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Procès des viols de Mazan : "Je suis un violeur", a reconnu Dominique Pelicot qui a demandé "pardon" à son ex-épouse

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Le principal accusé des viols de Mazan était de retour ce mardi, après une semaine d'absence, devant la cour criminelle de Vaucluse à Avignon. "Je suis un violeur", a affirmé Dominique Pelicot, qui reconnaît "les faits dans leur totalité" et il a "demandé pardon, même si ce n'est pas acceptable".

Croquis d'audience du 17 septembre 2024 montrant l'accusé Dominique Pelicot lors de son procès.
Croquis d'audience du 17 septembre 2024 montrant l'accusé Dominique Pelicot lors de son procès. © AFP - Benoit PEYRUCQ

Dominique Pelicot était de retour à l'audience mardi après une absence de plus d'une semaine en raison de son état de santé, comme l'avait indiqué lundi son avocate. "Je suis un violeur, comme les autres accusés, ils ne peuvent pas dire le contraire", a-t-il affirmé devant la cour au début de son audition, après avoir reconnu "les faits dans leur totalité". "Gisèle ne méritait pas ça", a-t-il ajouté. Il a également "demandé pardon, même si ce n'est pas acceptable". En revanche, il a nié avoir drogué et violé sa fille Caroline.

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"Je suis un violeur" comme les coaccusés "dans cette salle"

Les débats ont repris avec l'interrogatoire du principal accusé des viols de Mazan, d'abord sur sa personnalité et ensuite sur les faits dans leur globalité. Sa femme, Gisèle Pelicot, a ensuite été entendue. "Je suis un violeur comme ceux qui sont dans cette salle. Ils savaient tous", a-t-il assuré en parlant des 50 coaccusés du procès.

Il a commencé par évoquer sa jeunesse qu'il a qualifiée de "difficile", marquée par des parents "qui se violentaient entre eux" et a rapidement parlé de deux épisodes "traumatiques". Avec des sanglots dans la voix, il est revenu sur deux agressions sexuelles qu'il dit avoir subies pendant sa jeunesse : un viol par un infirmier lors d'une hospitalisation à l'âge de 9 ans, puis sur un chantier quand il était apprenti, à l'âge de 14 ans, où il a, selon lui, été forcé de participer au viol collectif d'une jeune femme handicapée.

"Je demande pardon, même si ce n'est pas acceptable"

"De ma jeunesse, je ne retiens que des chocs et traumatismes. En 1971, il y a eu cette belle rencontre (avec Gisèle). C'était trop lourd à porter", a-t-il expliqué, la voix tremblante et en pleurs. "On ne naît pas comme ça, on le devient", a-t-il ajouté. "J'ai tenu 40 ans, j'étais très heureux avec elle, c'était le contraire de ma mère, elle était totalement insoumise. J'avais trois enfants, que je n'ai jamais touchés. Elle ne méritait pas ça, je le reconnais", a-t-il ajouté face à son ex-épouse, assise sur le banc des parties civiles.

"Elle était merveilleuse et moi, j'étais à côté de la plaque", a-t-il déclaré, en ajoutant "Je l'ai bien aimée 40 ans et mal aimée 10 ans. Je n'aurais jamais dû faire ça. J'ai tout gâché, j'ai tout perdu. Je dois payer".

Gisèle Pelicot est restée stoïque tout le long de sa prise de parole avant d'elle-même se rendre à la barre pour brièvement témoigner. "Pas une seule seconde, je ne pouvais douter de cet homme" en qui "j'avais tout confiance", a-t-elle expliqué à la barre. "J'ai aimé cet homme pendant 50 ans, je lui aurais donné mes deux mains à couper", a confié cette femme qui a reçu le soutien de milliers de manifestants en France le week-end dernier.

"Je suis coupable de ce que j'ai fait. Je prie ma femme, mes enfants, mes petits-enfants, madame M. (violée par son mari selon le même procédé et en présence de Dominique Pelicot, NDLR), de bien vouloir accepter mes excuses. Je demande pardon, même si ce n'est pas acceptable", a plaidé Dominique Pelicot. Selon l'enquête, des photos de sa fille et de ses deux-belles filles, prises à leur insu et les montrant pour certaines nues, ont été retrouvées dans son ordinateur.

Dominique Pelicot "ne se dérobe pas"

Dominique Pelicot "ne se dérobe pas" devant les faits "monstrueux" qui lui sont reprochés, a souligné son avocate Béatrice Zavarro à l'issue de la matinée d'audience. "Il ne se dérobe pas, il explique, il justifie, il est coopératif. Il aurait pu se retrancher derrière son droit au silence, malgré sa présence physique, ce n'est pas ce qu'il fait", a-t-elle plaidé.

Pour Me Béatrice Zavarro, les événements évoqués de sa jeunesse ne lui servent pas à excuser la décennie de viols qu'il a fait subir à celle qui était encore à l'époque sa femme, "Il constate plusieurs traumas de l'enfance, et il peut supposer que ces traumas de l'enfance ont conduit à cette personnalité-là. Mais en aucun cas, il vient dire 'Plaignez-moi, j'ai subi ça, donc fatalement, il faut me pardonner de ce que j'ai fait à mon épouse'."

"Quel que soit le comportement que Dominique Pelicot puisse adopter à la barre, il sera toujours critiqué. Je crois que cet homme-là n'a pas vocation à être cru", a-t-elle ajouté, tout en reconnaissant avoir affaire à "des faits affreux, immondes, monstrueux". "Ça, nous le savons tous et nous ne le contestons pas", a souligné l'avocate.

