Homophonies métatextuelles
[Le distique ci-dessous n'est pas vraiment holorime, puisqu'il
répète « Ce chat » pour illustrer la superposition quantique
— similaire à de tels énoncés ambigus. Il est suivi par une
tentative de limerick
holorime autoréférentiel sur l'air de Popeye.]
Les miaulements provenant de la boîte émeuvent l'assistant de
Schrödinger, mais celui-ci poursuit néanmoins son expérience :
Ce chat d'essai déteste authentifier mal, ois !
— Ce chat décédé teste (autant t'y fier) ma loi.
*
Vos leurres (l'art n'a coeur)
Elle a ce gars — thug, rat d'hôte —
Et là se gâte heure à dot :
Alors la chargeant
« À l'or, lâche argent ! »
(Hélas ce gâteux radote.)
Égalité
[Contre-pied des
inégalités intransitives
des derniers mois. Tous les mots-rimes ont strictement les mêmes
chances de gagner lorsqu'ils sont considérés comme des dés dont
les faces portent les rangs alphabétiques de leurs lettres.
Le quatrain est une réécriture de la première strophe de
l'Hymne à l'égalité de
Marie-Joseph Chénier.
Le sonnet reprend les rimes phonétiques des
Cent mille milliards de poèmes de
Queneau. Outre le fait qu'imposer une égalité
de chances nécessite un ajustement plus fin qu'une inégalité, il
y a ici 14×13/2 = 91 relations fixées, à comparer aux 14 (ou 28,
parfois un peu plus) que j'avais contraintes dans mes précédents
poèmes à cycles d'inégalités
intransitives. C'est donc bien plus dur encore.]
Égalité guère imposante
Qui n'éclaires plus nos matins,
Aujourd'hui l'on te réinvente
En déposant nos bulletins.
*
Méthodique et soigneux, le rhapsode oralise
Sa contrainte, enhardi par un vin de
cerneaux :
Il vaut mieux qu'aucun son final ne
majorise ;
L'alternance de genre est réglée en créneaux.
Il se dit maintenant : Si tu dépolarises
Pluriels & singuliers, enfile ton
délot
Pour repriser ces vers que tu
léopardises.
Seulement à ce prix le talent rééclôt !
De mots-rimes égaux le poème se dote.
Méticuleusement le métromane
écrote
Son art de tout défaut ord comme un flux
alvin.
De chaque boursoufflure aussi tu le
décloques,
Désirant qu'en ces noix verbales tu
décoques
Un jour un dïamant, mais ton espoir est vain.
P.S. du 25/08/24 : sonnet régulier
respectant la même contrainte d'égalité de chances
des mots-rimes, cette fois sans interversion des singuliers
& pluriels dans les quatrains.
Comme il s'agit surtout d'illustrer le concept,
j'ai volontairement choisi un mètre court.
Croire ?
Quand le Saint-Père
Se rétracta
Puis qu'il natta
L'ointe patère,
Un ange aptère
Lui répéta
Chaque ïota
Bien au contraire :
La natation
De ta nation
Dans l'eau prenante
S'épointera
Et pètera,
Inopérante.
Sélénet presque symétrique
[Retour aux
inégalités intransitives :
les huit mots-rimes de ce sélénet donnent un graphe invariant
par rotation de 45°, à part les deux diamètres bleus.
L'octogone rouge, les carrés orange & jaune, et l'étoile à
huit branches verte tournent tous dans le même sens.]
Morne en son repaire,
L'auteur chipota,
Fuit ce dictionnaire
Qui l'emmaillota.
Mais sans gazinière,
Son art végéta.
Un mauvais ictère
Alors le buta.
P.S. du lendemain : sélénet vraiment symétrique. Son graphe est invariant par rotation de 45°, et ses couches de flèches successives tournent en des sens opposés. En particulier, tout triplet de mots-rimes successifs définit un triangle intransitif.
Après sa démente
Martienne abduction,
Devint plus saillante
Sa délectation.
Quelle embarrassante
Égalisation !
Bien déconcertante
Fut sa damnation.
