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Qualité de l'eau du robinet : neuf polluants éternels détectés à Auxerre, dont deux cancérogènes

Neuf polluants éternels, dont deux cancérogènes, ont été détectés dans le prélèvement d'eau du robinet réalisé à Auxerre (Yonne). C'est le résultat de l'enquête réalisée par France Bleu et la Cellule investigation de Radio France, révélée ce jeudi.

France Bleu a réalisé 89 prélèvements dans toute la France
France Bleu a réalisé 89 prélèvements dans toute la France © Maxppp - Mathieu Herduin

Le prélèvement d'eau du robinet réalisé à Auxerre (Yonne) le 7 mai 2024 a mis en évidence la présence de neuf polluants éternels (PFAS), dont deux particulièrement cancérogènes et un interdit en France. C'est ce qui ressort d'une grande enquête menée par France Bleu et la Cellule investigation de Radio France, révélée ce jeudi.

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Au cours de cette enquête, France Bleu a procédé à 89 prélèvements dans toute la France. Sur ces 89 échantillons testés, 43 % contenaient des PFAS.

L’échantillon prélevé à Auxerre contient neuf PFAS sur les 25 recherchés : c'est l'un des prélèvements les plus mauvais de ceux effectués dans notre enquête. Un des PFAS détectés (PFOA), à 1,6 ng/litre, est considéré comme cancérogène par le Centre international de recherche sur le cancer (Circ), ce qui signifie qu'il existe des indications convaincantes que l’agent provoque le cancer chez l’homme. Un autre (PFOS), avec 5,9 ng/litre, est considéré comme potentiel cancérogène par le Circ, sachant qu'aux États-Unis, au-delà de 4 ng/litre pour les PFOA et PFOS, l'eau peut être considérée impropre à la consommation.

L'échantillon prélevé à Auxerre a également permis de mettre en évidence la présence de PFHxS (7,9 ng/litre), un autre PFAS par ailleurs interdit en France aujourd’hui en raison de sa toxicité sur la thyroïde et la fertilité. D'autres PFAS détectés ne sont actuellement pas considérés comme cancérogènes : le PFBA (4 ng/litre), le PFBs (2,1 ng/litre), le PFHpA (2,4 ng/litre), le PFHxA (5,2 ng/litre), PFPeA (7,3 ng/litre) et le PFPeS (1,2 ng/litre).

L'origine de cette pollution est difficile à identifier. Dans son rapport publié en décembre 2023, le Circ estime que "ces polluants sont omniprésents dans l’environnement, même dans les zones les plus reculées". "Les PFOA et les PFOS ont été trouvés dans les emballages alimentaires, les tapis, les matériaux de construction, les produits cosmétiques, les ustensiles de cuisine, les vêtements imperméables et les mousses anti-incendie", précise le document. Les experts évoquent également l'utilisation de ces substances dans l’industrie, "pour leurs propriétés anti-taches et d’abaissement de la tension superficielle, par exemple dans la fabrication de plastique ou de plaquage métallique".  À la clé, une potentielle "contamination de l’environnement par les émissions industrielles et le ruissellement provenant des activités de formation des pompiers". En outre, les PFOA et les PFOS "peuvent pénétrer dans l’environnement par le biais des déchetteries municipales ou industrielles".

Des prélèvements dans toute la France

Chacune des 44 radios locales de France Bleu a réalisé deux prélèvements entre la mi-avril et début juin sur son territoire, en fonction de son bassin de population mais aussi de lieux où la présence de PFAS dans l’environnement était déjà connue grâce à des travaux de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) publiés en 2011. Les prélèvements ont ensuite été soumis au laboratoire agréé Ianesco. L'objectif était de déceler la présence éventuelle des vingt PFAS de la future règlementation française, applicable en 2026, et de cinq autres molécules déjà dans le collimateur des régulateurs d’autres pays en raison de leur toxicité : GenX, le H4PFOS ou 6:2FTS rejeté par Arkema (jusqu’à fin 2024), PFTeDA, PFODA, PFHxDA.

Les PFAS, des polluants quasiment indestructibles

Les PFAS rassemblent les substances per- et polyfluoroalkylées. Derrière ce mot barbare se cachent des molécules de synthèse, dérivées du plastique, apparues dans les années 1950 aux États-Unis. Depuis, ces molécules, près de 10.000 différentes, ont colonisé notre quotidien. On les retrouve dans les emballages, les poêles antiadhésives en Téflon, les produits d'entretien, les peintures, les pesticides, le shampoing, dans certains cosmétiques comme le mascara, dans les mousses anti-incendie ou encore dans les médicaments (selon le CNRS, 20% contiennent des PFAS).

Ces molécules, un alliage de carbone et de fluor, ont une résistance exceptionnelle à la chaleur, à la lumière ou à l'eau et protègent donc le produit. Elles sont aussi utilisées pour leur imperméabilité, leurs propriétés antiadhésives ou anti‑tâches. Des qualités devenues une menace : les PFAS sont quasiment indestructibles. Ils mettent des dizaines d'années à se dégrader, d'où leur surnom de "polluants éternels", et s'accumulent donc dans l'environnement, contaminent les sols, les rivières, l'air et la nourriture. Les PFAS s'accumulent également dans les organismes vivants.

Selon l'agence européenne pour l'environnement, ces perturbateurs endocriniens peuvent provoquer des cancers - des reins et des testicules notamment - des lésions du foie, des maladies de la thyroïde, favoriser l'obésité, le cholestérol ou encore l'infertilité, augmenter le risque d'hypertension artérielle, provoquer une réponse réduite aux vaccins ou encore de faibles poids à la naissance.

VIDÉO - Comment a-t-on mené notre enquête ?

Polluants éternels : comment on a analysé l'eau de votre robinet

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