livre livres hiver sommaire littérature sur fond fleurs center image centerblog sur fond background course prix mer roman vie moi france google amour saint coup fleur chez homme belle musique femme amis travail mort coeur société centre nuit cadre texte automne search pouvoir livre littérature
Rubriques
>> Toutes les rubriques <<
· 00a Accueil (4)
· 00b Documents, traductions, essais... (39)
· 02 (Những) Tình khúc Trịnh Công Sơn (13)
· 14a Một cõi đi về (avant 75) (12)
· 15 quelques chansons post 75 (17)
· 01 Ca khúc Trịnh Công Sơn (1967) (13)
· 09 - Khói trời mênh mông (13)
· 03 Ca Khúc Da Vàng 1 (12)
· 12 - Lời đất đá cũ (1973) (11)
· 07 Như cánh vạc bay (1972) (15)
merci pour vos encouragements , la 2ème partie du texte de nguyễn phúc liên thành sera mise en ligne aujourd
Par toidibo, le 19.11.2018
bien sûr, très volontiers. http://toidibo .centerblog.ne t
Par toidibo, le 16.04.2018
merci bien jean-claude pour avoir créé ce blog précieux pour les passionnés de trịnh công sơn. je suis très im
Par Anonyme, le 16.04.2018
· Khành Ly, souvenirs d'une vie
· La réponse de Thanh Niên à Trinh Cung
· Trinh Cung, la tragédie Trinh Cong Son
· Accueil (Choisissez votre album ou votre fichier)
· 00b Documents (traductions, nouvelles, essais)
· 01 - Ca khúc Trịnh Công Sơn (1967)
· Con mắt còn lại (1992)
· 14b - Một Cõi Đi Về (après75)
· 11 - Phụ khúc da vàng (1972) (Additif au chant des jaunes)
· 02 - (Những) Tình khúc Trịnh Công Sơn (1967)
· 09 Khói trời mênh mông
· Phúc âm buồn (1965)
· 03 - Ca khúc da vàng 1 (1967) (Le chant des jaunes)
· 07 - Như cánh vạc bay (1972) (Comme un vol de hérons)
· Em còn nhớ hay em đã quên (1980)
Date de création : 15.01.2018
Dernière mise à jour :
18.04.2024
279 articles
(mise à jour le 24 décembre 2018)
Pour l'accueil cliquez ici (Vous pourrez ensuite choisir votre album ou votre fichier)
(cliquer ici pour une traduction de Cat Bui en provençal)
Présentation Trịnh Công Sơn, parce que le Vietnam avait besoin d'un coeur !
Ca Khúc Trịnh Công Sơn trước năm 1975
(Chansons de Trịnh Công Sơn avant 1975)
Je m’appelle Jean-Claude RENOUX, j’ai 73 ans, et j’ai été longtemps conteur en crèche et maternelle. On me doit entre-autres le livre "L’éveil par le conte" paru chez Edisud, premier ouvrage qui traite du conte en direction des tout-petits.
Marié à une Vietnamienne, je me suis pris de passion pour Trịnh Công Sơn que je m’efforce, bien modestement, de faire connaître autour de moi.
Ma page facebook :
https://www.facebook.com/toidiborenoux/
Trịnh Công Sơn (1939-2001) est l'un des plus grands, sinon le plus grand, auteur compositeur vietnamien.
Surnommé le Bob Dylan vietnamien par Trần Văn Dĩnh (et non par Joan Baez comme on le lit parfois), son nom est associé pour toujours à celui de la chanteuse Khánh Ly.
Les origines de Trịnh Công Sơn
« Le berceau de famille de Sơn est Minh Hương, à la périphérie de Huế, au centre du Vietnam. Le nom de ce village, « village des Ming », suggère quelque chose au sujet de son ascendance lointaine : Sơn descend du côté paternel des Chinois associés à la dynastie Ming qui s'installèrent au Vietnam au XVIIe siècle quand les Mandchous vainquirent les Ming et établirent la dynastie Ch'ing. Sơn est né en 1939, non pas à Minh Hương, mais dans la province de Đắc Lắc, sur les hauts plateaux du centre, où son père, un homme d'affaires, avait déménagé avec sa famille pour en explorer les opportunités. La famille est retournée à Huế en 1943 lorsque les pressions économiques provoquées par la Seconde Guerre mondiale ont forcé le père à quitter les hautes terres". (John C.Schafer)
Le père de Sơn avait un négoce de pièces détachées pour cycles et motos et, bien que non-communiste, il participa à la résistance vietnamienne contre l'occupation française. Il fut emprisonné pour cela pendant 4 ans, et mourut dans un accident de Vespa alors que Sơn avait 16 ans.
