Afficher De Puerto Natales à Buenos Aires |
Puerto Natales. Après une nuit dans un hostel avec Mira et Andreas, je pars à la recherche de la maison de Gloria et Oscar. C’est Simon, un français, le seul voyageur que j’ai croisé dans ma descente de la Carretera Austral, qui m’avait recommandé l’adresse. Coïncidence, j’y retrouve Maya et Lili, les deux françaises avec qui j’avais fait du stop sur la route de sept lacs, entre San Martin de Los Andes et Villa la Angostura, plus de mille kilomètres plus au nord… Bonne ambiance familiale dans la maison. Je me prends deux jours de repos avant de partir pour Torres Del Paine. Malgré le froid et l’hiver qui arrive, je pars camper quatre jours dans le Parc, une centaine de kilomètres au nord de Puerto Natales. Torres Del Paine, peut-être le parc le plus visité de Patagonie, quasiment désert en cette saison. En quatre jours je vais croiser une dizaine de personnes sur les chemins, pas plus. Tous les refuges et campings sont fermés. Je passerai quand même la deuxième nuit au chaud. Au refuge de Las Cuernos où j’étais venu demander si je pouvais planter ma tente à côté, le gardien très sympa me proposera de dormir à l’intérieur. La dernière nuit au campement Las Torres, elle, sera glaciale. Neige et glace tapisse le sol. Il me faudra faire la dernière ascension jusqu’aux "tours" dans la neige, avec mes vieilles chaussures trouées. Je fais deux fois l’ascension. La deuxième fois sera la bonne, le matin, le brouillard de la veille s’est dissipé, je peux admirer les torres seul face à la lagune.
Retour à Puerto Natales, un peu de repos et je reprends la route pour Punta Arenas. J’attends longtemps sous la pluie, à regarder les chiliens qui partent tous pour la frontière argentine, faire leurs courses à Rio Turbio. Puis une voiture s’arrête finalement. Encore un chilote, je ne comprends rien ou pas grand-chose... Je n’ai même plus besoin de demander, aux premiers mots je sais qu’il est de Chiloée. Ils sont très nombreux les chilotes dans le sud. Il me dépose gentiment à Punta Arenas. Le bout du monde côté chilien c’est ici, et accessoirement la ville la plus au sud du continent. Ushuaia est en Terre de Feu, une île. Géographiquement ce n’est déjà plus vraiment le continent. Une grande ville. Assez surprenant de trouver une si grande ville aussi isolée du reste du pays. Ville étape en ce qui me concerne, je n’ai pas prévu de m’éterniser. Je profite de la zone franche pour me racheter une paire de chaussure et je repars, destination Ushuaia. Compliqué de sortir de là, mais entre un colombiano et les pick-ups des petroleros je finis par traverser le détroit de Magellan et arriver au bout de la route pavée en Terre de Feu, à Cerro Sombrero. Petite ville de petroleros au milieu de nulle part, balayée par les vents. J’attends. Longtemps. Le soleil se couche bien tôt, vers 17h. Je suis à deux doigts de renoncer, d’attraper mon sac pour aller me poser au chaud à l’intérieur de la station un peu plus loin, quand un camion s’arrête enfin. Pas sûr qu’il se soit arrêté pour moi, mais je lui demande quand même. Pas de problème, il va me faire passer la frontière et m’amener à Rio Grande. Très sympa Omar, on traverse la Terre de Feu chilienne, lentement, sur une route dégueulasse, sur des airs de cumbia. Avant qu’il ne m’avoue être inconditionnel de chanson française et n’envoie tout ce qu’il a en stock, d’Edith Piaf à Caroline Loeb… On passe la frontière sans problème, il est tard les douaniers ne font pas de zèle. Omar peut s’arrêter quelques centaine de mettre plus loin pour aller chercher ce qu’il cachait derrière sa cabine. C’est pour ça qu’il s’était arrêté à Sombrero. Pas pour moi, mais pour planquer la viande de choique qu’il avait dans son frigo. On arrive dans la nuit à Rio Grande. Je vais passer dans la nuit dans un relais routier où travaille sa fille avant de reprendre la route le lendemain. On m’emmène à Tolhuin, puis jusqu’à Ushuaia sans trop de problème.
