospère et dans laquelle les femmes paient le prix fort sans avoir en contrepartie le moindre avantage.

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Damien ne faisait pas partie de ce genre d’hommes, de ces brutes féroces au cœur irrémédiablement sec. Il n’était pas misogyne non plus. Si bien qu’il n’a jamais exigé de toi quoi que ce soit d’avilissant, d’ailleurs il ne t’a jamais rien demandé. Pas même de devenir sa femme le salop ! Tu te souviens la première fois quand il était venu te voir à la maternité. Tu avais accouché le matin, il était arrivé en fin d’après-midi, le boulot. Il n’avait eu qu’un regard pour le bébé et il avait passé le reste du temps assis sur une chaise à côté de ton lit à regarder l’écran de la télé murale allumée dont il ne s’évadait que pour consulter sa montre.

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