Les influences culturelles de Trịnh Công Sơn
Bouddhiste, Sơn a fait une partie de ses études au lycée français où il se familiarisa avec la philosophie des existentialistes français, en particulier Albert Camus. Son œuvre s'est donc nourrie de ces deux sources, le bouddhisme (principalement) et la philosophie occidentale. L'une de ses toutes premières œuvres, Dã Tràng Ca (le crabe des sables), s'inspire d'ailleurs en grande partie du mythe de Sisyphe de Camus. Le cinéma américain, en particulier la figure de James Dean (nouvelle et originale image de la jeunesse pour les jeunes vietnamiens urbains des années 60 et 70, teenager laconique, indifférent à tout, toujours impulsif, ayant du mal à vivre avec ceux qui l'entourent et du mal à s'intégrer dans la société), le cinéma américain donc, et James Dean en particulier l'ont fortement influencé (John C. Schafer).
Adulé et controversé
Trịnh Công Sơn suscite encore bien des passions, aussi bien parmi les Vietnamiens restés au pays que parmi ceux d'outre-mer, aussi bien parmi ceux favorables au régime que parmi ceux qui lui sont hostiles. Le responsable de la police vietnamienne à Huế avant 75, Nguyễn Phúc Liên Thành, et responsable de l'arrestation et de la mort de Ngô Kha, le beau-frère de Trịnh Công Sơn, prétend que Sơn était un agent triple (travaillant pour la police du Sud, le Viêt Kong et le Nord Vietnam) et qu'il lui fournissait des renseignements, en échange de quoi il avait pu échapper à l'armée. Nguyễn Phúc Liên Thành ne m'a pas entièrement convaincu. (voir les trois pages du dossier « Les policiers de Saigon et Trinh Công Son »)
La lettre à Ngô Kha
Une lettre, dite « Lettre à Ngô Kha », est sensé prouver selon certains que Trịnh Công Sơn était communiste.
Le poète Nguyễn Hữu Hồng Minh évoque une perspective intéressante mais qui ne repose malheureusement que sur le témoignage d'un mort : « Dans mes archives familiales, il existe une preuve que Trinh Công Son a été contraint d'écrire ou d'écrire cette lettre sous la direction des communistes, seules les gens dans la confidence le savent bien. Mais ce qui en fût révélé plus tard, fût l’exact contraire ». Pour cela il cite le témoignage de cet autre poète, son père, Đong Trình, qui assista en 1974 à une réunion le 25 octobre 1974, organisée par l'église bouddhiste unifiée du Viêtnam, église provinciale de Quang Nam, à la pagode Pháp Bảo de Hội An, à l’invitation du Vénérable Thich Long Tri, réunion où Trịnh Công Sơn s'opposa clairement aux communistes en affirmant que « la mort sur n'importe quelle ligne de front représentait des pertes absurdes et des souffrances inutiles. La mort est la mort. Il n'y a pas de frontières et pas de fleurs (gratifications) pour la mort. Il faut arrêter la guerre pour réduire les souffrances des gens. »
Et ce jour-là Trịnh Công Sơn aurait échappé de peu à la mort !
