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· Charles Xavier Grimaldi de La Porta (6)
tres emouvant!
Par Anonyme, le 15.09.2024
j adore cette evocation de notre tante
Par Anonyme, le 04.06.2024
pourquoi priver ,par exemple,les lyonnais d une occasion de se réjouir ,d être unis dans la liesse ...?
cela
Par Anonyme, le 15.05.2024
je remercie le hasard ou la rencontre de déterminismes , de passions,....d 'avoir rencontré ce trio, cette qua
Par DUBREUIL, le 23.04.2024
c'est bien cette mémoire que je souhaite valoriser avant qu'elle ne s'en...vole merci marc et les autres..
Par Anonyme, le 23.04.2024
· Porticciolo, village pêcheurs Cap corsins
· KORHOGO ( Cote d'Ivoire ) OPÉRATION ROUGE BAISER
· Chantier naval de Porticciolo de Cagnano
· La résistance à Cagnano... Porticciolo -Cap Corse - en 1943.
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· suzanne cornillac
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Date de création : 22.11.2008
Dernière mise à jour :
16.02.2025
2501 articles
DES RACINES
ET DES
VOILES
Écu a storia di i maestri construttore
di Cagnano
Ont participé à cet ouvrage
Ma sœur, Marie-Georges et son fils Olivier qui aimait cette plage de Porticciolo.
Christian Torcheux, pour ses nombreux dessins et ses corrections.
Marie-Edith mon épouse.
Je remercie
Mr Pierre Marie Francioni pour ses souvenirs d’enfance. A Cronica HS N°6.
Mme Lucciana Massinari pour les ouvrages de menuiserie.
Pour la mémoire des Corses : les travaux de la Société des sciences historiques de la Corse.
Pour l’histoire des Cap Corsins : A Cronica le journal de l’histoire du Cap, éditée par l’association Petre Scrite.
Mr Ph. Luchetti, pour ses nombreux articles parus dans la revue « A Cronica «
MrJ.C. Liccia, également pour ses recherches parues dans la revue « A Cronica » Les Archives départementales de la Haute Corse, pour les archives de la marine à Bastia, les délibérations du conseil municipal de Cagnano.
La Bibliothèque de Bastia pour le journal de la Corse 1872.
Pour les métiers du bois, la revue Chasse-marée N°197 juillet 2007 et Le guide des termes de marine.
Persée-Le tonnage maximum des navires de commerce romains.
Je remercie les Cagnanais :
Mauricette et Joseph Romiti,
Ida et Dominique Dellamonica, pour leurs souvenirs de pécheurs.
La famille Simonpietri possède les livres de bord de leur ancêtre, capitaine-marin engagé dans la guerre navale. Ces documents sont publiés dans le bulletin de l’association Petre Scritte. Le docteur Henri Joseph Bertrand-Biaggi, archiviste des familles.
Le commandant Marcel Dellamonica, auteur de la carte des vents du Cap Corse, et de ses souvenirs de pêche. Mme Chantal Dellamonica : La photo de la Fête de St Antoine.
Mr Albert Mattei, maire de Cagnano, a réalisé un peignage généalogique, il accepte sa publication.
Mme Gabrielle Fiesci-Decouard pour sa traduction de document.
Pour le descendant que je suis, après l’accueil de mes grands-parents, de mes cousins, de Josette, Mauricette, Louise Dellamonica ; après m’être désaltéré à notre fontaine, brassé l’eau de la plage de Misincu, navigué sur un dériveur Vaurien, parcouru les maquis de Cagnano et de Porticciolo, le temps est venu de rassembler mes souvenirs ; de gagner sur le temps avant qu’il ne m’échappe.
Préface
2008_ J’écris le scénario de la conquête de l’île de Capraia par les Corses ; désirant publier une version en langue italienne, je m’adresse à une agrégée d’italien qui accepte la traduction et remarque qu’un évènement aussi mineur ne mérite pas une publication ; elle n’a pas tort, c’est l’avis d’une génération. Nos grands-parents n’étaient pas bavards sur leurs vies et leurs familles, enfants nous posions peu de questions. Les générations de Jeanne Maestracci- Gassin , Jeanne Maestracci-Tomasini, Connie Biaggini de San Fransisco amorcent la quête de mémoire. Leurs récits évoquent les fragiles histoires familiales, elles nous rapprochent de l’île où reposent nos aïeux et c’est le penchant de notre époque d’immortaliser, d’abriter l’éternité des momies égyptiennes dans les musées et de se pencher sur la vie quotidienne de nos ancêtres en créant une forme d’immortalité pour tout le monde ; évitant ainsi qu’une deuxième disparition vienne avec l’oubli.
Présentation
Je ne suis pas historien ; j’ouvre un livre de vies, je choisis quelques pages de ce mille-feuilles, je dévoile une petite histoire qui n’est pas que du bon temps. J’adopte depuis six mois, le concept de Michèle Perrot, « l’histoire, c’est de l’artisanat que l’on fabrique avec des matériaux…on interprète plus qu’on ne crée ». N’étant pas submergé par les archives, je me permets de reconstruire le monde familial à partir des silences, de me poser en conteur. Ce récit est un témoignage pour les charpentiers de marine de la Corse, il valorise un savoir-faire industriel, il s’appuie sur une généalogie, il n’est pas limité à la famille Biaggini. Pour simplifier, le passé s’écrit au présent, celui dans lequel nous vivons.