P.P.S. du 30/08/24 : sonnet
symétrique, au graphe invariant par rotation de π/7 radians,
et aux couches de flèches successives tournant en des sens opposés.
En récitant des vers de forme glyconique,
La Cigale produit un long craquettement
Qu'elle croit musical, mais insolitement,
Ses chants vont lui causer un hiver bien tragique.
La covid entraînant un symptôme anosmique,
La fièvre à petit feu la frit huileusement.
C'est en cherchant de l'eau que spasmodiquement
Elle avale un pichet de vinasse amylique.
Son délire lui fait voir que le Chat botté
Est venu pour aider toute minorité
D'animaux sans moyens que le Roi leur refuse.
« Il saura, j'en suis sûre, ôter mon inconfort,
Car ce Maître félin détient la science infuse »,
Pense-t-elle en tremblant, puis dans le froid s'endort.
Graphes des compositions d'entiers
[Les potentialités oulipiennes des
compositions
d'entiers
ont
été
explorées
depuis
plusieurs
années.
Voici trois nouveaux poèmes inspirés par les graphes de telles
compositions. Deux expressions sont reliées quand l'une s'obtient
de l'autre en décomposant un seul entier en deux plus petits
(ou dans l'autre sens, en effectuant la somme de deux entiers
voisins). L'un de leurs
cycles hamiltoniens est indiqué en rouge.
Il correspond à l'ordre des vers.
Le premier poème est un
« damnet », en 8 vers de 8 syllabes.
Il illustre l'écriture de 8 comme somme d'entiers positifs pairs.
Étant donné que 8 = 2×2×2 est un cube, son graphe cubique
est particulièrement bien adapté.
Le second poème illustre sous forme de
« lanet » le même cube en divisant tous ses
nombres par 2, c'est-à-dire les classiques compositions de 4
comme somme d'entiers de 1 à 4.
Le troisième poème se sert des compositions de 8 comme somme
d'entiers entre 2 et 6, dont le graphe a une forme de bouteille.
C'est en fait une simplification de
celui-ci d'il y a quatre
ans, où le sommet 8 a été supprimé.]
Représentatïon cubique
D'entier décomposé, reviens
Boucler l'électroacoustique
D'astreints chemins hamiltoniens
Afin d'ourdir quelque poème
Réitérant l'hindou mantra
Qu'utilement l'épiphonème
Audiovisualisera.
*
File ô la laine
Filent les jours
Garde l'ébène
Métadiscours
Trouvère sage
Au rêve lourd
Suis l'aiguillage
Vers le retour
*
Équilibriste inefficace,
Dégringole devant l'impasse
L'irrécupérable clochard.
Dépourvu d'avenir, l'ilote
Désormais emberlificote
L'adage d'accent revanchard :
« Recommencera l'existence
Parce qu'oeuvrera d'évidence
L'esprit retirebouchonné.
J'aurai l'éternité vermeille
Lorsque cette dive bouteille
M'aura d'ivresse embobiné. »
P.S.
des 5 & 6/9/24 : nouveau Desdichado
composé, après ces trois
précédentes
versions.
La nouveauté est qu'il est en 12 vers de 12 syllabes,
et que ses hémistiches respectent l'ordre
cyclique
1+1+1+3 = 1+2+3 = 3+3 = 2+1+3 = 2+1+1+2 = 2+1+1+1+1 = 2+1+2+1 = 1+1+1+2+1
= 1+1+1+1+1+1 = 1+2+1+1+1 = 1+2+2+1 = 3+2+1 = 3+1+1+1 = 3+1+2 = 1+2+1+2 = 1+3+2
= 1+3+1+1 = 1+1+2+1+1 = 1+1+3+1 = 2+3+1 = 2+2+1+1 = 2+2+2 = 1+1+2+2 = 1+1+1+1+2
(= 1+1+1+3), illustrant toutes les écritures 6 comme
somme d'entiers entre 1 et 3.
Le second poème est un sonnet illustrant les quatorze
compositions de 5 comme somme d'entiers différents de 4,
dans l'ordre (ni cyclique ni hamiltonien)
1+3+1 = 1+2+1+1 = 1+1+1+1+1 = 1+1+2+1
= 2+2+1 = 2+1+1+1 = 3+1+1 = 3+2
= 1+2+2 = 1+1+1+2 = 1+1+3
= 2+3 = 2+1+2 = 5.
