Anthologie poésie poètes d'aujourd'hui

Te voici au commencement de la fin

Au pied du mur à la borne ultime à deux pas de

Ta tombe

Quel bruit mat tout à coup la descente de ton corps par des cordes

Quoi ensuite ?

Après ce dernier spectacle-performance donné aux autres

Que dit ta croyance ta fameuse croyance

Qui ne soit déjà su

Que nous n'ayons déjà lu

Que crois-tu quant à la limite des limites la limite suprême

Qui te concerne n'est-ce pas

Qui se rapproche elle est en vue la vois-tu ne la vois-tu pas

Se rapprocher

À ce que nous savons tu n'as jamais franchi les bornes 

De ce pays dont on ne revient pas

Même en imagination

À défaut de savoir guerrier poète dis-nous au moins ta croyance

Jacques Darras

JE M'APPROCHE DE LA FIN 

Gallimard 2025

LEBONTEMPSDELAVIE  poème 456

Ça ira où ça devait aller avant de se défaire

pieds nus

sur des landes de lait poumons gonflés

de la rosée

des voiles éblouies

les yeux barbouillés

du miel chaud de la nuit

je vacille

en riant

dans l'imitation grave

des petits enfants.

Daniel Simon

Le Journal des Poètes 4/2024

LE BON TEMPS DE LA VIE 

poème 455

Par la nuit sans ombres je veille

désormais, sous mes pensées qui dorment ;

le roulis des heures me berce,

monte en moi comme le vertige :

je voudrais la mer lisse, lucide dans sa paix,

et toi-même dans une anse profonde

je te ramènerai vers moi, je veillerai sur toi

comme une barque veille sur la mer,

parce que tu es mon amour, mon unique amour

dans la fosse aux crachats, celle qui me parle

de l'intérieur par-delà les murmures.

André-Louis Aliamet 

Multiples n°64 2004

Le bontempsdela vie poème 454

Nous ne distinguons plus 

ce qui fait sens.

Un peu de désespoir

nous montre le chemin.

Chaque matin immobile nous offre

un lambeau d'amertume.

Mais le sang gronde en ses flots

avec obstination.

Philippe Nollet 

Multiples 62 (2003)

lebontempsdelavie 

poème 453

Aussi mince qu'un mouchoir

ma page, je la frotte et la nettoie

jusqu'à l'obscurité qui la détruit,

plus forte que les mots

José-Flore Tappy

Trás os Montes (2018)

lebontempsdelavie 

poème 452

Il vaudrait mieux ce matin

déambuler sous les arbres

et ne rien remuer au fond de soi

accueillir la journée

comme une inconnue de passage

et lui donner la main

en poète à l'ancienne

Roland Reutenauer (1943)

Le journal des poètes 1.2024

Lebontempsdelavie poème 451

Au réveil

Nous faisons de l'oreiller

Un panier d'osier

Et c'est merveille

Que d'y déposer

Une brassée de baisers

Bernard Malinvaud

Le chemin des eaux vives

Encres Vives 533°

lebontempsdelavie poème 450

Nous multiplions nos bouches

en ce jardin précieux

où naissent les métaphores

On les assemble en bouquets

mauve ou doré

pour les offrir à qui veut les prendre

pour les planter à nouveau

au plus secret des imaginaires

Michel Cosem

L'heure de la tourterelle

Encres Vives 530°

lebontempsdelavie poème 451

Il suffit de peu de choses

Peut-être l'aile puissante

des oiseaux migrateurs

Une parole dont on ferme les yeux

L'écoulement des sèves

Un seul cri pour fendre l'aube

et la trouer de vent

Véronique Joyaux

Si loin si proche

531° Encres Vives 

Lebontempsdelavie

poème 449

Je ne suis qu'un cri

enchaîné dans les épines

J'ai un pas, la blessure d'un pas

jusque dans l'abîme de ma propre existence

Un seul reflet

enveloppé dans la pourpre de l'ombre

juste une âme

pour la souffrance

seulement le fardeau d'un vol

pour les aiguilles de l'aile

un seul vers 

que je n'ai pas encore écrit

Oui, je n'ai qu'une mort,

une seule mort...

Valeriu Stancu

Autoportrait avec l'ombre de la mort 

Revue Phœnix n°39 2023

Lebontempsdelavie poème 448