Autant de disparus, autant de muets
Le souvenir de nos paysans-menuisiers-charpentiers s’efface avec le temps, les laissant anonymes pour noscontemporains. Pour Mr Joseph Giuliani doyen de Santa Severa rencontré à la terrasse de « Chez Jean » « Tout cela est lointain, les témoignages sont rares me dit-il ; « Je me souviens du dernier Biaggini habitant Adamo, il portait le sobriquet de Sterpa figui, razzia sur les figues ». Pour les années 1840, J.C. Liccia relève un total de 43 charpentiers constructeurs dans toute la Corse. Ces 43 ouvriers charpentiers se répartissent de la façon suivante : 3 à Bonifacio, 5 à Ajaccio,1à Calvi,1 à St Florent, 14 dans le Cap Corse. Pour notre région : Nonza 1, Pino 2, Morsiglia 4, Centuri 1, Tomino 1, Cagnano 4, Brando 1, Bastia 19. Ils ne sont pas inventeurs, esprits inspirés, hommes de lettres, financiers, politiciens, guerriers… nos charpentiers de marine sont les héritiers des constructeurs grecs, phéniciens, romains, italiens, magrébins…une culture ancienne toujours renouvelée.
L’empire romain octroie la citoyenneté à un charpentier de marine-armateur après 6 ans, s’il importe à Rome, chaque année 70.000 boisseaux de blé( un boisseau=8,7 litres). Cette ville de 700.000 habitants, toujours à la merci d’une pénurie de pain, est très dépendante du transport maritime, cabotage ou hauturier.
Les origines en clair-obscur, quelques brins d’histoire.
Nous vivons ici depuis si longtemps, alors j’ose dire que cette vallée abrite nos hypothétiques ancêtres de l’âge du fer ; pourquoi ! 1901, à Cagnano, des ouvriers travaillant à l’exploitation d’une carrière de pierres entre Piazza et Carbonacce mettent à jour, sous une grotte effondrée, une nécropole funéraire datant plus ou moins du V° siècle avant J.C. Les squelettes et les parures sont maintenant dispersés entre les musées de Bastia et de Lyon. Je devine votre question : … conservons nous une trace génétique ? nous possédons des ossements, pouvons-nous y déceler un peu d’ADN, ce Brin-machine à remonter le temps humain, ? … malheureusement non ! ces corps ont été incinérés.
Aux temps historiques le Cap Corse est habité par la tribu des Vanaccini, des industrieux, qui voient leur vie rythmée par les occupations étrusques, -grecques, romaines, byzantines, vandales. An 704, les sarrasins (sémites arabes) effectuent leurs premières incursions sur le territoire corse, elles durent sept siècles. Elles coupent partiellement l’île de la péninsule italienne et contraignent les habitants à vivre dans le haut des vallées.
De 810 à 1030, le littoral Corse est sous la coupe des maures (berbères musulmans). De 1077 à 1284, l’ensemble de la Corse subit deux siècles d’occupation pisane.
Le 6 aout1284, au large de la ville de Pise, une belle journée ensoleillée, une mer d’huile, une tour blanche posée sur l’îlot de la Meloria ; dans ce décor de vacances, le charme estival est brisé par la bataille navale de la Meloria. Après un âpre combat, Pise vaincue pleure 10.000 victimes et la perte de son outremer. La Corse, territoire pontifical en vertu de l’usage « d’une fausse donation « de Pépin le bref au pape Etienne II, passe en aout 1284 de la tutelle de Pise à celle de Gênes. S’en suivent six siècles d’occupation Génoise. Ces deux cités-états accaparent la quasi exclusivité du commerce de l’île.
1357, voit une taxe de trop, le mécontentement devient général ; l’île s’adonne à la révolte antiféodale dans le genre jacqueries ou gilets jaunes ; au sud les seigneurs de Cinarca et au nord les seigneurs d’origine génoise conservent leurs seigneuries ; au centre, les -anti- proclament la « terra del commune », sans féodaux, remplacés par qui ? devinez ! par des « caporaux », nouveaux nantis-exploitants, à très forte tendance héréditaire. L'Histoire est riche de leçons ; au début nous entendons les promesses, c’est l’euphorie ; ça tourne mal, nous déchantons.Faute d’entente sur le partage du pouvoir, les caporaux sollicitent le protectorat de Gênes : cette opération est nommée le « DEDITIO « que je traduis par « la soumission dévouée «
Années1700-1702, deux années de famines. 1729-176, la « guerre de 40 ans », des années de luttes armées contre Gênes et la France. 1757, le général Pascal Paoli fonde le Royaume République de Corse.
1768, La royauté française achète à la citée de Gênes, ses droits sur l’île de Corse. Le traité de Versailles entérine la cession de la Corse au royaume de France ; il s’en suit une dizaine d’années de rébellion larvée.
La révolution française, puis la terreur ; 5 millions de francs or pénètrent puis disparaissent en Corse, sans laisser de trace !
Royaume Anglo-Corse, Empire, Répression, Restauration.
Le 30 juin 1830, première liaison Toulon-Bastia par un bateau à vapeur » le Golo »,en trente heures.
1835, Louis Philippe étant roi des français : Discours du ministre des finances à l’assemblée nationale : « ...Il faut l’avouer, la Corse a été jusqu’à présent l’objet d’un étrange et funeste oubli …Bastia et Ajaccio reçoivent un bateau à aubes toutes les semaines. Mais en tout la Corse n’a reçu en 1834 que 2322 tonneaux et les droits de douanes ne se sont élevés qu’à 211.422 Frs «
1852, Ferdinand Grégorius, sujet allemand, visite et décrit la Corse :
« …Le commerce est peu important. On exporte surtout de l'huile, que la Corse produit en grande quantité (si le pays était plus industrieux, il pourrait à lui seul en livrer pour plus de 60 millions de francs ?), des citrons, du vin, des légumes, des châtaignes, du poisson frais et du poisson salé, des plantes tinctoriales, des peaux, du corail, du marbre, beaucoup de tabac manufacturé, surtout des cigares dont la feuille est importée dans l'île. Les principaux objets d'importation sont les céréales, le riz, le sucre, le café, le bétail, la soie, le coton, la toile, le cuir, le minerai de fer, la fonte, les briques, le verre, la poterie.