El Hamiltoniano
Je suis le ténébreux, — le pauvre désolé,
L'altesse d'Aquitaine avec tour abolie :
Périt ma seule étoile, — aussi mon luth sans clé
Porte le soleil noir d'un Mal ord comme lie.
Dans la nuit de la mort, toi m'ayant pris du blé,
Rends Naples, l'ample mer, l'italien léger flie,
L'exquise fleur qui plut tellement au cinglé,
Et l'enclos où l'alcool à l'ombelle s'allie.
Suis-je Apollon ou preux ? Rouge est encor mon front
Qui fut embrassé par une magique reine...
Rêveur, j'alterne en boucle alors devant Charon
De saints soupirs d'élue et des cris de sirène.
flie : vent frais et faible
*
Le rimailleur teste
Un graphe peu gros
Pour voir s'il lui reste
Des goûts presque pros.
D'humeur guère leste,
L'auteur sort ses crocs.
Désormais il peste :
Blasphèmes oraux.
Il ose distordre
Ce trop fou désordre
Qu'il a suspecté.
Cela désenivre
L'homme pour survivre...
Interconnecté ?
P.P.S. des 8 & 9/9/24 :
ballade employant les 34 écritures de 8
comme somme de 1 et 2, dans l'ordre du
cycle hamiltonien
1+1+2+1+1+1+1 = 1+1+1+1+1+1+1+1 = 1+1+1+2+1+1+1 = 1+1+1+2+2+1
= 1+1+1+1+1+2+1 = 1+1+2+1+2+1 = 2+2+1+2+1 = 2+1+1+1+2+1
= 2+1+2+2+1 = 2+1+2+1+1+1
= 2+1+2+1+2 = 1+1+1+2+1+2 = 1+2+2+1+2 = 1+2+2+1+1+1
= 1+2+2+2+1 = 1+2+1+1+2+1 = 1+2+1+1+1+1+1 = 1+2+1+2+1+1
= 1+1+1+1+2+1+1 = 2+1+1+2+1+1
= 2+1+1+1+1+1+1 = 2+1+1+1+1+2 = 2+1+1+2+2 = 1+1+1+1+2+2
= 1+2+1+2+2 = 1+2+1+1+1+2 = 1+1+1+1+1+1+2 = 1+1+2+1+1+2
= 1+1+2+2+2 = 1+1+2+2+1+1
= 2+2+2+1+1 = 2+2+2+2 = 2+2+1+1+2 = 2+2+1+1+1+1 (= 1+1+2+1+1+1+1).
Le graphe illustre le tortueux chemin du
berger-troubadour pour séduire sa belle.
Le second poème est un sonnet illustrant les quatorze
compositions de 6
comme somme de 1, 2 ou 6,
dans l'ordre (ni cyclique ni hamiltonien)
2+1+1+2 = 2+2+2 = 2+2+1+1 = 2+1+1+1+1
= 2+1+2+1 = 1+1+1+2+1 = 1+2+2+1 = 1+2+1+1+1
= 1+2+1+2 = 1+1+1+1+2 = 1+1+2+2
= 1+1+2+1+1 = 1+1+1+1+1+1 = 6.
Amour courtois
Ô si douce fleur, ô ma belle,
Je ne sais pas quels sont nos torts
Si d'un coup notre front se fêle
À voir un aussi joli corps !
Le bon Dieu veut nos esprits forts
Et nous bridons bien notre flamme
Afin d'outrer moins cette dame.
Tentons de lui faire une cour
Avec tact... qu'hélas elle blâme,
Alors ça repart pour un tour.
Dessous ta fenêtre, on t'appelle
En de chauds timbres de stentors.
De nouveau restes-tu rebelle
Et plutôt rêche quand tu dors ?
Ah rosse, combien d'heureux sorts
Sont vite morts pour une gamme
Que certes sans trop d'art on brame ?
Nous viendrons peut-être le jour...
