Procès des viols de Mazan : les avocats appellent au calme, la personnalité de Dominique Pelicot scrutée
Les avocats de la défense ont pris la parole ce lundi matin à l'ouverture de la deuxième semaine du procès des viols de Mazan. Ils ont annoncé des dépôts des plaintes en raison de menaces envers leurs clients. Dans la journée, la personnalité de Dominique Pelicot a été disséqué, en son absence.
L'audience a repris ce lundi à Avignon pour la deuxième semaine du procès des viols de Mazan devant la cour criminelle de Vaucluse et les avocats de la défense ont souhaité une prise de parole commune avant la reprise des débats. "Nous, avocats de la défense, adressons un appel solennel à chacun à respecter la présomption d'innocence et à l'apaisement dans les médias", ont-ils lancé par la voix de l'avocate lyonnaise Isabelle Crépin-Dehaene.
Les avocats dénoncent notamment la diffusion sur les réseaux sociaux des noms et parfois des photos ou informations personnelles, des 50 co-accusés et les menaces reçues pendant le week-end par leurs clients. "Des enfants d'accusés ont été pris à partie au sein de leur établissement scolaire, des épouses et proches d'accusés ont été insultés, des appels téléphoniques malveillants ont été reçus par des accusés avec tentative d'intrusion à leur domicile", listent les avocats.
Les avocats de la défense indiquent par ailleurs qu'ils vont déposer une quinzaine de plaintes et que d'autres suivront dès que les accusés feront l'objet de menaces. "La justice s'exerce par nos lois, dans le calme du temps et non dans la frénésie de l'instant", a conclu Isabelle Crépin-Dehaene.
"Tout sera fait pour garantir la sérénité des débats", lui a répondu le président de la cour, Roger Arata, sérénité nécessaire "afin de les mener à leur terme". Lors de la première semaine d'audience, il avait déjà rappelé qu'aucune captation d'image n'était autorisée pendant les débats dans la salle d'audience mais aussi dans la salle de retransmission.
De son côté, Gisèle Pelicot, la victime, avait également appelé vendredi via ses avocats à "la plus grande modération sur les réseaux sociaux" et avait demandé la fermeture des cagnottes de soutien en ligne ouvertes pour elle, comme celle lancée par l'influenceuse Nabilla.
Dominique Pelicot, malade, absent pour la journée
Pour cette sixième journée d'audience, Dominique Pelicot, le principal accusé, a quitté le box. Son avocate a demandé qu'il soit dispensé pour raisons médicales. "Il souffre de douleurs intestinales et d'infection urinaire depuis vendredi soir, mais n'a pas reçu de soins", détaille Béatrice Zavarro. Derrière elle, Dominique Pelicot se tient difficilement debout et se sèche les yeux. Le président accepte de le dispenser d'audience pour la journée, pour qu'il puisse recevoir des soins. "Merci, monsieur le président", réagit Dominique Pelicot d'une voix faible avant de quitter son box.
Après avoir entendu Gisèle Pelicot, les parties civiles et les enquêteurs la semaine dernière, ce début de première semaine est consacré à la personnalité du principal accusé, Dominique Pelicot. Malgré son absence, plusieurs experts ont défilé à la barre ce lundi pour tenter de mieux comprendre cet homme qui a dupé tout le monde (épouse, famille, amis) pendant des années.
Dominique Pelicot, une personnalité "clivée", avec deux facettes opposées
Et tous viennent décrire une personnalité "clivée" entre "deux facettes opposées" qui cohabitent dans le même homme. Dans sa facette publique, Dominique Pelicot apparaît comme un bon mari, un père aimant, un ami estimé. Mais dans sa facette privée, il se montre autoritaire, directif, menteur, manipulateur.
Surtout, les experts notent ses pulsions et addictions. Le psychiatre Paul Bensussan définit les paraphilies, les attirances en dehors de la norme, et estime "exceptionnel de voir autant de paraphilies chez une même personne" avec Dominique Pelicot. Il liste le fétichisme, le voyeurisme, l'exhibitionnisme, le sadisme sexuel. Et c'est parce que son épouse refusait certaines pratiques sexuelles que Dominique Pelicot a commencé à la droguer.
Les experts pointent d'ailleurs l'absence totale d'empathie du principal accusé, décrit comme "autocentré". "Je n’ai perçu aucune empathie tournée sur son épouse, ses enfants, ses petits-enfants, note la psychologue Marianne Douteau. Ses regrets sont uniquement autocentrés : lui ne reverrait pas ses petits-enfants, ses enfants…"
Une dangerosité criminologique "élevée et durable"
Sur cette question du clivage, elle explique aussi qu'il s'agit souvent d'un "mécanisme de défense psychique pour éviter l'angoisse". À chacun de ces experts, Dominique Pelicot a raconté avoir été agressé sexuellement à 9 ans par un infirmier qui le soignait à l'hôpital.
Pour le psychiatre Laurent Layet, "la perversité [de Dominique Pelicot] tient dans l’hermétisme entre ses clivages. Il n'y a aucune cohabitation entre ces deux facettes, sans schizophrénie, mais comme un disque dur qui change de fonctionnement de temps à autre".
Interrogé sur la dangerosité criminologique de Dominique Pelicot, le psychiatre Paul Bensussan est catégorique : "Elle est élevée et durable, mais il a aujourd'hui son âge et sera donc moins dangereux en sortant", estime-t-il. Et il prévient : "La thérapie n’y change rien. Sa sexualité restera hors norme tant qu’il en aura les capacités physiques."
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