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Nouvelle maladie bovine : "La vache est décédée malheureusement", témoigne le vétérinaire intervenu à Etchebar

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Pendant deux semaines, un vétérinaire du Pays basque a fait des allers-retours à Etchebar en Soule pour soigner une vache atteinte d'une maladie inconnue. Récit du premier cas en France de la maladie hémorragique épizootique (MHE) à Etchebar.

C'est une blonde d'Aquitaine qui est morte de la maladie hémorragique épizootique à Etchebar, en Soule (photo d'illustration).
C'est une blonde d'Aquitaine qui est morte de la maladie hémorragique épizootique à Etchebar, en Soule (photo d'illustration). © AFP - Pierre Vernay / Biosphoto

En une dizaine de jours, la maladie hémorragique épizootique (MHE) a fait une première victime en France, une blonde d'Aquitaine d'Etchebar en Soule. C'est mardi 19 septembre que les autorités sanitaires ont détecté cette maladie, très présente en Pays basque sud, mais qui n'avait jamais été officiellement diagnostiquée dans un élevage en Pays basque nord. Le vétérinaire, premier médecin à être intervenu sur les lieux, raconte 15 jours de recherche scientifique pour identifier la maladie.

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Mardi 5 septembre, le vétérinaire est appelé pour diagnostiquer une vache malade dans un élevage d'Etchebar. La vache vient de donner naissance à un veau, "elle est très affaiblie", constate le médecin. "L'éleveur consciencieux nous a appelés pour essayer de diagnostiquer ce qui atteignait l'animal et de la traiter le plus vite possible".

"Elle avait beaucoup maigri et de la fièvre"

Les premiers symptômes sont facilement reconnus pas le vétérinaire, "elle salivait énormément, elle avait des muqueuses très congestionnées, elle avait beaucoup maigri et de la fièvre". Le premier diagnostic mène tout droit à la fièvre catarrhale ovine (FCO), appelée maladie de la langue bleue.

Le soignant discute donc avec l'éleveur des traitements potentiels, d'autres maladies sont aussi évoquées, mais à aucun moment n'est évoquée la maladie hémorragique épizootique (MHE), qui n'a jamais été diagnostiquée sur le territoire français. Surtout que la fièvre catarrhale ovine, qui est transmise par les mêmes moucherons piqueurs du genre Culicoides, connait actuellement une recrudescence en l'Aveyron et le Cantal. "La MHE, c'est le copier-coller en tropical ou exotique de la fièvre catarrhale ovine", explique aujourd'hui le vétérinaire. Ce dernier fait donc une prise de sang et une déclaration à la Direction départementale de protection des populations (DDPP). Un insecticide a aussi été appliqué sur le dos de l'animal, pour éviter qu'elle se fasse à nouveau piquer des moucherons piqueurs.

"Ça aurait pu être n'importe quelle vache. Celle-là, elle était en pleine forme, douze ou quatorze ans. Elle était dans son petit pré contre une rivière avec des arbres, elle avait une vie royale."

Les jours s'enchainent et la vache ne va pas mieux. "Les anti-inflammatoires pour la fièvre, les corticoïdes pour la douleur, éventuellement un peu d'antibiotiques pour les surinfections", sont les seuls médicaments possibles pour aider la vache à moins souffrir et éliminer le virus. Les résultats du laboratoire reviennent au fil des jours et toutes les maladies suspectées sont négatives.

Au fil du week-end, l'état de la blonde d'Aquitaine s'aggrave. Pendant ce temps, le vétérinaire débat du cas problématique avec des collègues et cherche à trouver une réponse dans la bibliographie scientifique. "J'ai une jeune consœur qui m'avait sorti de ses livres la maladie hémorragique des cervidés (la MHE), et pour moi, c'est un truc tropical". La fièvre catarrhale ovine reste donc la première piste envisagée toute la semaine, mais les derniers résultats sanguins tombent avant le week-end. Ce n'est pas la FCO, "le dossier est en suspension. La vache est décédée malheureusement".

C'est une analyse complémentaire menée par l'Agence Nationale Sécurité Sanitaire Alimentaire Nationale (Anses), qui surveille de près la MHE, présente depuis 2022 en Sardaigne, en Sicile et en Espagne, qui alerte sur cette maladie. Mardi 19 septembre, c'est officiel, la vache est bien décédée de la maladie hémorragique épizootique, une première en France. Il faut "prévenir les confrères vétérinaires et expliquer à l'éleveur les tenants et les aboutissants de cette maladie émergente".

Un rayon de protection de 150 km

Le vétérinaire tient à le rappeler : comme cette maladie n'est transmissible que via un moucheron piqueur, les animaux ne sont pas contagieux. "L'éleveur à l'échelle de son troupeau, n'est pas plus contraint que toute la zone, le rayon de 150 kilomètres, qui se retrouve marqué comme infecté."

Surtout que d'après les études bibliographiques du médecin, le moucheron piqueur du genre Culicoides, qui a piqué la vache en Soule, peut "avec le vent, se retrouver à Dax" en une nuit. "Le paludisme est bien connu pour ça et on ne s'en affranchit pas facilement. On a le virus du Nil occidental en Charente avec les chevaux, et des cas humains à Bordeaux, c'est la même chose."

"C'est pour ça que la zone est mise à 150 kilomètres, poursuit le vétérinaire, parce qu'on sait que d'un coup de vent, les moucherons peuvent parcourir entre 70 et 100 kilomètres en une nuit. Parce qu'ils peuvent se trouver dans un flux de vent. Ces 150 kilomètres, c'est un petit coefficient de sécurité sur une distance que peut parcourir le vecteur (le moucheron piqueur) qui a potentiellement contaminé s'il a fait un repas sur un animal en une nuit."

Conséquences sanitaires et économiques

Comme aucun vaccin n'a été créé pour protéger de ce virus, l'espoir principal du vétérinaire, mais aussi de la DDPP et de la chambre d'agriculture du département, est de voir l'automne arriver, et le temps se refroidir pour tuer les moucherons. Ce n'est pas prévu par Météo France. Ce qui inquiète le vétérinaire, "parce qu'on arrive au niveau des agnelages. Les animaux redescendent de la montagne, on est en fin de transhumance. On va avoir un rapatriement sur des altitudes semi-basses ou un peu basse, où le climat peut être plus chaud et humide que lors des transhumances. On pourrait donc avoir une augmentation de la population cible et des piqûres d'insectes".

À LIRE – Le moucheron piqueur, le culicoïde, déjà présent en Martinique

Contactée, la chambre d'agriculture des Pyrénées-Atlantiques a tenu à souligner que pour cette MHE, "la mortalité sur les bovins est inférieure à 1% et que le taux de morbidité est inférieur à 7%". La chambre d'agriculture des Pyrénées-Atlantiques et le syndicat agricole ELB sont unanimes : ils s'inquiètent plus des conséquences économiques avec l'interdiction d'exporter des ruminants vivants au Pays basque jusqu'à nouvel ordre, que des conséquences sanitaires provoquées par l'arrivée de cette nouvelle maladie au Pays basque.

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