Puisqu'un vrai four serait un drame,
Repart-on pour encore un tour ?
Surtout il ne faut plus qu'on bêle
Jamais des mots que nos mentors
Auraient mis dans une poubelle :
On ne peut plaire ainsi, butors.
Nous prenons des chemins retors
Pour l'émoi que le coeur réclame
À cor et cri, car tel Pyrame
En un sanglot sourd notre amour...
Mais sans trouver aucun sésame
Donc ça repart encore un tour.
Princesse ayant conquis son âme,
Voyez comme l'ardent pastour
Cherche l'issue en ce diagramme !
Aussi repart-il pour un tour...
[Voir aussi mes
précédentes
ballades
illustrant les 34 compositions
de 10 en somme d'entiers entre 2 et 10,
dont le graphe est similaire]
*
L'énigme éternelle
L'ordre que Dieu profère
Semble certes d'abord
Une salve du sort :
L'angoisse à chaud nous ferre.
Sombre sombre une sphère
Dès que le rêveur dort
Sans espoir, comme mort.
Que pouvons-nous y faire ?
Le Phénix suit d'instinct
Ce trou noir et s'éteint
Pour ne jamais renaître.
Mais si l'Esprit nous ment,
Le vrai but est peut-être...
L'inaccomplissement ?
[Voir aussi
ce sonnet
d'il y a quatre ans, au graphe presque identique bien
qu'il illustrait les compositions de 8
comme somme d'entiers entre 2 et 8]
P.3S.
du 10 au 12/9/24 :
morsélénets illustrant
toutes les compositions de 5 comme somme de 1 et 2, sans
répétition. La transcription des titres en alphabet Morse fournit
les schémas syllabiques des vers successifs, en attribuant une
syllabe aux points et deux aux traits.
Le premier titre n'emploie qu'un seul mot,
mais donne sur le graphe le chemin arbitraire
2+2+1 = 2+1+2 = 1+2+2 = 1+1+1+2
= 1+1+2+1 = 2+1+1+1 = 1+1+1+1+1 = 1+2+1+1
indiqué par des flèches jaunes.
Le second poème suit au contraire le cycle hamiltonien rouge
2+2+1 = 2+1+1+1 = 2+1+2 = 1+1+1+2
= 1+2+2 = 1+2+1+1 = 1+1+1+1+1 = 1+1+2+1 (= 2+2+1)
où deux expressions successives s'obtiennent l'une de l'autre
en décomposant un seul entier en deux plus petits ou bien en
effectuant la somme de deux entiers voisins.
Le troisième poème est une rapide illustration d'une autre
utilisation possible de ce joli graphe (sans titre en morse) :
les courts-circuits via les arêtes bleues sont autorisés,
ce qui revient à éliminer les couples de vers entre crochets,
à gauche et/ou à droite du graphe.
Marginalisé (-- .- .-. --. .. -. .- .-.. .. ... ..-..)
Fuyant chaque ville,
L'ermite est paumé.
Nulle option civile,
Tout lien fut gommé.
Il n'est d'aucun groupe,
Devient hors-la-loi.
Du monde il se coupe
Sans perdre sa foi.
*
Menu ru à sieste (-- . -. ..- .-. ..- / .--.- ... .. . ... - .)
L'ardent soleil brille,
Ici chante un ru.
L'herbe se tortille
Comme un drap écru.
Un soldat dormaille,
Nul parfum ne sent.
On voit à sa taille
Deux trous rouges sang.
[Voir aussi ce huitain d'heptasyllabes de 2016, dont le graphe est similaire. On peut en effet démontrer que les compositions de N comme somme de 1 et 2 et celles de N+2 en entiers ≥ 2 donnent toujours les mêmes graphes, mis à part les labels de leurs sommets.]
*
On dit ce grand homme
[En art vraiment bon,
Jugeant certain tome]
Hélas un peu con
Parce qu'il assomme
Et qu'il est brouillon.
[Le public dégomme
Vite alors son nom.]
P.4S.
des 18 & 21/9/24 : illustration de compositions d'entiers
reliées par une arête quand l'une s'obtient de l'autre en
effectuant maintenant la somme de trois entiers voisins.