Il y a un écart énorme entre l'importation et l'exportation. La douane entrave l'industrie et le commerce de l'île en empêchant les étrangers d'y échanger leurs produits. Les Corses sont contraints de payer dix fois leur valeur, les articles de consommation français, tandis que les vins de Provence entrent sans payer de droits et font une concurrence désastreuse aux vins indigènes. C'est aussi de Provence que les troupes de l'île reçoivent la farine et les légumes nécessaires à leur approvisionnement. Il est défendu d'exporter du tabac sur le continent français. Les règlements tyranniques de la douane pèsent lourdement sur ce pauvre pays qui, obligé d'acheter tous les ans pour trois millions d'articles à la France, peut à peine lui en vendre pour un million et demi. La Corse paie chaque année au trésor un million cent cinquante mille francs. Le commerce se fait surtout par les ports de Bastia, d'Ajaccio, de l'Île Rousse et de Bonifacio. J'ajoute quelques détails sur l'agriculture et l'industrie. L'agriculture, fond de toute richesse nationale, est en Corse fort négligée. De fait, les terres cultivées ne constituent encore qu'un peu plus des trois dixièmes de la superficie de l'île, évaluées à 874.741 hectares. Les progrès de l'agriculture sont retardés par le banditisme, les luttes intestines, la vaine pâture, le manque de routes, la grande distance des terres arables aux lieux habités, l'insalubrité de l'air dans les plaines. Ainsi que l'agriculture, l'industrie est dans un état misérable. Elle ne s'occupe que des besoins immédiats, des objets nécessaires au travail manuel et à l'alimentation. Les femmes fabriquent presque partout le pannu corsu, drap brun grossier appelé aussi pannu laniu ; les bergers préparent le fromage et le brocciu, fait avec du lait caillé. Il n'y a de salines que dans le golfe de Portovecchio. Sur plusieurs points de la côte on pêche des sardines, des thons, du corail mais la pêche n'y est pas fort active ».
Pour de nombreux cap-corsins, le monde est limité ; la nuit peut être une angoisse, l’hiver une maladie, l’été apporte ses douceurs, « novembre en or » les châtaignes et les olives jusqu’en décembre. C'est avec économie qu’on alimente le feu qui réchauffe ; deux bûches de bois embrassés à une extrémité entretiennent une lente combustion, quelques brindilles relancent la flamme. Pour se nourrir, s’habiller, la population consomme ce qu’elle produit et tente de maitriser les pénuries alimentaires.
Pâturages d’herbes rases, épis de blés sur courtes tiges, petites olives, notre économie très dépendante du climat est une « économie au ras du sol, en dessous des marchés » ( professeur F. Braudel) ; je rajoute pour le Cap Corse au ras des flots.
Notre vallée n’est pas surpeuplée ; les pratiques agricoles traditionnelles et diversifiées permettent la survie ; la population a su profiter vers 1650 de la politique agricole de Gênes pour augmenter la production de vin et la plantation de châtaigniers. Elle exporte du vin, des agrumes, du bois. Ici l’homme et l’animal travaillent pour vivre ; la force musculaire, le bois, les métaux, la terre, sont les principales matières premières.
Toutes les terres arables sont utilisées. La propriété terrienne est insuffisante pour subvenir aux besoins des familles pauvres, des travailleurs précaires, des petits entrepreneurs ; ils doivent accepter de prendre des terres en métayage, de se louer à la journée, une cueillette quotidienne sans lendemain. Une autre couche sociale arrive « bon an, mal an », à vivre « del suo », c’est à dire de ses terres et de son bétail.
Voici, un extrait des mémoires rédigées en 1993 par Jeanne Maestracci-Tomasini :
…. « Mes origines sont évidemment paysannes, puisque corses. A ce propos, il y a longtemps, un jour, à un inspecteur primaire qui m'inspectait dans ma classe et m'interrogeait sur la paysannerie de mon île où il n'avait jamais mis les pieds_ j'ai dit : " il n'y a pas de paysans en Corse, j'exprimais là, l'idée, que ce paysan n'a pas, apparemment, la mine et la mise d'un paysan comme on en rencontrait autrefois, dans les régions rurales du continent ; sa physionomie grave, son expression rêveuse, son comportement digne, le distinguaient. Pourquoi ? il sait appartenir à un peuple dont la nationalité s'est perdue au cours des siècles d'invasions, à un peuple frugal qu'une antique pauvreté a poussé à naviguer, à émigrer.Je suis fière d'appartenir à cette paysannerie très particulière ; il ne faut jamais renoncer à ses origines. »
La pauvreté c’est facile ; l’aisance est plus longue à expliquer.
L’époque va se révéler propice aux initiatives. Certains jouiront de petites fortunes, de positions de monopole, de protections, de statuts confortables d’emplois plus sûrs. Au-dessus, les notaires, religieux, médecins, rentiers, négociants, artisans, pêcheurs de corail en Corse et sur les côtes algériennes ; capitaines à la mer, armateurs, expatriés aux Amériques, bourgeois-notables de Bastia ou Marseille, tous propriétaires aisés constituent une bourgeoisie. Ils sont souvent exportateurs de vins, d’huile, de poissons conservés ; importateurs de draps, de farines, d’outils. Ils possèdent un excèdent de numéraire qui leur permet de pratiquer des prêts avec intérêts et parfois la saisie sur les maigres patrimoines ; une dette non remboursée est un plongeon dans la pauvreté pour toute une famille. Dans la mémoire des plus anciens s’exprime encore en 2020 une méfiance envers une bourgeoisie qui peut tenter avec succès de mettre un prolétariat à sa merci. Comment fonctionne le système ? j’ai besoin de numéraire, je possède une vigne ; je demande à Mr X d’établir un cens ou « vrai revenu », sur ma vigne ou ma châtaigneraie, contre une redevance annuelle en espèces, prélevée sur la production et égale au dixième de la somme empruntée. En échange, je rentre chez moi avec un capital, 10 napoléons or, un bol d’air frais… je dépense un peu, j’améliore l’ordinaire, je rembourse une autre dette. Cet emprunt crée un droit sur ma terre, c’est un impôt personnel. Je verse chaque année un intérêt calculé sur le rapport de la terre gagée que je cultive ; cela pendant des années, tant que je ne rembourse pas ; la dette est transmissible à mes héritiers. Tout marchand est un peu banquier, le commerce de l’argent est un commerce comme les autres ; ainsi fructifient les bénéfices réalisés dans le négoce. Ce système ancien, généralisé à toute l’Europe, florissant à Gênes est appliqué enCorse. Pendant la révolution française et tout le 19° siècle s’ouvre le débat du financement de l’état : taxes pour tout le monde, ou impôts et taxes ou avances faites par les rentiers avec rente perpétuelle versus remboursement du capital.