D'autres témoignages, tout aussi intéressants mais directs ceux-là, indiqueraient que Trinh Công Son ait fait un calcul politique en 1973, sachant que les communistes ne pourraient que l'emporter et il pensait pouvoir ainsi tirer son épingle du jeu. Trinh Cung, son ami, prétend lui que la connivence entre les communistes et Trinh Công Son daterait de 1966, mais Trinh Cung semble agir sous le coup du dépit… amical, voire un peu plus, lui qui voulait épouser la soeur de Son et s'était appelé Trinh en raison de la vénération qu'il portait au compositeur ! A bien regarder l'itinéraire de Trinh Công Son de l'offensive du Têt en 68 jusqu'à la chute de Saigon en 1975, il semble avoir traverser plusieurs périodes que je nomme par ailleurs nationale-pacifiste, puis nationale-révolutionnaire, et s’en suit la poétique du désespoir pour reprendre l'expression de Jacques Pomonti, avant son ralliement tardif aux communistes.
Trịnh Công Sơn et ses protecteurs
Trịnh Công Sơn profita toute la guerre durant de la protection de Nguyễn Cao Kỳ et de sa femme, lequel Nguyễn Cao Kỳ lui aurait proposé même de fuir aux Etats-Unis dans le même avion que lui lors de la chute de Saigon ; ou encore de celle du colonel d'aviation Lưu Kim Cương, pour lequel Sơn écrivit Cho một người nằm xuống, et qui lui permit de chanter dans un club sur un terrain d'aviation de l'armée du Sud. Plus tard, sous le régime communiste, il bénéficiera tardivement de la protection de Phan Lương Cầm, la deuxième épouse de Võ Văn Kiệt, premier ministre du Vietnam socialiste.
Trịnh Công Sơn et Khánh Ly durant les années de guerre
Sơn vécut les années de guerre de façon semi-clandestine, pour échapper à la conscription, couchant dans des squats, se lavant la figure et se brossant les dents dans des bars (et pourtant toujours propre, les vêtements bien repassés, les souliers cirés, les cheveux soigneusement peignés, ce qui tranchait avec Khánh Ly), et protégé, je l'ai dit plus haut, par Nguyễn Cao Kỳ et sa femme, Đặng Tuyết Mai, qui appréciaient ses chansons (et bien d’autres militaires, policiers, politiciens admirateurs de son œuvre).
Khánh Ly elle-même, originaire du Nord, vivait en marginale une existence de vagabonde (SDF, dirait-on aujourd'hui), seule, rejetée par sa famille, chantant pour gagner sa vie, comptant sur l'aide de ses amis. « Un jour, un ami me donnait un peu de riz, le lendemain un autre me donnait une demi-bouteille de sauce de poisson ». D'esprit très libre elle eut plusieurs maris et de nombreux amants. Couple improbable de hippies vietnamiens ils partageaient à leur manière le slogan des pacifistes américains, « Faites l'amour pas la guerre ». « L'automne passe, l'hiver est lointain, l'été apporte des nuages, et l'amour est un oiseau volant dans le ciel ». Cependant Sơn et Khánh Ly étaient amis intimes, pas amants. Selon le témoignage de Nguyên Trong Tao il s’est marié avec une danseuse chinoise pour s'enfuir avant même le début de la nuit de noce (voir ci-dessous).
Illustration magistrale que l'amour, comme il en était convaincu, comme toute chose est éphémère et périssable.
Le mariage de Trinh Công Son
« Ce soir-là, Trinh Cung et Dinh Cuong (deux peintres amis de Son) ont accompagné les époux jusqu’à leur chambre, qui était la chambre de Thanh Thuy (la danseuse chinoise qu'il venait d'épouser, NDT). Arrivés à la chambre, les deux amis s’en retournèrent.
Mais, après avoir marché quelque temps, ils entendirent soudain la course de chaussures qui claquaient dans leur dos.