Me voilà au bout du monde, le bout du chemin, celui que je suis depuis deux mois, depuis Santiago, au sud, toujours plus au sud. Bien plus jolie que ce que j’en attendais Ushuaia. Mis à part le casino qui gâche un peu la perspective du front de mer, plein de petites maisons adossées aux montagnes, et par beau temps la vue sur le canal de Beagle est magnifique. C’est une ville. Même sous ces latitudes, une petite ville argentine tout ce qu’il y a de plus normale, avenues, supermarchés, transports publics, habitants qui font leur jogging le matin, en t-shirt pour certains… Une petite ville de province, de l’autre côté des montagnes, au bout du monde. Je vais y rester quelques temps. Cecilia va me faire faire le tour des environs. Muy argentina elle aussi, jurant en buvant son maté. Elle est de Cordoba. La plupart des habitants du coin viennent du nord chercher du travail au sud. Et du travail il y en a. En Terre de Feu il n’y a quasiment pas d’impôts, pas de TVA, de nombreuses entreprises ont installé leur production entre Rio Grande et Ushuaia. Du travail il y en a mais… mais pas cette semaine. Cecilia est au chômage technique. Les dernières mesures protectionnistes de Kirchner restreignent les importations. Assembler des pièces importées les entreprises du coin ne font que ça. En attendant que ne soient délivrées les autorisations d’importation, la production est stoppée ou ralentie. Ce qui laisse du temps à Cecilia pour me balader. Estancia Haberton, Cabo San Pablo, Parque de la Tierra del Fuego, Tolhuin on va aller un peu partout. Elle me laisse même conduire sur les routes gelées de Terres de Feu. Avec les pneus cloutés, ce qui était très amusant sur les routes de terre qui mène au lac Yehuin l'est beaucoup moins dans les montagnes enneigées. Je pars en tête à queue dans le paso Garibaldi… Plus de peur que de mal.
Il est temps de rentrer, temps de quitter le froid, la glace, la neige, de repartir au nord. Et vite, je ne compte pas m’arrêter avant Buenos Aires. Mais avant ça il faut quitter la Terre de Feu. On m’emmène jusqu’à Rio Grande, cette fois j’entre dans la ville pour constater que le seul hostel y est fermé. Je retourne en bord de route, je marche dans la nuit, jusqu’à trouver un endroit où camper. Et le lendemain c’est John, un sud-africain en vacances qui me fait traverser la frontière chilienne et me dépose à l’embranchement de l’autre côté du détroit de Magellan. Là, sous la pluie, un couple d’argentin me prend en pitié me refait passer la frontière jusqu’à Rio Gallegos. Le lendemain j’attends presque une journée entière qu’un camion m’embarque. Sous la neige, de nuit, on arrive tant bien que mal à San Julian. Toujours hors de question de m’arrêter, je passe la nuit dans la station-service en bord de route, dormant quelques heures sur une banquette. Et tôt le matin, le premier chauffeur à qui je demande m’embarque jusqu’à Trelew, 800 kilomètres plus au nord. Après Rio Grande, Rio Gallegos, je découvre en chemin Comodoro Rivadavia, encore une ville industrielle, pétrolière. Affreuse. ¡Qué horrrible, fea! Si vous cherchez un endroit où ne pas passer vos vacances, j’ai plein de bonnes adresses sur la côte atlantique argentine… De Trelew je rejoins l’intersection qui mène à Puerto Madryn. Ultime coup de chance, à la sortie d’une station-service je tombe sur Jorge et son fils Nicola. Ils me demandent où je vais. « Al norte, mas al norte que se puede… » Eux aussi rentrent à Buenos Aires, ils m'embarquent. Dans la soirée on s’arrête à Viedma. Pas pour dormir, non. Pour trouver un bar qui passe le match de Boca… Boca battra Rosario Central aux tirs aux buts. Tout va bien, on peut repartir. Jorge va conduire toute la nuit. On arrive à Buenos Aires en fin de matinée.