AU 19° siècle, l’état prélève 4 impôts : le foncier, qui est un impôt sur le revenu agricole et les constructions ; l’impôt personnel mobilier, enfin celui sur les portes et fenêtres. Pour être électeur il faut payer environ 200 frs de contribution.
Le chantier naval doit être soumis à la patente, notre taxe professionnelle.
En nos temps de dette publique, voici un extrait du débat budgétaire à l’Assemblée nationale en 1837. Le ministre des finances a la parole « …On thésaurisait pendant la paix pour faire la guerre…ce procédé a disparu pour faire place au crédit…le crédit, messieurs, prend les capitaux où ils sont et lorsqu’on en a besoin, de manière à rendre inutile toute accumulation improductive ; c’est là, nous le répétons le procédé des pays civilisés ».
Donc chez les principali, numéraire confortable et un patrimoine constitué par les biens immobiliers, maisons, pressoirs, parts de barques ou de navires, entrepôts, jardins, oliviers, fruitiers. Les successions énumèrent trousseaux, meubles, vaisselles, bijoux.
Ils n’ont pas inventé l’obésité.
L’Europe de cette époque ne tend pas à vous accueillir avec le confort, 10 tétines, 5 doudous, les sodas, l’école élémentaire, les études, 5 paires de baskets, l’écran, la trottinette, la moto, les vacances, la médecine, puis le iPad 4G, enfin l’Ehpad. La société corse rurale n’est pas spontanément organisée pour fournir l’abondance vestimentaire, récréative et nutritive. L’alimentation du populu minutu, n’est pas une cuisine et encore moins un art de manger. Pour eux, il est possible que le souci ne soit pas, qu’est-ce que je mange aujourd’hui ? mais, est ce que je mange aujourd’hui ? La part alimentaire prélevée en autosuffisance est importante. De nombreux témoignages soulignent la forte consommation de lait et de farine de châtaigne, d’ail et d’oignons, l'importance de l'orge dans l'alimentation : …"Du pain d'orge, du fromage, des châtaignes, ou une soupe à l'eau-ail et à l'huile, voilà à peu près leur nourriture, quoique le ménage soit aisé, car on ne connait presque pas de pauvres ici. » Pour compenser le déficit en farine de blé, elle exporte du charbon de bois, des agrumes, du vin.
Le cadastre impérial de 1860 répertorie 25 casone-pressoirs dans la zone forestière en dessous de Piazze ; à Porticciolo, notre maison en possède un, Christian Mons un autre. Comment expliquer ce déficit en blé par rapport à l’orge et au raisin ? le blé se plante à l’automne, il aime les terres riches et profondes, il apprécie l’eau avant sa maturité ; l’orge se contente d’une terre légère, caillouteuse, il est moins sensible au déficit en eau. La vigne ne connait pas l’assolement, elle est plantée pour une ou deux générations ; elle produira chaque année ; évidemment il y a les mauvaises années, cependant le vigneron est gagnant dans l’échange vin contre blé.
En 1620, Cagnano exporte 140 hectolitres de vin. Ce commerce se fait presque exclusivement vers Gênes, nécessite une licence, supporte des taxes, un goûteur, un contrôleur des cargaisons. Pourquoi un goûteur ? parce que l’exportateur tend à déclarer du vinaigre pour payer moins de droits. La culture de la vigne, le commerce du vin génèrent à toutes les époques des revenus plus confortables que le jardinage.
Dans les bois…
Après l’araire et la pioche, apparait l’artisanat par goût, par ingéniosité. L’ouvrier charpentier est le plus souvent formé par son père ou un proche parent maître dans son art. Ces maestri-responsables ne forment pas une classe sociale intermédiaire, ce titre d’autorité honore toute personne capable de former des élèves ou des apprentis artisans. Mes modestes recherches n’ont pas trouvé en Corse les traces de statuts régissant la profession des menuisiers-charpentiers (créés en Europe continentale au 13° siècle).
Le chauffage, la marmite, le bâtit, les outils, l’agriculture, l’ameublement utilisent le châtaignier, le sapin, le chêne. L’exportation de bois vers Gênes est dédouanée, les forêts « laricio » de l’île excitent les convoitises des armées navales européennes.
Nos « industrieux », choisissent parmi les essences disponibles, selon les contraintes techniques ; ils coupent à l’automne en lune décroissante. Ils connaissent depuis longtemps la résistance des bois de chêne, des châtaigniers, aux insectes, à la déformation du sec ou de l’humidité. J’examine les meubles en châtaigniers que nous possédons : commode, banc, tables, placards de mur, coffres de mariage ou de conservation des grains, ils sont intacts.
Dessin14 JPEG scieurs de long « toute la page » ou demi page
PHOTO DE CHARPENTE P 8190052
Vient le temps du travail humain et animal ; la force, au maniement des haches pour l’abattage, l’élagage en forêt ; la force des animaux pour débarder ; la force et l’application pour la découpe des planches qui passent par l’axe du bois. Les grandes charpentes sont le plus souvent en châtaignier ; les solives ou les lambourdes de parquet volontiers en olivier ; ces deux essences supportent bien les insectes, elles sèchent vite, ne se fendent pas, elles résistent aux charges.
La main d’œuvre qualifiée est rare, compensée par l’aide de deux ou trois ouvriers en Cdd journaliers ; se présentent souvent à la fin de l’automne, venus d’Italie, des scieurs de long, expatriés pour 8 mois, payés au forfait.
