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Date de création : 13.03.2011
Dernière mise à jour :
01.05.2025
611 articles
Samedi 13 janvier 2024
Je voudrais dans cet essai parler du jazz français, et notamment de Django Reinhardt, grand artiste français et gaulois, parti de rien, vraiment de rien, et arrivé pratiquement au Carnegie Hall.
Django Reinhardt a été un pilier du jazz français, plus précisément du jazz manouche, durant 3 ou 4 décennies. Il avait 30 ou 40 ans d'avance sur son temps. Il a inventé tout un univers musical, une symbolique musicale, le swing.
Les américains le méprisaient et l'enviaient tout à la fois. Ils ont même cherché à nous le souffler.
Les triples croches, les cercles de quintes. Django, qui a beaucoup souffert de la guerre, a su créer de toutes pièces une musique codifiée, moderne, tournée vers l'avenir et le futur. Il avait comme Sabicas, qui a modernisé le flamenco, les clefs d'une musique hétéroclite. Il a su porter le swing au sommet et en faire un pilier de cette musique.
Au début des années 80 un autre guitariste français révolutionnera à nouveau le jazz avec une organiste. Mais son destin est moins connu. Il se prénommait Jacques.
Django Reinhardt était très proche de Stéphane Grapelli, il précède d'autres artistes français, comme Marcel Dadi, mort dans un crash aérien au dessus de l'Irak, ou Bill Deraime, plus rock.
Pour se faire un ordre de comparaison, vers le début des années 80, pour 400 à 800 brevets dans le jazz, il en restait une quinzaine pour le rythm'n blues, qui a eu aussi de très grands professionnels français. Et ils ont réussi à percer en Amérique aussi. A un moment donné, si les anglo-saxons n'avaient pas Clapton, J.J. Cale et quelques autres, certains de nos professionnels leur étaient pratiquement supérieurs. Surtout certains solistes de rock. Mais même sur le plan instrumental et artistique, avec les saxos, les orgues, les chanteurs.
Une des plus grandes singularités de Django Reinhardt, c'est qu'il était avant tout un immense musicien, et pas un professionnel pur et dur, mais un jazzman éclairé et amateur, ouvert sur les perspectives. Ce qui transparaît le plus chez lui, c'est le rythme, la rythmique, le phrasé, le débit et le tempo. On le joue depuis 50 ans place du Tertre, en haut de la Butte.
Le premier véritablement, dans les années 50/70, a avoir fait en sorte que le guitariste soliste soit au moins sur un pied d'égalité avec les autres vedettes de dimension internationale, c'est Sabicas.
Sabicas a révolutionné les tarantas, les bulérias, les soléares. Soit en gardant une forme conventionnelle, ouverture, exposition, ré-exposition, partie A, partie B, reprises de ces deux parties, final. Soit un ordonnancement, une cohésion des parties, soit des soléares, des solos, des falsetas et des titres plus hétéroclites. Ou encore comme dans ses duos avec Joe Beck, une musique plus tropicale, plus expressive, traditionnelle ou futuriste.
Mais les faits sont là, si on veut que le soliste soit une star mondiale, il doit en imposer.
Sabicas a été le professeur de Paco de Lucia, son élève donc. Au début des années 80, Paco de Lucia va aussi révolutionner à nouveau les tarantas et les bulérias. Mais dans une expression moins moderne et plus traditionnelle, inventive.
Avant Sabicas, Yepes, qui était un artiste classique disons-le gothique, cherchait déjà à surprendre le public et à imposer le soliste. Son répertoire immense, Bach, Weiss, les classiques espagnols et italiens, montre qu'il était alors un des tous meilleurs du monde.
A ce moment là, d'autres grands virtuoses pouvaient lui arriver à la cheville ou tout au moins se mesurer à lui, quelques centaines dans le monde. Mais Yepes avait cette conception, cette qualité algébrique et arithmétique de la musique, cette ouverture alliée à la perfection, qui faisait de lui l'homme et l'interprète du moment. Sa maison était un bunker, son répertoire l'immensité du ciel et des étoiles. C'était un homme affable, ouvert et très avenant, très chaleureux, il aimait le public et nouait une véritable relation d'amitié avec lui et notamment ses élèves ou les enfants.
Paco de Lucia accompagnera El Camaron durant les années 80. Mais en musique, il y a une différence entre anti-conventionnel et anti-conformiste. Il faut dire aussi que El Camaron avait pratiquement une petite troupe de 30 personnes avec lui. C'était un immense génie aussi.
Je dirais que les grands solistes, comme Sabicas et Django, doivent savoir se montrer hétéroclites, originaux et anti-conventionnels. Ce qu'ils ont su faire. Tout au moins à leur façon. Il y a beaucoup de choses symboliques en musique.