Me Béatrice Zavarro est revenue sur la phrase "Je suis un violeur, comme ceux qui sont dans cette salle" que Dominique Pelicot a lancé à l'attention des 50 coaccusés de ce procès. Elle a précisé, "C'étaient ses termes, encore une fois ce ne sont pas les miens. Je suis avocate, nous avons avec la cour respecté un principe très clair de parler de scènes de sexe et non de scènes de viol". Certains des coaccusés nient les accusations de viols et affirment avoir pensé participer à un jeu sexuel d'un couple libertin, se disant "trompé" voire "manipulé" par Dominique Pelicot.

Gisèle Pelicot a été applaudie par le public à sa sortie de la salle pour la suspension en fin de matinée alors que les accusés se sont fait siffler à leur retour.

L'accusé a assuré n'avoir "jamais" touché sa fille Caroline

Caroline Darian, la fille, était présente pour la reprise alors que Gisèle Pelicot était seule, ce matin, sur le banc des parties civiles. L'interrogatoire de Dominique Pelicot sur sa personnalité a repris après la suspension. Et à la demande de son avocate, le principal accusé s'est adressé à sa fille"Caroline, je ne t’ai jamais violée, ni droguée. Ce n’est pas possible de dire ça. Je n’ai jamais fait ça".

À la fin de la première semaine d'audience, Caroline Darian a été entendue à la barre et s'est dite persuadée que la soumission chimique la concernait aussi. Elle a posé à plusieurs reprises la question, "Comment fait-on quand on n’a pas les preuves d’avoir, a minima, été droguée ?" Elle avait écrit son choc après la découverte de l'affaire et raconté ses questionnements dans un livre intitulé "Et j'ai cessé de t'appeler papa". Depuis, elle est devenue une figure de la lutte contre la soumission chimique.

Dominique Pelicot a longuement été questionné par l'un des avocats des parties civiles, Me Antoine Camus, concernant deux photos dénudées de sa fille trouvées dans son disque dur. Mais l'accusé a répondu à plusieurs reprises, mécaniquement, "je n'ai jamais touché ma fille". Il s'est même agacé que la question lui soit posée à plusieurs reprises. "Qu’est-ce qu’il faut que je fasse, que je me coupe un bras ?"

Il a nié avoir été l'auteur d'une photo de Caroline Darian, 45 ans, sur laquelle elle apparaît dénudée et allongée sur un lit dans une position " quasi-foetale " rappelant celle de son ex-épouse Gisèle Pelicot.

Tension entre le père et sa fille

Il a déclaré, "Non, ce n'est pas moi. Cette photo allongée sur le lit, ce n'est pas moi", suscitant la colère de sa fille, assise à côté de sa mère, à l'autre bout de la salle, mais en face de lui, "Tu mens", lui a-t-elle répondu à deux reprises. Elle avait brièvement quitté la salle, un peu plus tôt, d'un pas décidé, en disant "je vais gerber là".

"Moi, ma fille, c'est comme mes petits enfants, ce sont des joyaux, on n'y touche pas", a affirmé Dominique Pelicot. Après les relances des avocats des parties civiles sur le caractère incestueux des photographies intimes de sa fille, mais aussi de ses belles-filles, il s'est énervé "Qu'est ce qu'il faut que je fasse, que je dise, que je me coupe un bras ?"

Caroline Darian était déjà sortie en larmes de la salle d'audience au début du procès quand le président de la cour avait fait état de photomontages où elle apparaissait dénudée. Les clichés avaient été trouvés dans l'ordinateur de son père, dans un dossier intitulé "Autour de ma fille, à poil".

Elle l'avait accusé de délivrer "une partie de la vérité, uniquement quand il est mis au pied du mur". Concernant l'éventualité d'agressions sexuelles sur Caroline Darian, Me Antoine Camus a rappelé à Dominique Pelicot, "c'est dommage, il n'y a pas de preuve. C'est tout le drame de votre fille".

Dominique Pelicot était présent sur un fauteuil adapté

Le principal accusé du procès des viols de Mazan était présent ce mardi dans son box, sur un fauteuil adapté. Il est entré avec une canne, il s'est installé sur un fauteuil qui n'est pas médicalisé, mais qui est plus confortable que le banc classique du box des accusés.

L'audience a débuté avec la lecture du pré-rapport d’expertise médicale, par le président de la cour, transmis lundi après-midi sur Dominique Pelicot, rédigé à 17h et réalisé au centre pénitentiaire du Pontet. Les experts de l'examen clinique, somatique et psychologique, ont conclu que l'accusé était en état de comparaître.

Ils ont préconisé une pause de 15 à 20 minutes au bout de 90 minutes d’audition. La station assise avec un fauteuil était recommandée avec la fourniture d’1,5 litre d’eau par jour et un équipement dans les geôles (matelas ou oreiller) pour se reposer pendant les pauses de 15 à 20 minutes.

Accusé d'avoir drogué sa femme pour la violer et la faire violer par des dizaines d'hommes, dont cinquante sont également jugés dans cette affaire, Dominique Pelicot, 71 ans, souffre d'un "calcul rénal, d'une infection rénale et d'un problème au niveau de la prostate", avait indiqué lundi matin le président de la cour, Roger Arata.

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