Le maître charpentier est partout. Il répond à une commande ; il écoute, propose, mesure. Pour une toiture le maestro trace au sol avec un bâton le dessin de la charpente ; une cordelette, une équerre pour reporter les angles ; une géométrie intuitive et d’expérience ; les mesures, palmes ou toises, laissent encore une large part au bon sens. Ce métier est dangereux, particulièrement lors du levage des poutres à bout de bras, à l’aide d’une chèvre ou de palans. La sécurité incite à ne pas dépasser des portances supérieures à 5 mètres.
Les gestes des menuisiers-charpentiers se répètent inlassablement pendant plusieurs générations. Leurs enfants élevés dans le milieu de l’artisanat, acquièrent le goût de la forme, de l’équilibre des dimensions, de la qualité. Les outils sont leur fond de commerce ; ils se transmettent de père en fils : herminettes, haches, scies, rabots larges, d‘autres fins et longs, une grande varlope(rabot), des tarières ou un vilebrequin et ses mèches, un burin, des gouges, des maillets et des marteaux.
La menuiserie pour les mécaniques qui font tourner les meules : les roues horizontales admirablement adaptées aux cours d’eau du Cap Corse. Le bois ouvragé fournit les objets courants du mobilier, meubles droits sans décoration, sans symboles, du simple pour des clients simples…bancs, portes de placards ; la menuiserie du petit bois, pour les outils, le joug des boeufs, l’araire romaine, les portes, les volets intérieurs ; peut-être des commandes pour le couvent, les chapelles, les notables ; les meubles de la maison de Luciana Massinari à Suare, nécessitent l’emploi d’un outil appelé « bœuf », pour tracer les sillons ; la décoration s’arrête là ; menuisiers mais pas ébénistes.
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Ouvrage de Pierre Marie Biaggini 1830
La culture de la vigne réclame l’intervention du menuisier : les planches du pressoir, le cabestan qui permet de remonter l’énorme pierre de compression, la confection des tonneaux avec les planches issues de châtaigniers sauvages.( Dominique Cervoni ) La lignée de ces paysans-menuisiers charpentiers ne laisse pas des ouvrages ou des traces signées dans la commune. Ils vivent de leur travail ; dégagent-ils un excédent pour acquérir quelques parcelles de terre ? Je le souhaite, tout travail mérite d’être honoré…mais en cinq mots : Ils ne font pas fortune.
Le cabotage, pour découvrir l’espace.
Ancêtre des voyages au long cours, c’est le premier moyen de déplacement maritime des civilisations côtières ; transports maritimes sur les courtes distances, de cap à cap pour les passagers, les ouvriers italiens et les marchandises. Il se décline en petit cabotage, de marine à marine, Porticiolo-Maccinagio ou Pietracorbara. Les transports sont souvent non programmés, sans lignes régulières, ce sont des échanges entre réseaux marchands. Bornage ou macro cabotage vers Bastia, PortoVecchio, Ajaccio, Calvi, Livourne, la rivièra de Gênes, Nice, St Tropez, Marseille, en fonction des récoltes de vin, de châtaignes, de cédrats, des exportations de bois, de charbon de bois, des importations de farine ; ce sont des transports saisonniers, selon les conditions climatiques, rares en hiver, maximum d’avril à octobre. Pour la cote-est, le port de Bastia joue un rôle central, administratif, fournitures d’armements, chantiers navals. .
Le Cap Corsin et la mer.
Un Lyonnais pour remballer quelqu’un, lui dit « va te faire voir » ; Mauricette Romiti et tous les cap-corsins lancent un « vai in mare ! « va te jeter à la mer ». Dans ce langage familier, la mer est un lieu de perdition. Cependant les cap-corsins ne se résignent pas à vivre repliés sur eux-mêmes, à ne connaitre du monde que leur vallée ; ils rejettent une nationalité contrainte par la frontière maritime. Ils veulent s’épanouir en économie ouverte : cabotage, commerce et échanges avec le continent voisin.
Habituellement, si la mer est essentielle pour naviguer, la présence de larges baies ou de bassins bien protégés comme celles de la Bretagne, font un peuple de marins. Chez nous, les patrons à la mer s’adaptent à l’absence de mouillages protégés en toute saison et par tout temps (sauf Centuri et Bastia). Les bateaux ne pouvant s’approcher de certaines marines insulaires procèdent au chargement et au déchargement par le biais d’une chaloupe ; il s’agit donc de petites unités, rapidement déchargées au large d’un abri précaire ou sur une plage.
Les marins embarqués acceptent la rupture familiale, les tempêtes, les naufrages, les terribles coups de lebecce, « le vent qui noie », selon Joseph Romiti marin de Porticciolo ; les raz de marée provoqués par les gros coups de gregale ; enfin avant le 18° siècle, l’insécurité causée par la guerre dite de course, l’esclavage au Maghreb ou en Turquie, découragent les moins intrépides. A partir du 16° siècle, les centurais, ceux de Morsiglia, de Rogliano, s’imposent en Méditerranée, Marseille, Barcelone, Madrid et la côte algéroise pour la récolte du corail (P. Lucchetti). L’implantation d’une vingtaine de couvents franciscains, représente une ouverture sur la chrétienté, sur la culture continentale. La flottille de pêche du couvent de Cagnano, autorisée par l’évêque, basée à Misincu ou Porticiolo, comprend quatre barques ; ces embarcations permettent les échanges vers le monastère de l’île de la Gorgone et les communautés continentales. Quelques cap-corsins fréquentent les universités italiennes, les ateliers d’art ou d’industrie.
La navigation fournit aux cap corsins une contribution à sa survie alimentaire, pour le matelot un salaire immédiat ; parfois des grandes ou de petites fortunes, en se livrant au commerce ou à la guerre de course ; elle ouvre l’espace de vie.
Printemps1760, à la consulte de Casinca, Pascal Paoli donne une impulsion au destin maritime du Cap Corse en aménageant les ports d’Île Rousse, Centuri et Macinaggio, pour la guerre de course et la nécessité commerciale d’exporter les productions locales, d’importer des compléments alimentaires ou industriels et des armes. Un export-import qui se contente de navires de faibles tonnages, tirés sur les plages aux escales de transit.