Par contre, après la mort du Camaron, Paco de Lucia est déjà un auteur et un interprète reconnu, il a déjà plus de la cinquantaine. Il a pris de la bouteille et il s'est fait un peu vieux. L'ouverture de « entre dos aguas » au téatro réal début des années 80 est déjà un peu loin derrière lui.
Mais il ne confirmera pas avec les autres grands du flamenco, qui ont du reste les meilleurs accompagnateurs et guitaristes du monde. Il ne sera pas davantage anti-conformiste, mais se conformera à son statut déjà difficilement acquis et largement mérité. Il a un peu levé le pied après la chute du Camaron, qui me semble t-il est mort d'un pneumothorax ou d'une sorte de pubalgie, un problème aux poumons. En vérité il avait déjà eu un peu de mal à se hisser au niveau jazz de Mac Laughlin.
Par exemple, les plus grandes stars mondiales, les plus grands ténors, je pense à Chano Lobato, à Manuel Torres, qui l'avait remplacé au pied levé en 1982 au cirque d'hiver avec des « jaléos » endiablés et un volume de voix énorme, à Enrique Morente et ses tangos fabuleux, à Manuel Agujetas et la qualité extraordinaire de ses tours de chant et de ses interprétations, à El Pele et ses « toñas », continueront leur parcours mondial et interplanétaire.
Paco de Lucia ne s'y joindra pas. Il est déjà assez âgé, et il montre alors quelques limites, étant plutôt soliste interprète de ses propres œuvres. Pépé Pinto était déjà assez vieux aussi. Il est vrai que Paco de Lucia avait fait plutôt le choix depuis longtemps d'être soliste, exception faite du son parcours et de sa collaboration avec El Camaron jusqu'à la mort de ce dernier, d'un pneumothorax il me semble. C'était en vérité son propre choix depuis le début.
Je l'ai dit, anti-conventionnel et anti-conformiste, ce n'est pas le même chose. Paco de Lucia sur le tard n'a sans doute pas été assez anti-conformiste pour confirmer son statut de star, il n'était plus à la hauteur des autres grandes stars.
Ce qui fait de Django Reinhardt et de Sabicas ce qu'ils sont, et Sabicas à un moment donné avait aussi son petit pied à terre à New-York, il enchaînait les tournées mondiales, au Japon, en Allemagne, c'est le fait de moderniser des genres et des styles, parmi des dizaines et des centaines de genres et de styles. Sabicas a même joué devant les Kennedy je crois.
L'un comme l'autre ont réussi à faire surgir un langage musical, une symbolique hétéroclite. Yepes était déjà aussi de cette mouture là aussi.
Il faut moderniser à temps, sortir des archaïsmes, et là une nouvelle brèche s'ouvre, c'est le champ du possible. Django comme beaucoup de grands virtuoses, n'a pas eu peur de son temps.
J'ai failli le voir à la fin des années 60, mais nous avons eu d'autres impératifs à l'époque avec la fourgonnette, des livraisons à faire. Avec un peu de chance j'aurais pu écouter son spectacle et le voir jouer.
Moderniser, éviter les archaïsmes lourds et pesant, c'est ce que sait et doit faire un grand soliste, un virtuose de la guitare, s'il veut rester au moins sur un pied d'égalité avec les autres grandes stars internationales et mondiales.
D'autres grands interprètes, un peu plus traditionnels, comme Ramon Montoya ou Escudéro, se rapprochent aussi de Django Reinhardt. Le plus proche de lui, dans le phrasé, le débit et surtout l'intensité générale du rythme, c'est Pépé Habichuela, qui possède un jeu d'ensemble très rapide et appuyé. Chez Django aussi il y a des points culminants dans le débit et le langage musical.
Une année, j'ai failli acheter une contreras à Andrés Serrita, une magnifique pièce de lutherie. Sur cette guitare a joué Sabicas, Sabicas a donné des cours à Paco de Lucia dessus, Ramon Montoya et Escudéro ont joué dessus aussi. Paco de Lucia a joué dessus aussi. Elle avait été réparée 2 ou 3 fois, et donc avait perdu de la valeur, si ce n'est la valeur sentimentale de l'instrument. Mais à l'époque, je n'ai pas pu l'acquérir. Elle sonnait comme un canon.
Aujourd'hui, après toutes ces heures de gloire, Tomatito ressemble un peu à un vestige du passé à ciel ouvert de cette époque. Je ne sais pas exactement si lui et Pepe Pinto sont encore là. Pepe Pinto, c'est l'interprète de « La suerte y la inteligencia ». Lui aussi a vieilli encore plus vite que Paco de Lucia. Pepe Pinto a gravé beaucoup de disques aussi. Tomatito, la dernière fois que je l'ai aperçu, n'est plus du tout le même.
