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Date de création : 30.11.2013
Dernière mise à jour :
21.03.2025
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« C’est vous ? », lance Pierre Michon à l’autre bout de la maison dont je viens de franchir le seuil. Michon c’est d’abord ça : une voix goguenarde. Son statut de grand écrivain, la rareté de ses livres, son existence au fin fond de la Creuse pourraient faire croire à un personnage distant, peu disert, jouant de son mystère. Mais l’imagination est « maîtresse d’erreur et de fausseté », comme disait Pascal. Non seulement Michon est affable et drôle, mais il est loquace. En ce jour d’hiver, aux alentours de neuf heures du matin, tout démarre par un café. La conversation s’étirera jusqu’à six heures du soir. Sans préambule, nous parlons de J’écris l’Iliade(voir ci-dessous).
C’est son livre le plus épais – peut-être le plus abouti – depuis le tout premier, Vies minuscules, paru en 1984. « Cela dit, ce que j’avais fait de mieux jusqu’ici, c’était peut-êtreLes Onze (2009) », souffle-t-il. Incarné, Michon commente l’amertume du café dont nous enchaînons les tasses, installés parmi les piles de livres qui jonchent le sol, couvrent les tables, occupent le lit et les fauteuils autour de cet homme qui n’a jamais cessé de lire et de relire…
Styliste absolu, il ne restreint pourtant pas sa fréquentation de la littérature d’aujourd’hui à Echenoz ou Modiano. À 79 ans, son appétit d’enfant continue de dévorer aussi bien des romans américains tout juste traduits que les livres d’anthropologie, de philosophie ou de biologie. Entre deux phrases il se prend à déclamer des vers d’Hugo à pleins poumons. Puis parle pêle-mêle de Rabelais, Proust, Bougainville, de la Bible et, bien sûr, d’Homère. C’est alors qu’il se lance sur le langage et le désir : c’est dans le lien entre les deux qu’est tout son nouveau livre.
Le langage et le désir« Avec J’écris l’Iliade, j’ai fait l’inverse desVies minuscules. Mon récit est tout sauf doloriste. C’est un grand “oui” nietzschéen. C’est le livre d’un écrivain qui se prend pour un écrivain, mais avec un sourire, une distance. Et il n’y a dans mon texte aucun discours moral. » Mais où le feu du désir le conduira-t-il ? Jusque dans quel brasier ? Dans l’un des passages les plus ahurissants et sublimes de J’écris l’Iliade, Michon brûle toute sa bibliothèque, tous ces grands morts qui l’écrasent tout en constituant sa seule richesse. Car il s’agit d’être pauvre, de se dépouiller.
« Tout acte littéraire nécessite un sacrifice, affirme-t-il, mais surtout, le sacrifice rend de nouveau libre. » Et le personnage Pierre Michon, qu’on dirait tout droit sorti d’une nouvelle de Borges, entreprend de réécrire de mémoire toute la littérature mondiale en commençant par Homère : « J’écris l’Iliade. »
Après le déjeuner, il évoque aussi bien ses souvenirs d’enfance que son rude désir d’homme. Ses amis paysans de Creuse voudraient bien lire les livres de l’ami Pierrot, mais ne parviennent jamais à dépasser la page 3.
Avec ce nouveau livre, qui est avant tout une éblouissante méditation sur le langage et le désir, il a également voulu rendre hommage aux bêtes. Il parle des oiseaux, merles, fauvettes ou bergeronnettes, pour lesquels il confesse une fascination : « Étant physiquement amoindri, les souvenirs refluent de façon merveilleuse. J’ai de ma vie aux Cards, qui est en pleine forêt, mille souvenirs de mes contacts avec les animaux. Je parle dans mon livre d’une salamandre. Elle ressemblait à un dieu. Évaporée en une seconde. Les dieux surgissent et disparaissent. C’est le langage qui les fait surgir. Qui donc est ce néandertalien qui le premier a prononcé le nom d’un dieu ? »
Il parle aussi des loirs – avec lesquels il converse volontiers –, puis des bêtes en tout genre qu’il aime et contemple comme un ami, presque comme l’un d’eux, et encore des arbres, ou des pierres. « Je suis un peu animiste,dit-il. J’ai conscience de n’être différent d’une pomme de terre que par d’infimes variations chromosomiques. » Pierre Michon médite son affirmation sans trop se prendre au sérieux, éclate de rire avant de conclure, le visage grave : « Parmi toutes les espèces animales, la nôtre est faite pour porter la vie terrestre à son plus haut point, mais aussi pour y mettre fin. »
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Érudition malicieuseTraversée hallucinée – mais extraordinairement précise et convaincante – du désir sexuel et de la violence libératrice qui anime l’auteur lui-même – lequel se peint tantôt en semi-clochard plein de rêves littéraires immatures, tantôt en monstre sacré des lettres françaises bien conscient de la grandeur et de la misère de l’homme comme des livres –, J’écris l’Iliade est aussi une réflexion somptueuse sur la création littéraire depuis le surgissement des mythes et des dieux. C’est-à-dire depuis Homère.
Jouant avec érudition et malice autour du rapport de l’écrivain à ses propres personnages et à sa vie, Michon se jette dans la pure narration, sans fards, ventre à terre, magnifique : l’élan du conteur égale l’excellence du styliste. « Le purisme est un dolorisme, clame-t-il. Et un maquillage pour cacher qu’on a du mal à écrire. »
J’écris l’Iliade, de Pierre Michon, Gallimard, 272 p., 21 €