1768, L’annexion de la Corse ne s’accompagne pas d’un aménagement du territoire, d’une mise en valeur commerciale, industrielle. Les quelques productions sont taxées à l’exportation. La royauté française qui colonise la Corse pour la qualité de ses laricio destinés aux matures de la marine royale, impose son administration et applique les règles maritimes inspirées par le ministre Choiseul.
L’île fait partie de l’arrondissement de Toulon, sous le commandement d’officiers généraux qui regroupent sous leur autorité des commissaires, des chefs de quartier, qui se divisent en syndicats s’étendant sur un nombre variable de communes.
La révolution maintient ce système en substituant l’inscription au régime des classes.
Un inscrit maritime (gens de mer) est susceptible d’être appelé au service de 18 ans à 50 ans ; ce régime est plus contraignant que pour l’armée de terre (le soldat est libéré de toute obligation après 6 ans). La formation d’un marin est plus longue, plus technique que celle d’un soldat.
Le second Empire limite ce temps de service à 6 ans.
Cette inscription maritime imposée sur tout le continent concerne les navires, les marins, mais aussi les apprentis et les ouvriers charpentiers, calfats, perceurs, voiliers, cordiers etc…les registres sont tenus scrupuleusement ; le ministère de la Marine connait chaque jour l’état de sa réserve.
À Cagnano
1770, deux ans après l’annexion française, dans un rapport administratif, les habitants de Cagnano sont décrits comme « forts, robustes, bons travailleurs, industrieux, excellents marins. Le village est habité par 960 habitants répartis en 214 hommes, 244 femmes, 244 garçons, 293 filles. Le rapport conseille de concentrer les efforts de production sur un petit nombre de terres abritées des vents, près des hameaux et des sources.
1846, le recensement dénombre 837 habitants, répartis sur 9 paesoli, dont 55 habitants à Porticciolo.
Les Biaggini sont 31, un à Carbonacce, dix à Adamo, trois à Terre Rosse, sept à Piazze, dix à Porticciolo.
L’agriculture emploie 43 % des chefs de famille, la marine 23%. La brigade des douanes de Porticciolo représente 5% desmétiers. Vous notez l’importance de la douane au 19°siécle : l’impôt direct sur le revenu n’existe pas, les finances de l’état sont largement alimentées par l’impôt indirect, acquitté par l’acheteur ; des taxes portant sur les produits de consommation courante. La commune possède une plaine fertile qui s’étend jusqu’à la mer ; les coteaux sont plantés en vignes, les vallons d’altitudes en châtaigniers et oliviers. Selon F. Braudel… » le pain et le blé sont les soucis sempiternels de la méditerranée ». La production de blé dans la plaine de Misincu est insuffisante pour fournir du pain à tout le monde, mais les récoltes de châtaignes permettent d’éviter les disettes.
La communauté vend ses productions de vin et d’huile à Bastia, dans le reste de l’île et en Italie.
Porticciolo de Cagnano naturellement.
1770, pour le paesolu de Porticciolo, le plan terrier établi pour le royaume de France nous renseigne : « Ce hameau compte de beaux magasins, 8 barques, dont deux grosses qui commercent dans l’île …Les habitants ont une petite plage appelée marine de Porticciolo qui suffit à leur commerce par mer. Les vents d’est y sont les plus à craindre, les bâtiments n’y sont pas en sureté, on les tire à terre. Les marins de la communauté désireraient que l’on y construisît un petit môle ; ils donneraient volontiers 25 journaliers à corvée pendant tout le temps que dureraient les travaux. Ils prétendent avoir le tiers de la marine de Santa Severa de Luri, quoique située hors de leur territoire. La grande plage appelée Misinu ne leur est d’aucune utilité, étant exposée aux vents de toute part ». La tour défensive construite vers 1520, délabrée au 19° siècle, ne protège plus les habitants ; les magasins bâtis sur le relief collinaire nord et nord-ouest, abandonnent le bord de mer au chantier, aux barques de pêches. Aux belles saisons, la profondeur de la plage (améliorée par l’arasement du piémont et du promontoire sud) et son empierrement permettent la mise en chantier d’unités de 170 tonneaux. A l’emplacement actuel de notre maison de trois étages, la famille Biaggini possède un pressoir à raisin, deux caves et un étage d’habitation composé de chambres, pièce à vivre, une grande cuisine avec un four à pain intérieur. A quelle époque remonte ce patrimoine ? est-elle suffisamment fortunée, a-t-elle vendu ses modestes possessions sur Carbonacce et Adamo ? Je ne cherche pas les actes notariés… mais ce 1° aout 2019, à Luri, je partage un café avec Henri Joseph Bertrand ; il raconte » …la famille DIAS fut un temps, la plus dotée en terre de la commune ; elle résidait à Carbonacce ; dans ce hameau, les Biaggini possédaient deux maisons voisines ; une alliance matrimoniale avec les DIAS est possible ; de là, l’héritage à la marine, le vallon du Veticalu. Pourquoi pas ? puisque les Liccioni, originaires de Barretali, alliés aux Dias, y possédaient une terre. S’est- elle endettée pour acquérir le bas du vallon du Veticalu». Photos docs marc P8220011JPG sur une page et au dessous le plan cadastral de 1860
photo numériser 14 copie. Jpg cadastre de 1860
Ce vallon débute à l’ouest dans les hauteurs, par un replat, planté de figuiers et de châtaigniers ; les fonds des bassins versants de ruissellement sont construits en terrasses pour retenir la terre arable. Accompagné par son torrent, il s’étend sur 1000 mètres jusqu’à la mer .
PhotoDSC00185 La route royale, puis impériale, enfin territoriale délimite les propriétés Biaggini-Maestracci et Antoine Mattei qui ont les mêmes ancêtres.
Les premiers touristes nous donnent l’atmosphère.
