JO 2024 (basket): de l’ombre à la lumière en 48h, tout savoir sur Isaïa Cordinier, le héros inattendu des Bleus

Six petits jours. C’est ce qui sépare la gifle reçue par l’équipe de France de basket lors du dernier match de poule contre les Allemands et la victoire en demi-finale du tournoi olympique face à cette même Mannschaft, ce jeudi. Un déclic d’une soudaineté inouïe. Mais une éternité si l’on compare ce laps de temps à celui qu’il a fallu à Isaïa Cordinier pour devenir le chouchou de tout un pays.

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Très peu connu du grand public il y a encore 48h, l’arrière de l’équipe de France de basket (27 ans) est passé de l’ombre à la lumière en l'espace de deux rencontres. Incandescent dans la victoire des Bleus face au Canada mardi (20 points, 3 rebonds, 3 interceptions), il a remis ça ce jeudi en demi-finale contre l’Allemagne (16 points, 7 rebonds, 2 passes). "C’est la force d’une équipe", a insisté Vincent Collet ce jeudi soir après la qualification en finale du tournoi olympique. "Depuis deux matchs, c’est le 'nous' qui a pris le dessus sur le "je'. Ça permet souvent d’avoir un ou deux invités surprises. On a fait en sorte d’observer, de voir quelles ressources dont l’équipe disposait pour exploiter au maximum ces ressources."

Fils d'un ancien international français de handball

Dans le sillage d'Isaïa Cordinier, c’est toute l’équipe de France qui a su se métamorphoser pour prendre son destin en main. "Il est en confiance et il nous en donne. Il est dans ce registre et il nous fait beaucoup de bien", a de son côté loué Matthew Strazel. "Il parle de plus en plus, il est de plus en plus vocal. Et ça se voit sur le terrain. C’est un joueur de caractère et quand il ressent des choses, il n’hésite pas à le montrer et ça donne de la force à l’équipe."

Ce caractère, Isaïa Cordinier, fils de Stéphane Cordinier, ancien international français de handball, se l’est forgé au gré d’un parcours parfois chaotique. Rapidement identifié comme un joueur à fort potentiel, le natif de Créteil (Val-de-Marne), formé à Antibes, fait ses grands débuts professionnels à Évreux, lors de la saison 2014-2015. Après avoir découvert le basket de haut niveau en Normandie, il explose véritablement à Denain au cours de l'exercice 2015-2016. Alors âgé de 19 ans, il est sacré meilleur progression de Pro B à l’issue d’une saison plus qu’aboutie dans l’antichambre de l’élite française (10,6 points de moyenne).

La draft NBA... puis la saison blanche

C’est à ce moment-là qu’il tente l’aventure NBA. Sélectionné en 44e position de la draft 2016 par les Atlanta Hawks, il participe à la Summer League avec la franchise américaine avant de revenir en France pour continuer à s'aguerrir. De retour à Antibes, en Pro A, il réalise une saison correcte mais timide, notamment sur le plan offensif (6,5 points, 2,8 rebonds en 23 minutes de moyenne). Avant le premier gros tournant de sa carrière.

Rongé par des problèmes de genou, Isaïa Cordinier se résout à passer sur la table d’opération et manque l’intégralité de la saison 2017-2018. "Cela n'a pas été une décision facile. Mais je n'ai jamais craint que ma carrière s'arrête. Je savais que, si je retrouvais mes capacités athlétiques et ma vitesse, je reviendrais plus fort. J'ai fait un pas en arrière pour en faire quatre ou cinq en avant", confiait-il à l’époque.

"Ça a été fait dans l’optique de me retrouver dans la situation où je suis aujourd’hui", a-t-il confirmé il y a quelques jours, avant le quart de finale contre le Canada.

Wembanyama: "Un modèle de travail"

La longue route vers un retour au sommet est passée par Antibes, où Isaïa Cordinier a remis le pied à l’étrier lors de la saison 2018-2019 (10,6 points en 25 minutes de moyenne en Jeep Elite), puis Nanterre. C’est dans les Hauts-de-Seine, où il évolue entre 2019 et 2021, qu’il a croisé un certain… Victor Wembanyama. "Quand je vois ses performances sur les deux derniers matchs, la première chose qui me vient à l’esprit est comment je le voyais bosser à Nanterre", nous a confié la star des Bleus ce jeudi soir.

"L’année avant que je commence vraiment à jouer en pro, c’était un modèle de travail. La dureté qu’il s’imposait tous les jours, c’était juste incroyable. Je suis très heureux de voir que ça paye", poursuit Wembanyama.

Sous les yeux du très jeune Victor Wembanyama, Isaïa Cordinier réalise deux saisons extrêmement solides du côté de Nanterre (13,2 points et 4,8 rebonds de moyenne entre 2019 et 2021). De quoi lui ouvrir les portes de la Virtus Bologne, une équipe prise très au sérieux sur la scène continentale.

Avec le club italien, où il a évolué ces trois dernières saisons, Isaïa Cordinier a notamment remporté l’Eurocoupe, l’équivalent de la deuxième Coupe d’Europe, en 2022. La Virtus Bologne a également permis au Français de découvrir l’Euroligue, où il tournait la saison passée à 7,8 points, 3,3 rebonds et 2,2 passes de moyenne.

Cordinier continue d'écrire l'histoire olympique de sa famille

Habitué à évoluer au meilleur niveau européen, l’ancien Antibois a toutefois mis du temps avant de s’imposer en équipe de France. "C’est mon premier vrai tournoi où je suis pris dès le début", appuie le principal intéressé. "L’année dernière, lors de la Coupe du monde, j’ai été pris pour remplacer un blessé (Frank Ntilikina, NDLR). C’est la première fois que j’ai un autre rôle de défenseur élite."

Cette éclosion, que certains pourront considérer comme tardive, arrive d’ailleurs à point nommé. Elle permet à l’arrière tricolore de renouer le fil de l’histoire olympique de sa famille. "C’est assez spécial pour moi de reprendre le flambeau de mon père qui a fait les JO à Atlanta en 1996 (l’année de sa naissance, NDLR). C’était mon objectif de toujours de faire les JO à Paris", savoure l’arrière tricolore.

Le parcours, aussi tortueux soit-il, a donc mené Isaïa Cordinier jusqu’à une finale des Jeux olympiques. "Il est à un moment de sa carrière où il contrôle un petit peu mieux ce qu’il peut faire sur le terrain", résume Nando De Colo, ravi de voir son successeur sur la ligne arrière éclore de la sorte. "Ces deux derniers matchs, c’est certainement ses deux meilleurs matchs en carrière", appuie Victor Wembanyama. Avant de se reprendre, le regard déjà tourné vers la finale olympique: "Pour l’instant!"