Le crayon, suite inattendue

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Le crayon, suite inattendue (8/30)

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Au début, les enfants avaient été surpris, Olivier avait treize ans à cette époque et Oriane quinze, mais comme cela avait débuté peu avant de fêter Noël, ils avaient pris cette nouveauté pour une passade liée à l’approche de la fête de la naissance du Christ. Quand février de l’année suivante arriva et qu’ils constatèrent que vraisemblablement leur mère ne paraissait pas déterminée à baisser les bras, ils commencèrent à s’interroger, surtout Oriane. De son côté, le père, si lui aussi avait accueilli la démarche avec bienveillance trouvant l’initiative de sa femme opportune et enrichissante, il s’était rapidement lassé de son interminable durée. Petit à petit, l’ambiance entre les parents en fut affectée et pour la première fois depuis sa naissance, quelques jours après le début de janvier, un soir, de son lit, Oriane entendit les éclats d’une dispute. Elle fut brève et se révéla n’être qu’un simple échange de mots de reproches lancés à vive voix, mais Oriane réalisa pourtant qu’entre ses parents quelque chose dont elle ignorait la substance venait d’être brisée.

D’autres disputes suivirent, avec une fréquence grandissante. Il ne se passa bientôt plus une semaine sans que des discussions ne virent à l’affrontement et au déploiement de violences verbales que les enfants n’auraient jamais imaginé entendre dans leur maison. Eux ne prenaient pas parti et ni leur mère ni leur père ne voulaient visiblement les mêler aux problèmes qui les opposaient. Généralement, les querelles avaient lieu dans la chambre des parents, le soir après le coucher, ou dans le salon après le dîner quand Olivier et Oriane avaient regagné leur chambre pour lire ou réviser les cours de la journée. Cependant, une antinomie profonde s’était installée dans le couple ; les visages fermés et les regards fuyants souvent en témoignaient.

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Un après-midi pendant les vacances scolaires de Pâques de la même année, Jeanne quitta son magasin en en confiant la garde à son employée et rentra à la maison à l’improviste. Il devait être aux alentours de quatorze heures. Olivier et Oriane regardaient à la télévision en compagnie de la baby-sitter un téléfilm saupoudré à l’eau de rose. La mère surgit alors que personne ne l’avait entendu entrer, sans un mot, elle traversa la pièce et arracha sèchement la prise électrique du téléviseur puis, s’étant retourné vers la baby-sitter, une jeune étudiante en art qui trouvait là un moyen de gagner un peu d’argent facile, le visage empourpré de colère, elle l’assaillit de reproches avec une agressivité extrême et en tenant des propos à la limite de l’injure. Jamais ses enfants ne l’avaient entendu éructer ainsi. Cependant comme la fille n’était pas du genre à se laisser dominer sans réagir, elle répondit avec une virulence équivalente démontrant ainsi qu’en matière de grossièreté, elle était beaucoup plus douée que Jeanne. Elle mit d’ailleurs un terme à la dispute avec un tonitruant : « - connasse ! » juste avant de quitter la pièce et de claquer la porte de l’appartement derrière elle. La mère retourna alors sa colère. « - Ne vous avais-je pas interdit de regarder la télévision en mon absence ? » vociféra-t-elle peut-être en ayant en elle le souvenir de la journée fatidique où elle avait découvert sa fille seule devant des images de mort. Olivier baissa la tête et Oriane préféra ne pas répondre préférant ne pas prendre le risque d’amplifier une crise à ses yeux plus ridicule que très sérieuse.

- Et vous êtes encore en robe de chambre ! Bon ! Allez vous préparer ! Je vous emmène !

- Où ça ? Se risqua à demander Oriane.

Le regard noir de sa mère la convainquit de renoncer à envisager une réponse. Elle fila dans la salle de bains, se doucha rapidement, se vêtit et céda la place à Olivier. En retournant dans sa chambre, elle passa devant la porte de celle de ses parents. Celle-ci était entrebâillée. Oriane jeta machinalement un coup d’œil à l’intérieur et aperçut sa mère agenouillée devant le crucifix accroché au mur, en pleine méditation, les mains jointes, la tête baissée, les lèvres bougeant en silence au rythme solennel des mots d’un Notre Père.

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