J'ai tracé en jaune les liens qui diffèrent de graphes analogues
déjà vus précédemment.
Le premier poème est un
« fontanet » selon les compositions de 6 comme
somme d'entiers impairs, dans l'ordre du cycle rouge
3+3 = 1+1+1+3 = 1+5 = 1+3+1+1 = 1+1+1+1+1+1 = 1+1+3+1 = 5+1
= 3+1+1+1 (= 3+3).
Aux arêtes jaunes près, le graphe est similaire à ceux des
compositions de 5 comme somme de
1 & 2 et 7 en
entiers ≥ 2 (ce qui
se
démontre).
Le second poème illustre les compositions de 7 comme somme
d'entiers impairs. Aux lignes jaunes près, son graphe est
similaire à ceux des compositions de
6 comme somme de 1 & 2 et
8 en entiers ≥ 2.
Puisqu'il n'est toujours pas hamiltonien, même en tenant
compte de ces nouveaux liens jaunes, j'ai cette fois
choisi un cycle d'ordre 12 (en rouge sur le graphe),
1+1+5 = 7 = 3+1+3 = 1+1+1+1+3 = 1+3+3 = 1+3+1+1+1
= 1+5+1 = 1+1+1+3+1 = 3+3+1 = 3+1+1+1+1 = 5+1+1 = 1+1+3+1+1
(= 1+1+5),
où la composition 1+1+1+1+1+1+1 n'est pas
atteinte. Mais il reste possible de bifurquer vers elle
à la fin (arête orange verticale), au lieu de revenir au
1+1+5 de départ. Le poème contient quelques
allusions métatextuelles, notamment l'idée d'un chemin circulaire
dont il existe tout de même une sortie, et l'emploi de
tierces rimes dantesques pour évoquer les
sommes de trois entiers définissant les arêtes du graphe. Le
cercle des douze vers est sauvé par un treizième christique, et la
présence des nombres mystiques 3 & 7 (tercets d'heptasyllabes)
est aussi dans cet état d'esprit — saint.
Visitant cascatelle,
Je m'en fus bourlinguer.
L'eau supranaturelle
Me convïait au gué.
As-tu le coeur à rire,
Ô bel oisillon gai ?
J'envisagerais pire :
Rossignol, fais le guet !
*
Périple
La route indiscontinue
Autoreconfigurait
L'obscure sylve inconnue.
Dante à mi-vie explorait
La Géhenne circulaire
Où Virgile se tint prêt.
Le versificateur erre ;
Il oit les réprouvés choir
Recouverts d'ardente terre.
Comprenant que dans le noir
L'authenticité va nue,
Il sent l'éternel lui seoir.
Puis il sort pour voir la nue.
P.5S. du 25/9/24 : illustration des quatorze compositions de 10 comme somme de 2, 4, 5 ou 6. Le graphe n'est ni hamiltonien ni même connexe, mais il est bien adapté au thème, repris d'un sonnet de mon grand-père. Le chemin orange sur le graphe a été choisi pour sa symétrie et pour regrouper les décasyllabes césurés 4/6 au début du poème, les 6/4 ensuite (après une transition où les deux types sont simultanément possibles), l'unique schéma sans césure classique au 13e vers, et l'unique taratantara 5/5 à la toute fin.
La fusée
Ayant l'astral zénith comme visée,
Elle ressent l'allumage fatal
Déterminant l'arrachement brutal
D'inclinaison autostabilisée.
Cette merveille instrumentalisée
Atteint l'obscur vide fondamental,
Emplacement d'enjeu monumental
Nécessitant l'emploi d'une fusée.
L'artificialisé giron conduit
L'emberlificoté microcircuit
Auprès d'impressionnant aérolithe.
L'orbite enfantera, parmi l'éther
Orné d'électromagnétique aster,
L'intersidéral minisatellite.