Je viens de faire 1400 kilomètre d’une traite. Il m’aura fallu cinq jours pour rallier Buenos Aires depuis Ushuaia, cinq jours pour faire dans l’autre sens le trajet qui m’avait pris deux mois depuis Santiago. Buenos Aires, c’est là que je dois m’occuper de mon passeport. Mes derniers passages de frontières en Terre de Feu ne m’ont laissé qu’une demi-page de libre. Juste ce qu’il faut. A Buenos Aires j’ai passé une semaine à attendre mon rendez-vous au consulat. Et maintenant c'est mon passeport que j’attends. J’en profite pour faire un petit tour dans le nord du pays. Ce matin je suis arrivé à Cordoba.
Retour à Puerto Natales, un peu de repos et je reprends la route pour Punta Arenas. J’attends longtemps sous la pluie, à regarder les chiliens qui partent tous pour la frontière argentine, faire leurs courses à Rio Turbio. Puis une voiture s’arrête finalement. Encore un chilote, je ne comprends rien ou pas grand-chose... Je n’ai même plus besoin de demander, aux premiers mots je sais qu’il est de Chiloée. Ils sont très nombreux les chilotes dans le sud. Il me dépose gentiment à Punta Arenas. Le bout du monde côté chilien c’est ici, et accessoirement la ville la plus au sud du continent. Ushuaia est en Terre de Feu, une île. Géographiquement ce n’est déjà plus vraiment le continent. Une grande ville. Assez surprenant de trouver une si grande ville aussi isolée du reste du pays. Ville étape en ce qui me concerne, je n’ai pas prévu de m’éterniser. Je profite de la zone franche pour me racheter une paire de chaussure et je repars, destination Ushuaia. Compliqué de sortir de là, mais entre un colombiano et les pick-ups des petroleros je finis par traverser le détroit de Magellan et arriver au bout de la route pavée en Terre de Feu, à Cerro Sombrero. Petite ville de petroleros au milieu de nulle part, balayée par les vents. J’attends. Longtemps. Le soleil se couche bien tôt, vers 17h. Je suis à deux doigts de renoncer, d’attraper mon sac pour aller me poser au chaud à l’intérieur de la station un peu plus loin, quand un camion s’arrête enfin. Pas sûr qu’il se soit arrêté pour moi, mais je lui demande quand même. Pas de problème, il va me faire passer la frontière et m’amener à Rio Grande. Très sympa Omar, on traverse la Terre de Feu chilienne, lentement, sur une route dégueulasse, sur des airs de cumbia. Avant qu’il ne m’avoue être inconditionnel de chanson française et n’envoie tout ce qu’il a en stock, d’Edith Piaf à Caroline Loeb… On passe la frontière sans problème, il est tard les douaniers ne font pas de zèle. Omar peut s’arrêter quelques centaine de mettre plus loin pour aller chercher ce qu’il cachait derrière sa cabine. C’est pour ça qu’il s’était arrêté à Sombrero. Pas pour moi, mais pour planquer la viande de choique qu’il avait dans son frigo. On arrive dans la nuit à Rio Grande. Je vais passer dans la nuit dans un relais routier où travaille sa fille avant de reprendre la route le lendemain. On m’emmène à Tolhuin, puis jusqu’à Ushuaia sans trop de problème.