Un des points culminants des années 80, c'est la collaboration entre Al di Meola, John Mac Laughlin et Paco de Lucia. C'est une nouveauté, un véritable révolution de plus dans le jazz rock, ainsi que la sortie du disque « Saturday night in San Francisco », une collaboration à trois. Je suis bien allé voir deux ou trois fois Mac Loughlin et Paco de Lucia au grand Rex.
Seul les Doors ont fait aussi bien, avec un morceau de flamenco teinté de rock d'une bonne demi-heure « Spanish Caravan », morceau d'anthologie s'il en est, qui figure sur l'un de leur disque. C'est un sommet de la technique anglaise à la guitare. Et il est vrai que le flamenco n'est pas fait pour un rock trop hard, mais pour un rock léger.
Il y a beaucoup de grands aujourd'hui, beaucoup de virtuoses partout dans le monde. Mais je pense que ce qui fait la qualité du travail de Django, c'est aussi le facteur plural. Une musique populaire, facile d'accès, plébiscitée, à haute valeur symbolique, avec un débit, une émotion très étroite avec le peuple et les couches les plus basses de la société.
Peu de vrais musiciens ont fait autant que lui pour la mémoire des romanis et des sintis, pour le peuple rom, les manouches. Reinhardt était avant tout un musicien intelligent, qui fréquentait beaucoup les petits clubs de jazz, et qui a été le contemporain de beaucoup de grands noms. Il a démocratisé, modernisé, trouvé la brèche, ouvert le domaine du possible.
Django Reinhardt a su durer, et faire évoluer son jeu, le parfaire au fil des ans. Cette facilité d'accès, cette étonnante proximité avec le peuple et le public, elle était une évidence chez un artiste parti de rien. D'autres ont suivi un parcours un peu semblable, je pense à Manitas de Plata, qui a beaucoup fait pour le flamenco aussi.
Il existait une petite rivalité de fait entre Sabicas et Carlos Montoya. Sabicas, c'était la modernité, l'ésotérisme parfois, des pièces un peu hétéroclites de temps en temps. Calos Montoya, c'était de fabuleuses saetas, vues sous tous les angles techniques. L'un avait peur de l'autre, et vice et versa.
Carlos Montoya était un génie des farrucas, des saetas qu'il a porté à un niveau jamais égalé depuis, mais il était plus traditionnel, là ou Sabicas a toujours cherché à dépoussiérer le flamenco.
Le pari de Sabicas, c'était un pari soliste, le même que celui de Django. Encore que Django avait des vues instrumentales et de groupes aussi.
C'est toute la différence entre la conception des professionnels, et celle des musiciens nés.
Un professionnel s'adapte, un musicien comme Django adapte.
Reinhardt s'est aussi tourné vers d'autres instruments, car le jazz manouche se joue avec des guitares un peu folk et des cordes en acier. Le classique et le flamenco, c'est des cordes en nylon, ou à boyaux lors des concerts.
Il faut bien le dire, il est rare qu'un musicien issu du peuple puisse avoir comme lui une quarantaine d'années sur son temps. Il a du travailler dur, bosser, répéter, faire pas mal de tournées pour en arriver là.
Aujourd'hui, ces choses là sont terminées, ce sont les professionnels qui tiennent les rênes, plus vraiment des musiciens de cette pureté qui lui était propre. Les seuls, les rares que je recommande quand même de voir, ce sont Manuel Torres, Manuel Agujetas, el Pele. Surtout Agujetas, il est encore là je crois.
Il me semble qu'Enrique Morente est mort, après avoir consacré sa vie au tango flamenco, genre qu'il a véritablement bousculé et révolutionné.
Adieu Django. Heureusement que tu es passé par là. Il fallait que quelqu'un le fasse. Le besoin comme l'émanation existait tout en profondeur.
Django Reinhardt n'a sorti de quelques disques, il n'a pas produit beaucoup, 3 ou 4 peut-être. Mais il a innové, révolutionné, il est sorti des sentiers battus, il a su faire les choses, les reprendre à la racine, et les emmener très loin. Il a su sortir cette musique de sa torpeur et atteindre les sommets, jeter les bases de l'improvisation orchestrale. Django a su apporter ce nouveau souffle avec le swing, et dériver de l'académisme.
Son requiem « pour nos frères gitans »a été malheureusement perdu.
Aujourd'hui, quelques années après la mort du taulier, on s'aperçoit que beaucoup de très grands artistes ne sont plus là, et que d'autres encore risquent de rallonger cette liste dans les années à venir. On le sent car les variétés ne sont plus tout à fait ce qu'elles étaient dans les années 70. Les producteurs ont encore attrapé froid.
Christian Diez Axnick.