Ils se retournèrent tous deux pour regarder, et il s’avéra que le poursuivant n'était autre que Trinh Cong Son, le marié ! Son haletant s'expliqua : « Me retrouvant soudain tout seul avec une femme devant moi, j'étais tellement paniqué que je ne savais pas quoi faire et je me suis sauvé pour de bon ! »
De caribe au Sud, en Scylla du Nord
Hostile au président Ngô Đình Diệm, avant 1963, pacifiste fervent ensuite, désespéré de voir les Vietnamiens s'entre-tuer, en butte aux différentes juntes militaires anticommunistes qui régirent le pays jusqu'en 1975 (mais qui l'ont toujours protégé et laissé chanter librement, s'il n'eut pas toujours accès à la radio de Saigon, Jean Ferrat en France à la même époque non plus), il subit après 75 la paranoïa du régime communiste qui n'appréciait pas qu'il eut parlé de guerre civile dans sa chanson Gia tai cua me, à propos de ce que d'autres appellent « la guerre américaine ». Selon le témoignage du poète Đong Trình, qui assista à la réunion de Hoi An dont je parle plus haut, il s'en fallut d'un rien qu'il ne soit exécuté par le Viêt Cong en 1974, et Trịnh Cung, quant à lui, affirme qu'il aurait pu l'être aussi peu après le 30 avril 75 par les communistes au pouvoir, et mourir en labourant des champs infestés de mines dans le cadre de sa rééducation, par ailleurs il échappa à un attentat qui ne lui était pas forcément destiné lors d'un concert en 68 sur le campus de Saigon et estima plus prudent de regagner Huê, en 68 comme en 75, ville où il jouissait de sympathie parmi des communistes de la ville de sa génération.
Trịnh Công Sơn et Khánh Ly, produits culturels du Sud
Trịnh Công Sơn et Khánh Ly, quoi que le premier soit du centre Vietnam et la seconde du Nord, sont de purs produits de la culture du Sud, de ce qu’on appelait le Sud-Vietnam ou République du Vietnam avant 1975. Les chansons de Sơn ne seront jamais elles-mêmes qu’interprétées sur un terrain vague, au milieu des briques rouges cassées et des herbes folles, parmi des filles habillées à l’occidentale rêvant d’amour plutôt que de mariage, d’étudiants à cheveux longs et de soldats au regard embué, s’enivrant sagement de chansons d’amour tristes et de paix, tout en fumant des cigarettes américaines. Je ne connais pas de plus belle interprétation de Ru ta Ngậm Ngùi que celle d’une Khánh Ly, dans une robe à fleur que l’on imaginerait plutôt dans des lieux emblématiques de la fin des années 60, comme Haight-Ashbury, épicentre du mouvement hippie à San Francisco, ou le Paris de mai 1968 en passant par Carnaby Street, à Londres, et le festival de Woodstock, dans l'État de New York ; Khành Ly donc interprétant Ru ta Ngậm Ngùi, accompagnée d'un unique musicien à la guitare sèche, dans une baraque sommaire, à l’ombre d’un toit fait de contreplaqué et de larges feuilles d'arbres tropicaux, sur fond de bambous dodelinant. Rien à voir avec les grandes orchestrations et les crooners d’aujourd’hui, ou Hồng Nhung, la diva sophistiquée du Nord, ne supportera jamais la comparaison avec la jeunette sauvageonne et libertaire, qui présentait comme une pauvresse.
Trịnh Công Sơn et la culture des sixties
Les chansons de Trịnh Công Sơn ne doivent rien aux chansons folkloriques du Vietnam, bien au contraire, c'est pour certaines d'entre elles de la variété des sixties, alors que d'autres sont plus travaillées, nourries qu'elles sont au meilleur du jazz, du gospel, et de tout ce que l'Amérique compte de musiques afro-américaines, pop, latinos, et folk. Cette musique peut paraître « datée » aujourd'hui, mais il faut se rappeler que Sơn ne « chantait pas pour passer le temps », comme le disait Jean Ferrat. Il voulait atteindre la jeunesse vietnamienne, et en particulier celle des villes et les étudiants, tout à la fois nationaliste et pétrie de culture occidentale, une jeunesse au sentiment national bafoué par les interventions étrangères et éperdue de paix (mais souvent gauchisante ou franchement maoïste, comme leurs semblables en Occident). Pour les paroles, si l'on excepte quelque horreurs bêtement militantes et bêlement édifiantes, cette musique doit beaucoup, au bouddhisme bien sûr, mais aussi aux chansons à texte françaises, à Prévert et Montant, Barbara et Brassens, et pour la veine américaine à Louis Armstrong et Duke Ellington, tout comme à Joan Baez et à Bob Dylan.