Septembre 1852, Mr Ferdinand Grégorius, visite la Corse. « …Chaque vallée ou plutôt chaque piève du Cap-Corse a une marine, et il est difficile de rien imaginer de plus silencieux que ces petits ports sur la plage déserte. J'arrivai à la marine de Luri par une chaleur étouffante, il était midi, l'heure où le dieu Pan se livre ordinairement au sommeil. Tous les habitants de la maison où je me proposais d'attendre la barque étaient comme assoupis …Venant de Santa Severa, l'embarcation entra à Porticciolo, petit port avec une douane, pour y faire enregistrer ses quatre passagers. Il y avait quelques navires à l'ancre. A la vue des figues mûres sur les arbres et des raisins des vergers, notre appétit se réveilla. Pour quelques sous, on nous apporta quantité de figues parfumées et de raisin muscat délicieux, c'était la moitié d'une vendange (il doit s’agir de la propriété d’Antoine Mattei). Commentaire : il ne voit pas le chantier naval ! 1862, l’abbé Galletti visite le Cap Corse …. « Lorsque on a dépassé la petite plaine de Pietracorbara, on rencontre la Torre dell’Osso… A peu de distance de là, on trouve Porticciolo, petite anse où l’on construit une espèce de jetée. On y voit de gros esquifs qui vont ordinairement transporter sur les côtes d’Italie du vin et des citrons que produisent en abondance les villages de Cagnano, situés aux environs. Les habitants de cette commune sont fort adonnés au travail, et ils ont des mœurs plus douces que leurs voisins de Pietracorbara.
Dans la susdite commune est le couvent d’Oveglia, situé sur une éminence des plus pittoresques et qui domine toute la vallée. Ce couvent, encore intact, conserve un autel très remarquable sculpté en bois durci et d’une élégance rare. Parmi les pièces les plus précieuses de cet autel est le tabernacle offrant plusieurs étages soutenus par des colonnes enrichies de statuettes et autres ornements finement sculptés, œuvre d’un moine ébéniste très doué (il ne parle pas du tableau de Vierge en majesté, volé ces dernières années). 1837, Porticciolo s’invite à Paris. Extrait du débat budgétaire de l’Assemblée Nationale. Loi du 4 mai 1837 relative à l’achèvement des routes royales de Corse et au perfectionnement des ports maritimes.
«… les ports de Corse ont été laissés dans l’abandon le plus complet… la Corse ne possède que très peu de ports sur la côte qui regarde l’Italie, sauf Porto-Vecchio au sud, Bastia, Porticciolo et Macinaggio au nord….
Le port de Porticciolo peut contenir huit à dix bâtiments au cabotage ( Macinaggio 16 bâtiments).
…Centuri, Macinaggio, et Porticciolo se partagent l’expédition des vins du Cap Corse, qui sont transportés à Marseille, à Gênes et à Livourne.
…Messieurs, les habitants de Porticciolo et Macinaggio se sont directement adressés au gouvernement pour demander les travaux qui leurs sont nécessaires…les ingénieurs ont satisfait nos demandes en dressant un tableau qui indique à la fois le montant des dépenses à faire dans chaque port et le degré d’urgence des travaux.
1838, donc un an après ; rapport à l’Assemblée : …un nouveau môle a été construit au port de Porticciolo ; ce môle est entièrement terminé.
Commentaire : …Pour tenir un territoire il faut l’aménager !
1862, l’abbé Galetti parle d’une jetée en construction .…réparation ou adjonction de deux bittes d’amarrage sur la berge sud ?
1868, un peintre anglais, Edward Leart, traverse Porticciolo »…le dernier de ces miséreux hameaux de pêcheurs ; une plage de sable, son aire à blé, dans un amphithéâtre de montagnes …. Santa Severa, groupe de fermettes d’une mélancolie désarmante ». A Cronica, Mme C.Weber.
Ce dernier témoignage clôt la liste des visiteurs qui traduisent leur sentiment de vide, qui ne parlent pas du chantier…pourquoi ? les commandes sont-elles rares ?
Le progrès s’accroche.
À partir des années 1830, la Corse se transforme profondément, les moyens de transport connaissent une révolution avec la mise en place d’un réseau routier départemental, puis la construction des voies ferrées, le développement d’une marine à vapeur. C’est toute l’économie qui évolue, entraînant la société dans de nouvelles manières de produire et de vivre.
Les négociants-armateurs se rendent à Bastia par voie de mer pour leurs achats, souvent à Livourne pour leurs affaires et leurs dépôts bancaires.
Henri-Joseph Bertrand évoque la pression des financiers bastiais pour activer le désenclavement routier du Cap, afin que les riches « américains » abandonnent la place financière de Livourne.
Les tonneaux de vin et les cédrats sont centralisés par les propriétaires près des ports. Les fruits sont triés, entiers par paniers, ou déposés tranchés dans des barriques d'eau de mer puis entreposés dans les magasini du hameau. Les commandes proviennent des grossistes de Livourne, Nice, Marseille, qui livraient confiseurs ou parfumeurs dans toute l'Europe occidentale. Les navigateurs assurent en retour l’importation des farines, tissus et matériaux de construction. 14 mai 1865, tous ceux qui produisent dans l’île, sont conviés à Ajaccio par les deux conseils généraux. Ce n’est pas la première foire agricole, industrielle et artisanale ; celle-ci ratisse très largement. Anton Giacomo maître du chantier est invité. Il est suffisamment connu, apprécié, introduit pour être invité à l’exposition ou bien encore les exposants servent de faire valoir aux politiques. Il emprunte la voie maritime. La ligne ferroviaire Bastia-Ajaccio ne sera mis en service qu’en 1888.Il emporte sous le bras la maquette de coque du « Félix François ». Le journal d’histoire A Cronica a publié le compte rendu de cet évènement - juillet 1999 n° 17 Extrait de l’allocution de Mr Antoine Piccioni… »Si je devais signaler à votre bienveillante attention les ouvriers dont la profession modeste honore le canton de Luri, comment oublier M. Antoine Jacques Biaggini ? ce constructeur de navires dont les chantiers ne sont jamais vides, malgré les lenteurs de notre commerce et la rareté du numéraire dans notre pauvre pays ? Cet héritier d’un homme intelligent, autant qu’honnête, feu François Biaggini, lequel, pour créer le chantier de Porticciolo en 1801, dut tout puiser dans les seules ressources de son intelligence et de son génie naturel ?
