Sablier piège à filles
Certains soirs, pour faire mon intéressant, il m'est arrivé de monter sur une chaise, de me draper dans un torchon à carreaux et de déclamer une poignée de vers avec des accès de lyrisme proportionnels à mon taux d'alcoolémie (1). Il s'agissait, à condition que les parents fussent partis en week-end, de l'extrait suivant :
« Mon âme est une chimère
Et le lion son papa
Il suit la chèvre sa mère
Je suis roi de la pampa » ;
ou bien, après basket-ball à Denain Voltaire :
« Sisyphe la soulève et range
Opiniâtre on ne peut nier
Mais vain puisque la sphère orange
Toujours retombe du panier » ;
ou encore, ivre de jerk au bal du 14 juillet à Jeumont :
« Tout un art le lancer du disque
Main mise sur palet cerclé
Le show-biz confine au ménisque
Ça tourne pour Eddy Barclay » ;
ou plutôt, à la buvette du Grand Prix de Spa Francorchamps :
« Mon cœur est patiente mule
Sobre et de caractère entier
Quand tournent en rond les Formule
1, mon cœur trace son sentier » ;
et surtout, lundi presque petit matin de Braderie à Wazemmes :
« La marquise Zeugma sortit
À cinq heures et quatre pattes
Allait-elle dans les Carpates
Ou maculer son bel habit ? »
J’escomptais qu’une candidate fiancée écoutât, appâtée par la poésie et, dans l’élan, qu'elle s'éprît et se prît :
- de ma physiognomonie,
- au piège à filles perpétuel de Jacques Dutronc, sablier toujours retourné par une suivante conquête, qui peut attraper seul des mies indéfiniment, et fonctionner même caché sous un torchon à carreaux.
Au bout du compte j’aurai pas mal déclamé ; déchanté aussi.
(1) Le Chieur dixit.
Robert Rapilly [in Sabliers],
vendredi 28 mars 2008 à 23:33
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