Un fond de culture française
« Les livres, les périodiques et les disques français étaient importés frénétiquement tous les jours au Vietnam, leur prix réel étant inférieur à celui de Paris en raison des échanges subventionnés. Et ce fut l'époque de l'invention et du développement des livres de poche et des disques microsillons, largement diffusés sur de nouveaux supports de diffusion. Avant cela, même si le Vietnam était une colonie française, la littérature française (lue et étudiée au Vietnam) s'arrêtait à la fin du 19ème siècle. Après 1954, la culture française - et la culture occidentale - sont entrées directement sur le marché. Le public lit Françoise Sagan à Saigon en même temps qu'à Paris. Dans les rues (du Sud), surtout dans les cafés, les gens discutaient Malraux, Camus, et même Faulkner, Gorki, Husserl et Heiddeger. » (Jason Gibbs)
Culture réactionnaire et décadente pour le Nord
C’est cette culture du Sud consubstantielle de l'Occident (et donc universelle) que le Nord autarcique, à l'identité communiste fossilisée, abreuvé de la pensée Mao Dzedong et des slogans lapidaires d'Hổ Chi Minh, que le Nord donc aura bien du mal à digérer. Mais il n’a pas pu faire autrement que de l’accepter à la longue, avec de fortes résistances, et sans avoir jamais réussi à l'interdire totalement. Comment pouvait-il en être autrement quand les soldats du Nord eux-mêmes, dans les maquis du Sud, goûtaient avec gourmandise ces chansons qui avaient le goût du péché et les parfums transgressifs et cosmopolites du Sud, sur des transistors pris à l’ennemi diffusant les programmes de radio Saigon ? Bảo Ninh, ancien officier Nord-Vietnamien dans les maquis du Sud, dans son roman « Le chagrin de la guerre », fera dire à l'un de ses personnages que la victoire du Nord sur le Sud fut celle de la préhistoire sur la Civilisation.
Après le 30 avril 1975
Aujourd’hui encore les Vietnamiens du Sud, surtout ceux ayant choisi l’exil après 75, sont souvent déchirés. Ils ne peuvent s’empêcher d’aimer le compositeur et se sentent trahis par sa mise à disposition des autorités communistes après 75.
Après l'occupation du Sud par le Nord communiste en 1975, Khánh Ly choisit l'exil aux USA, tout comme certains des frères (dont ceux qui avaient porté l'uniforme de la République du Vietnam) et sœurs de Sơn qui se réfugièrent au Canada, alors que Trịnh Công Sơn et sa mère choisissaient de rester au Vietnam. À partir de cette date il ne produisit plus rien de notable, à quelques rares exceptions près et sauf quelques daubes « oubliables » (John C.Schafer), jusqu'à la Đổi mới (assouplissement de la politique socialiste en faveur de l'économie de marché) en 1988.
Le fait que Sơn ait été interné en camp de rééducation dans l'ancienne zone démilitarisée, pour en déminer les champs au péril de sa vie fait toujours débat. Trịnh Cung affirme que oui, mais il est peu vraisemblable qu'il en est été personnellement témoin (lui-même a fait 3 ans de camp). J'ai plutôt tendance à penser que, s'il y a bien séjourné, ce fût missionné par le pouvoir et à des fins de propagande. Ou au même titre que d'autres citoyens, communistes inclus. C'est ce que dit le peintre Trinh Cung : "Trinh Công Son a vécu en otage à l’Association des Beaux-Arts de Binh Tri Thien (la province de Huê), qui lui organisait régulièrement des participations au travail dans les champs pendant la saison sèche comme pendant la saison des inondations, ni plus ni moins que pour n’importe quelle autre personne à rééduquer". (L'engagement politique de Trinh Công Son) Ce qui semble acquis par-contre, au vu de plusieurs témoignages crédibles, ce sont les risques pris par ses amis et admirateurs intellectuels et communistes, y compris des