Me voilà au bout du monde, le bout du chemin, celui que je suis depuis deux mois, depuis Santiago, au sud, toujours plus au sud. Bien plus jolie que ce que j’en attendais Ushuaia. Mis à part le casino qui gâche un peu la perspective du front de mer, plein de petites maisons adossées aux montagnes, et par beau temps la vue sur le canal de Beagle est magnifique. C’est une ville. Même sous ces latitudes, une petite ville argentine tout ce qu’il y a de plus normale, avenues, supermarchés, transports publics, habitants qui font leur jogging le matin, en t-shirt pour certains… Une petite ville de province, de l’autre côté des montagnes, au bout du monde. Je vais y rester quelques temps. Cecilia va me faire faire le tour des environs. Muy argentina elle aussi, jurant en buvant son maté. Elle est de Cordoba. La plupart des habitants du coin viennent du nord chercher du travail au sud. Et du travail il y en a. En Terre de Feu il n’y a quasiment pas d’impôts, pas de TVA, de nombreuses entreprises ont installé leur production entre Rio Grande et Ushuaia. Du travail il y en a mais… mais pas cette semaine. Cecilia est au chômage technique. Les dernières mesures protectionnistes de Kirchner restreignent les importations. Assembler des pièces importées les entreprises du coin ne font que ça. En attendant que ne soient délivrées les autorisations d’importation, la production est stoppée ou ralentie. Ce qui laisse du temps à Cecilia pour me balader. Estancia Haberton, Cabo San Pablo, Parque de la Tierra del Fuego, Tolhuin on va aller un peu partout. Elle me laisse même conduire sur les routes gelées de Terres de Feu. Avec les pneus cloutés, ce qui était très amusant sur les routes de terre qui mène au lac Yehuin l'est beaucoup moins dans les montagnes enneigées. Je pars en tête à queue dans le paso Garibaldi… Plus de peur que de mal.
Il est temps de rentrer, temps de quitter le froid, la glace, la neige, de repartir au nord. Et vite, je ne compte pas m’arrêter avant Buenos Aires. Mais avant ça il faut quitter la Terre de Feu. On m’emmène jusqu’à Rio Grande, cette fois j’entre dans la ville pour constater que le seul hostel y est fermé. Je retourne en bord de route, je marche dans la nuit, jusqu’à trouver un endroit où camper. Et le lendemain c’est John, un sud-africain en vacances qui me fait traverser la frontière chilienne et me dépose à l’embranchement de l’autre côté du détroit de Magellan. Là, sous la pluie, un couple d’argentin me prend en pitié me refait passer la frontière jusqu’à Rio Gallegos. Le lendemain j’attends presque une journée entière qu’un camion m’embarque. Sous la neige, de nuit, on arrive tant bien que mal à San Julian. Toujours hors de question de m’arrêter, je passe la nuit dans la station-service en bord de route, dormant quelques heures sur une banquette. Et tôt le matin, le premier chauffeur à qui je demande m’embarque jusqu’à Trelew, 800 kilomètres plus au nord. Après Rio Grande, Rio Gallegos, je découvre en chemin Comodoro Rivadavia, encore une ville industrielle, pétrolière. Affreuse. ¡Qué horrrible, fea! Si vous cherchez un endroit où ne pas passer vos vacances, j’ai plein de bonnes adresses sur la côte atlantique argentine… De Trelew je rejoins l’intersection qui mène à Puerto Madryn. Ultime coup de chance, à la sortie d’une station-service je tombe sur Jorge et son fils Nicola. Ils me demandent où je vais. « Al norte, mas al norte que se puede… » Eux aussi rentrent à Buenos Aires, ils m'embarquent. Dans la soirée on s’arrête à Viedma. Pas pour dormir, non. Pour trouver un bar qui passe le match de Boca… Boca battra Rosario Central aux tirs aux buts. Tout va bien, on peut repartir. Jorge va conduire toute la nuit. On arrive à Buenos Aires en fin de matinée.
Je viens de faire 1400 kilomètre d’une traite. Il m’aura fallu cinq jours pour rallier Buenos Aires depuis Ushuaia, cinq jours pour faire dans l’autre sens le trajet qui m’avait pris deux mois depuis Santiago. Buenos Aires, c’est là que je dois m’occuper de mon passeport. Mes derniers passages de frontières en Terre de Feu ne m’ont laissé qu’une demi-page de libre. Juste ce qu’il faut. A Buenos Aires j’ai passé une semaine à attendre mon rendez-vous au consulat. Et maintenant c'est mon passeport que j’attends. J’en profite pour faire un petit tour dans le nord du pays. Ce matin je suis arrivé à Cordoba.
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