P.6S. du 28/9/24 : illustration des 14 compositions de 14 comme somme d'entiers ≥ 4, dans l'ordre (ni cyclique ni hamiltonien) 4+6+4 = 4+10 = 4+5+5 = 9+5 = 5+4+5 = 5+9 = 5+5+4 = 10+4 = 6+4+4 = 6+8 = 14 = 8+6 = 4+4+6 = 7+7. Les entiers fixent ici le nombre de lettres des mots successifs, et non de syllabes. Le thème s'inspire d'un autre sonnet de mon grand-père — que j'avais déjà abîmé dans un monovocalisme il y a six ans. Le graphe en forme de feuille est similaire à celui des compositions de 10 comme somme de 1 & 4 (ce qui se démontre facilement, une nouvelle fois).
Dépouillement
Gris diable amer
Perd souvenance
Heur perçu rance
Autrefois clair
Vient vite hiver
Clore espérance
Alors brise anse
Brouillant hier
Crénom quel fade
Destin maussade
Vieillissement
Chtourbe frôlée
Très loin semant
Feuille envolée
Double terine de longueurs de mots
[Robert Rapilly a concaténé deux
terines de longueurs de mots pour
composer un tercet d'alexandrins. Je reprends ci-dessous
son idée selon un autre ordre
132 / 123
213 / 312
321 / 231
qui est globalement palindrome. Au lieu de trois vers rimés,
comme Robert, j'ai choisi d'écrire un palindrome de syllabes,
chacun des mots ayant un symétrique en « verlan ».]
Luth, transcendez l'idée aux versets tempérés !
Versos les sentiraient réticents : lai sauvèrent,
Répétant « Sévère, ô délit décentrant l'ut ! »
Sélénantoums
[Robert Rapilly a aussi
proposé et illustré
une forme de poème voisine mais différente de
nos sélénétoums d'août 2019 : le premier quatrain
de pentasyllabes (à rimes croisées fmfm) est une citation,
ci-dessous de
Marceline Desbordes-Valmore. Les trois
autres quatrains reprennent les vers à la manière du
pantoum, les 2e & 4e d'une strophe
devenant les 1er & 3e de la suivante (et la règle est
cyclique). Pour les deux exemples ci-dessous, Robert avait imposé
à la liste oulipo de choisir les mots des nouveaux
vers parmi ceux du Desdichado de
Nerval, ou bien ceux de la
Diomira de
Calvino. Ma première réponse évite
volontairement les rimes du sonnet de Nerval, emploie des sens
différents de plusieurs de ses mots, et holorime la reprise
finale des vers de Desbordes-Valmore. La seconde se sert des
rares rimes que l'on peut trouver dans la courte page de prose
de Calvino.]
Ma demeure est haute,
Donnant sur les cieux ;
La lune en est l'hôte,
Pâle et sérieux.
Donnant sur les cieux,
Le front de ma porte
Pâle et sérieux
Nage à la mer Morte.
Le front de ma porte
Nuit à l'as de coeur ;
Nage à la mer Morte
L'amour du vainqueur.
Nuit à l'as de coeur
Ma demeurée : ôte
L'amour du vainqueur !
L'alu n'en naît, Lotte.
*
Ma demeure est haute,
Donnant sur les cieux ;
La lune en est l'hôte,
Pâle et sérieux.
Donnant sur les cieux,
Un vers se présente
Pâle et sérieux,
Mais ensemble on chante.
Un vers se présente
Aux portes d'étain,
Mais ensemble on chante
Là, chaque matin.
Aux portes d'étain,
Ma demeure est haute.
Là, chaque matin,
La lune en est l'hôte.
Ouïseaunets d'automne
[La forme poétique minimaliste & anticonformiste
« ouïseaunet »
de Robert Rapilly est
de nouveau revenue
à
la
mode sur la
liste oulipo. J'avais
dès le début
noté la similarité de son rythme 4/4/3/3 avec les 4/4/3
de la « Chanson
d'automne » de
Verlaine. J'en tente ci-dessous une
adaptation en six ouïseaunets.]
Le sanglot long
Des violons
Des dindonnes
En automne
Blesse mon coeur
Et ses langueurs
Monotones
Me pigeonnent.
Tout suffocants
Et blêmes, quand
Un freux d'Eure
Dit les heures,
L'on se souvient
Des jours anciens —
Oiseux leurres
Qu'un geai pleure.
