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Le président de l'université de Caen "extrêmement vigilant" concernant la politique du nouveau gouvernement

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Lamri Adoui, président de l'université de Caen, rappelle les bons chiffres de son établissement en cette rentrée mais reste préoccupé par les risques de coupes budgétaires ou de durcissement de l'accueil d'étudiants étrangers, par le nouveau gouvernement.

Lamri Adoui, le président de l'université de Caen Normandie
Lamri Adoui, le président de l'université de Caen Normandie © Radio France - Jean-Baptiste Marie

Les étudiants ont fait leur rentrée à l'université de Caen avec une journée d'accueil organisée mardi 17 septembre : des activités, des concerts, des stands d'associations pour les étudiants. L'occasion aussi pour l'université de faire le point. Le nombre d'étudiants est en hausse avec 27.125 étudiants, près de 1.000 de plus que l'année 2023, et les inscriptions vont se poursuivre encore pendant quelques semaines. Un nombre d'étudiants en hausse, de nombreux projets, mais aussi plusieurs incertitudes : Lamri Adoui était l'invité de la rédaction de France Bleu Normandie.

France Bleu Normandie : Avec un nombre d'étudiants en hausse, il y a de quoi s'enthousiasmer, quel est votre état d'esprit en cette rentrée ?

Lamri Adoui : C'est une rentrée qui se fait sous de bons auspices, effectivement, sous le signe de l'attractivité, avec d'abord de nouvelles formations et puis des services pour les étudiants que nous continuons à développer de façon très importante. Par exemple, nous avons la deuxième année d'un bureau de la vie étudiante avec des étudiants relais qui permettent à nos étudiants d'avoir vraiment connaissance de leurs droits, ce qui leur manque parfois. Ensuite, la création d'une commission d'action sociale qui est capable de réagir vite en cas de difficultés ou d'étudiants se trouvant en situation de précarité. Et puis, la semaine prochaine, l'inauguration d'un grand service de santé étudiante qui va permettre non seulement de faire de la prévention et de la promotion de la santé comme nous le faisions déjà, mais également du curatif et avec des médecins généralistes et spécialistes qui pourront prescrire à des étudiants qui sont parfois en manque de médecin traitant.

Des nouveautés aussi du côté des formations, ce qui permet d'attirer des nouveaux étudiants ?

Oui nous avons des formations attractives à Caen. Autour, par exemple, de l'intelligence artificielle, de la cybersécurité, mais aussi des diplômes pluridisciplinaires associant par exemple les sciences et le droit. Par ailleurs, sur des sites plus distants de Caen, comme Cherbourg, nous proposons de nouvelles formations d'ingénierie en génie nucléaire, en génie énergétique, des Masters en management de la qualité, sécurité et environnement ou à Vire, par exemple, avec la création d'une Licence professionnelle sur les métiers de la mode.

C'est parfois difficile de garder des Masters à Caen alors qu'il y a beaucoup de gens en premier cycle, en Licence. Quelle est la situation en cette rentrée ?

Nous avons un nombre un peu en hausse. La particularité de l'université de Caen est d'avoir un premier cycle très dense et très pluridisciplinaire, au service de tout le territoire, puisque nous sommes la seule université présente sur les trois départements du Calvados, de la Manche et de l'Orne. Pour autant, nous sommes aujourd'hui extrêmement attractifs sur le doctorat, avec un nombre de doctorants en hausse, contrairement à la moyenne nationale qui est plutôt en baisse. On focalise aujourd'hui notre attention sur le deuxième cycle, sur le cycle Master, qui doit aussi trouver toute son attractivité.

Vous continuez de vouloir vous tourner vers l'international. Combien avez-vous d'étudiants internationaux cette année et qu'est ce que vous avez mis en place pour les attirer ?

Nous avons 3.500 étudiants internationaux, ça veut dire environ 11 à 12 % de la population étudiante. Les services à l'étudiant et également aux chercheurs étrangers continuent de se développer avec des guichets d'accueil, un renforcement des mobilités, des programmes avec de nombreuses universités étrangères, et puis le développement aussi de Master internationaux de manière à pouvoir être et être attractif. Nous avons aussi notre carré international et notre Maison des langues et de l'international qui permet de les accueillir dans de bonnes conditions.

Sur ce sujet, il y a de l'incertitude. L'année dernière, vous avez signé une tribune avec tous les autres présidents et présidentes d'universités pour dire votre inquiétude à propos du projet de loi immigration de Gérald Darmanin, ministre de l'Interieur, justement parce qu'il risquait de restreindre l'accueil d'étudiants internationaux. Là, il y a un nouveau Premier ministre de droite, Michel Barnier, il avait pris position pour durcir l'accueil, notamment des étudiants étrangers. Ça ravive votre inquiétude ?

On ne fera pas de procès d'intention, nous n'avons pas encore de gouvernement, mais évidemment, nous restons extrêmement vigilants parce que les universités sont soumises à des injonctions paradoxales et même parfois contradictoires. Il faut être capable d'aller chercher des talents, être capable d'accueillir les meilleurs étudiants étrangers, de participer au soft power du pays. De l'autre côté, certains veulent durcir les conditions d'accès pour nos étudiants, alors même que, par exemple, 40 % de nos doctorants viennent de l'étranger. Donc oui, bien sûr, nous sommes extrêmement vigilants, d'autant que nous sommes aussi très fidèles aux valeurs de l'université.

Vigilance aussi concernant le budget. La politique économique du nouveau gouvernement pourrait aller vers des coupes budgétaires, déjà été entamées par le gouvernement précédent. Ce matin vous dites "pas touche au budget de l'université" ?

Oui, ce serait évidemment un mauvais signal. L'année dernière et les années précédentes on a dû supporter des charges supplémentaires. Les universités sont aujourd'hui dans une excellente dynamique et revenir en arrière, diminuer les financements de l'enseignement supérieur et de la recherche serait probablement mettre un coup d'arrêt à la dynamique des universités françaises, y compris à l'international. Pour l'instant, nous n'avons aucune garantie. Nous entendons comme tout le monde que l'Etat va faire un certain nombre d'économies. C'était déjà le cas l'année dernière, mais les universités ont eu à supporter, comme tout le monde bien sûr, le coût de l'inflation, la hausse de l'énergie, mais aussi la hausse du point d'indice des fonctionnaires qui n'a pas été compensé ou que très partiellement par l'État. Tout cela a lourdement pesé sur le budget des universités. Nous avons la chance à Caen d'être l'une des seules universités françaises à ne pas avoir un déficit depuis ces trois dernières années, parce que nous sommes dans une très bonne dynamique de ressources au niveau de l'établissement. Mais nos réserves sont aujourd'hui épuisées. Les fonds de roulement sont très maigres et évidemment, comme toutes les autres universités françaises, le cap serait difficile à franchir si de nouvelles économies devaient nous être demandées.

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