J’ai remarqué avec plaisir, messieurs, que le fils a marché sur les traces du père, qu’il a progressé avec son temps et qu’il est en état aujourd’hui de joindre l’expérience de la pratique, à la théorie enfantée par l’observation et l’étude.
Oui ! je me plais ici à lui rendre justice : M. Biaggini a surpassé son père, et ce n’est pas sans raison que les armateurs du Cap ont recours à ses connaissances pratiques, toutes les fois qu’il s’agit de construction navale. Il présente un modèle de navire et divers échantillons de bois de construction.
Parler du hameau de Porticciolo, c’est vous entretenir de la commune de Cagnano, c’est parler de M. Antonorsi, cet agronome infatigable, cet éleveur de bétail dont le troupeau de bétail de race étrangère fut primé en 1855…c’est aussi faire mention de M. Dias, son maire…
Commentaires : Dans sa présentation, M. Antoine Piccioni, conseiller général, futur maire de Bastia, parle encore« de l’état d’abandon dans lequel se trouve le port de Macinaggio.
Photo demi bateau : maquette 2Jpg
Le chantier naval de Porticciolo.
La période est troublée, et cependant ils ouvrent ! La navigation cap corsine nait de la nécessité vitale d’une importation-exportation alimentaire. J’avance donc l’hypothèse que notre lignée de paysans menuisiers charpentiers a anciennement participé à la construction desbarques. Sans égaler les chantiers continentaux, ils sont les héritiers de leurs pères, des architectes phéniciens, grecs, romains, italiens, magrébins. Ils sont riches d’un savoir, augmenté au fil des générations. J.C Liccia écrit « L’importance du trafic maritime cap corsin justifie sans doute, la présence sur place d’un ou plusieurs artisans capables de réparer, entretenir mais aussi de construire les navires nécessaires au commerce de nos villages. Ce constat ne pourrait-il pas s’appliquer à des périodes bien plus anciennes, pour le Moyen Age par exemple … » Son raisonnement est fondé ; il ne suffit pas d’être né les pieds dans l’eau, de suivre du regard les navires ; il faut connaitre les qualités des bois ; on ne s’improvise pas charpentier de marine, encore moins entrepreneur-patron d’une industrie qui exige outre l’investissement financier, de connaitre les formes des bateaux, la construction de la coque, le gréement, la voilure, les qualités de navigation et la capacité de saisir l’alliance des circonstances pour réaliser un développement en adéquation avec les besoins du commerce cap corsin.
1778, au fil des ans, dans la modeste crique de Porticciolo, idyllique pour ses habitants, s’implante sous la direction de Joseph Marie Biaggini, un chantier de construction navale. La protection des vents du nord et de leurs tempêtes sera améliorée par la construction de la jetée dans les années 1830 et 1860. Sauf pour les barques de pêche, les chaloupes de service, les annexes, les rames… la construction des unités importantes ne s’effectue pas en hiver ; l’arrivée du printemps relance l’activité par le calfatage, la maintenance des embarcations.
1855, Porticciolo est avec ses 39 bateaux armés, le troisième port de Corse, après Bastia 132 et Ajaccio 66, mais avant Saint-Florent 35, Macinaggio 29 et Calvi 2O.
Toujours en 1855, mais en tonnage, Porticciolo se place au quatrième rang avec 135 tonneaux, après Bastia, Ajaccio, Saint-Florent et avant Macinaggio et l’Ile-Rousse. Sur un siècle, le volume total de la construction navale de Cagnano s’élève à environ 3220 tonneaux.
Nous voici gonflés de suffisance, alors atterrissons, revenons à la Rome impériale et à ses navires céréaliers de 1000 tonneaux de jauge et parfois le double. Nous comprenons que le tonnage insulaire soit adapté ses besoins.
Au 18° siècle Pascal Paoli donne une impulsion au commerce maritime, en stimulant la navigation commerciale, en créant une flotte de navires pour la course de guerre. Les maigres éléments de cette flotte de guerre créée par le père de la nation, bloquent le port de St Florent, ils se mesurent à une escadre génoise dans ce golfe. Plus tard, en 1767, six de ces bâtiments participent à la prise de l’île de Capraia. Le corsaire Giovan Simonpietri de Cagnano, accrédité par le conseil d’état du règne de la Corse, arme en course.
Le 11 mars 1778, Porticciolo, paesulu de Porticciolo, tard dans la soirée, le capitaine-patron Giovan Simonpietri cogne à la porte… _C’est moi !… _Entre ! « Un courant d’air froid, une odeur de marée et de brai envahit la pièce ; la lumière de la cheminée éclaire le visage de l’ami. « Maestru Biaggini ! j’ai besoin de tes services…Le vent de gregale a levante,… la tempête,… la felouque drossée sur la plage de Misincu,….la coque et le gouvernail ont souffert, j’ai besoin de toi….une fois de plus ! _O! Giuva, posa, mais dis-moi ! qu’est-ce que tu fais en mer à cette époque ? Raconte !
_Giuseppe, je t’explique la situation : habituellement à cette époque je ne navigue pas… c’est la guerre, les anglais ne plaisantent pas ; ordre du vice-roi anglais, notre bâtiment est incorporé à la flotte britannique ! Hier, j’ai reçu l’ordre de me présenter sur le navire amiral de l’escadre au large de St Florent. Le commodore Nelson m’a gardé jusqu’à la nuit, il me charge d’une mission. _Partage notre soupe ! _Volontiers ! prenez mon biscuit de mer… les anglais nous fournissent les biscuits, du lard, des fusils, de la poudre…mais l’entretien du bateau et la solde des mari