hommes considérés comme des criminels de guerre par nombre de Vietnamiens, pour lui épargner ou atténuer autant que faire se pouvait la hargne des autorités les plus butées à son égard. De la paranoïa de certains Trịnh Cung, et d'autres, en témoignent : « Même « Nhớ mùa thu Hà Nội » (se souvenir de l’automne à Hanoi) a été interdite deux ans - juste pour un mot - vous savez lequel ? « Mùa Thu, L'automne » - le vocable « Mùa Thu Hà Nội, Automne Hanoi » est devenu l’équivalent du terme « révolution d’automne » - et Trịnh Công Sơn avait écrit « chaque ruelle répondra pour toi ... je marche en automne à Hanoi (Mùa Thu Hà Nội) pour me souvenir d'une personne et me souvenir des gens. » On lui a demandé : « la personne qui se souvient, se souvient de qui ? Et chaque ruelle, pourquoi doit-elle répondre ? Hanoi, les rues de Hanoi, pourquoi répondraient-elles ? Répondre à qui ? Répondre quoi ? Qu’elles se rappellent Khánh Ly et que Khánh Ly apportera la reconquête du pays en revenant... Après une telle déduction, une telle contorsion, cette chanson a été interdite deux ans ». (Trịnh Cung)
Ou encore, je cite toujours Trịnh Cung, dans la chanson « Em ra đi nơi này vẫn thế... (Tu es parti, et ici rien n’a changé) : « Pourquoi alors que le pays a subi une révolution écris-tu « tu es parti, et ici rien n’a changé » ? Saigon est donc toujours la même ? »
Parce que le pays a besoin d'un coeur
Sur la question de son choix de rester au Vietnam après 75, j’aimerais croire que la raison se trouve dans les derniers vers de Mỗi ngày tôi chọn một niềm vui, (chaque jour je choisis un bonheur) écrit en 1977 :
Mỗi ngày tôi chọn ngồi thật yên
Nhìn rõ quê hương ngồi nghĩ lại mình
Tôi chợt biết rằng vì sao tôi sống
Vì đất nước cần một trái tim.
Chaque jour je choisis de me poser paisiblement
Je vois clairement mon pays, je réfléchis sur moi-même
Je sais soudain pourquoi je vis :
Parce que ma patrie a besoin d’un cœur
Les derniers jours...
Craignant la réaction des éléments les plus radicaux de la diaspora vietnamienne aux USA, Trịnh Công Sơn déclina l'invitation qui lui fût faite d'y venir pour y subir gracieusement une greffe du foie. Il s'éteignit le 1er avril 2001, miné par le diabète, le tabac (il a fumé jusqu'à 3 paquets de cigarettes par jour) et l'alcool.
Mon sentiment personnel est que sa vie s’est terminée en naufrage, communiste tardivement converti par pur opportunisme, qui voulut s’offrir le luxe ultime d’adhérer au parti. Blackboulé, il insulta son contrôleur et fut mis peu après à la retraite, comme un vulgaire fonctionnaire du régime. Le Raimbault dévoyé et mercantile de l’Abyssinie se livrait au trafic d’armes. Mort trop tard, l’un et l’autre !
Khánh Ly, quant à elle, regagna pour la première fois le Vietnam en 2017, après 42 ans d'exil, sans jamais avoir renoncé à critiquer le régime.
2011, Khánh Ly à Bourg-la-Reine...
En 2011, pour le 10ème anniversaire de la mort de Sơn, j'ai eu l'énorme privilège de l'entendre, encore exilée aux USA, chanter les textes de Trịnh Công Sơn en région parisienne. Je crois que ma femme et moi étions les seuls à être venus d'aussi loin (de Nîmes) pour l'écouter. Et nous avions dû traverser tout Paris, de nuit, de Saint-Denis où nous étions hébergés, jusqu'à Bourg-la-Reine où avait lieu le concert, et retour à minuit plutôt floklo.
En guise de conclusion
Depuis 10 ans Trịnh Công Sơn ne me laisse jamais bien longtemps tranquille, je ne cesse d'y revenir, écoutant encore et encore les chansons, relisant mes traductions, interrogeant celles des autres. Puisse le visiteur être indulgent et trouver à cette inoffensive marotte quelque intérêt ou agrément !
Pour l'accueil cliquez ici
(Vous pourrez ensuite choisir votre album ou votre fichier)