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Le mien!
Nous sommes en 1980, premier poste en CMP; un quartier chaud de la capitale...lumpenprolétariat , analphabétisme, alcoolisme; quartier de Zola!

Premier jour, première intervention; les anciens me préparent mon bizutage: je ne vois rien venir;

Nous sommes à une époque où la psychiatrie de secteurs est en plein essor, avec ses bons côtés et aussi ses dégâts co-latéraux qui nous obligèrent à réviser nos positions et nos modes d'intervention...
En attendant, appel de la concierge d'un vieil immeuble d'une petite rue du côté de Rambuteau; l'interne de garde me colle la trousse d'urgence dans les mains et m'entraîne avec lui sans rien me dire; je me garde bien de poser la moindre question: faudrait tout de même pas me prendre pour un bleu!

"3e gauche, nous postillonne la bignole...ça fait plusieurs jours que je l'ai pas vu; j'ai l' habitude, il cuve souvent, je m'inquiète pas mais là, ça commence à sentir mauvais; je monte avec vous, j'ai le double des clés( à l'époque on entrait au domicile des particuliers sans la police, chose impensable de nos jours).

Toc toc plusieurs minutes pas de réponse; la dame ouvre et on découvre, dans un décor apocapytique... un pendu au lustre, la mort remonte sans doute à deux ou trois jours; les pompiers arrivés sur place nous le confirment; la concierge a poussé de tels cris que les voisins sont sortis croyant que je l'agressais; sans l'intervention de l'interne, je me faisais lyncher...

A la sortie, l' interne se marrait devant ma blancheur extrème...alors, toujours prêt pour ce beau métier?!

Bof, ne faut pas parler de corde dans la maison d'un pendu!

De Philippe Brenot, psychiatre et écrivain (le sexe et l'amour; inventer le couple, l'éloge de la masturbation) indispensable à partir de douze ans...(NDRL, la mienne!) ah la culpabilité liée à la morale; en plus personne est devenu sourd, c'est un odieux mensonge véhiculé par les soutanes de la religion catholique qui cachent bien des secrets...

Le génie et la folie: ; sorti en 97 et réédité récemment chez Odile Jacob:
Voilà un psychiatre limpide et généreux, pour une fois! un bouquin passionnant et très documenté , truffé de principales références littéraires liées à la création;
" le créateur est , de par ses dispositions psychiques très particulières, un être qui produit des valeurs plus élevées que d'autres et porte le sceau d une personnalité rare et originale" (Kretschner)
la liste des génies est impressionnante et non exhaustive; un inventaire à la Prévert: Platon, Diogène en passant par Napoléon et Jean Cocteau...musiciens et peintres, sculpteurs et poêtes;
Tous, sans exception, vivaient dans la souffrance psychique liée à leur personnalité; tendances suicidaires, paranoïa, délire, et surtout, en majorité des troubles bi-polaires.
,C'est que la création appartient à un "autre moi";
Et la consommation de drogues diverses ( Cocteau et son opium, Byron buvait de l'éther) etc
les longues nuits d insomnies où le création est à son zénith dans tous les domaines;
et la chute vertigineuse et souvent interminable dans la dépression quand l'inspiration se tarit...

Celui qui a du génie, c'est l'autre, moi je ne suis rien... la schizophrénie de l'artiste est un air connu; tous les comédiens le savent; interpréter un autre n'est pas sans danger; sortir d'un rôle n'est pas chose facile; certains acteurs shakespeariens l'ont payé très cher; j'ai vu le grand Robert Hirsch à la fin de Richard III, ne pas pouvoir venir saluer avant cinq minutes...
Daniel Day-Lewis a pété les plombs dans Hamlet à Londres; en plein mileiu d une tirade, il est descendu dans la salle, a giflé une spectatrice du premier rang avant de sortir dans la rue en costume de scène!! (il venait d'être le père du second enfant d'Isabelle Adjani; ceci pourrait expliquer cela...!)

Ce bouquin pose une vraie question: vaut-il mieux être un quidam anonyme, qui ne produit rien (même pas une bonne impression, comme disait Henri Jeanson!) et être tout bêtement un père de famille qui trompe sa femme de temps en temps, en gardant relativemant les pieds sur terre, ou faut il être un génie pour donner un vrai sens à sa vie, et être fou la moitié du temps?
On peut légitimement se poser cette question surtout quand on voit les génies de notre planète art; le body-art, déféquer dans des bocaux, présenter des vrais morceaux de corps humains, ou essayer de faire rire branché, moindre mal...ces artistes souffrent sans doute de troubles simplement polaires, et ça fait froid dans le dos...

De toutes façons, depuis la mort de Pierre Desproges et celle de Raymond Devos, je ne ris plus; disparaissent les deux derniers génies de l'humour; avec Stéphane Guillon, je pouffe à peine, avec Bigard, je mords carrément! ce n'est pas Steevy Boulay qui me contradira...
Mais je m'égare et pas seulement de Montparnasse (Pierre Desproges)... je disais donc , à lire, l'excellent bouquin de Philippe Brunot, qui ne se prend pas pour un génie mais qui est tout de même psychiatre...!