Fou, je m'en vais
Tel un duvet
Que transportent
Bises fortes,
En cygne las
Pareil à la
Feuille morte
Des bistortes.
Quand je lis cette histoire au bébé, j'en ai honte,
Ses vociférations sont pour moi de l'hébreu.
— C'est pourtant simple : il dit qu'il n'aime pas ce conte.
XXXX XXX XXXX : XXXX XXXXX, XXXXX !
Huer
Ali Baba : giga babil, areuh !
P.S. du 1/10/24 : ouïseaunet palindrome (j'en avais déjà tenté un en février 2023). Au lieu d'une rime phautive entre singulier & pluriel, les deux premiers vers illustrent l'autre phaute masculin vs féminin.
Si
l'ababil
A
râpé
l'île,
Par
Ali
Baba,
lis !
P.P.S. du 3/10/24 : autre nom d'oiseau palindromisé
Vorace passereau qui manges à gogo,
Sais-tu qu'un fruit de mer souffre à basse marée ?
Épargne au moins ce blême à la mine effarée :
Ô
grive,
n'occis
ce
sec (sic)
cône
virgo !
P.3S. du 4/10/24 : palatindrome-express
Quand Vercingétorix dégaina son épée,
César vit sa robuste élaboratïon.
Alors pour n'avoir point la figure frappée,
Il le félicita de sa redditïon.
Moralité :
Et
on
égailla
l'atémi,
bénit
à
la
palatine,
bimétal
alliage
noté.
What3words
[Le service what3words attribue trois mots à
toute position sur Terre, avec une résolution de 3 mètres.
Angelo Pastormerlo a proposé à la
Writhing Society nord-américaine de s'en
inspirer pour composer des textes ou des poèmes. Voici mes
deux premiers essais, en employant d'abord comme quatrième
hexasyllabe les mots français correspondant à la position de
mon bureau à l'Institut d'Astrophysique de Paris,
puis en citant ceux du pôle Nord à la fin des trois vers
d'un haïku.]
Ces trois mots font la fête
Sans nous déboussoler
Car la contrainte est faite
Toute pour enjôler
*
À froid répétons :
On crut qu'agréablement
L'orbe explorassiez.
P.S. des 6 & 11/10/24 : emplacements précis de quatre plaques commémoratives
Lorsque nous lisons
Borges, sachons détecter
Les rets de son bulbe.
*
Georges veut percer
Le secret du fou poète
Féru de crevette
*
Quels arts capitaux
Ont tant su nous emballer
D'étrange lueur ?
*
Peins par décision
Le réel en le rayant
Mais le racontant
P.P.S. du 10/10/24 :
sonnet dont un vers sur deux cite une adresse
what3words
dessinant un M sur la Maison de Mallarmé
Adopter une rime comme
Potiron. L'arbre déplier.
Ciseler ses vers en surhomme
Séduisant. Rependre. Effacer.
Contre ce cadre user sa gomme,
Border broyeuse, bassin scier.
Au 89 rue de Rome,
Sachons sabrer sitôt gommier.
Tout Poëte a vu, sans névrose,
Même un plombier inspirer prose.
Donc buvons, planant, contrôlant.
Mallarmé brusquement écume
Devant ce sonnet désolant.
Son bilan : poème légume !
P.3S. du 13/10/24 :
dix positions
what3words
sur l'emplacement de l'hôtel
« la Princesse de Lusignan » où Victor Hugo
a vécu ses dernières années
« Élisons
l'officier afin
Qu'il règne comme un séraphin ! »
La Terreur va tôt s'enflammer
Et l'espoir respirant lamer.
L'auteur nous dit-il son mal-être,
Déclarant désorienter Lettre ?
Pour Gavroche, Victor Hugo
N'ose éclipser grisant argot.
Oui, nous le
préférons
Écrivant,
l'adorons !
Le créateur aime conter
Son art, nous berçant au goûter,
Et le charme de résulter.
De la bêtise il n'est captif,
Ce vaste rhéteur éruptif.
Quel trope dosable exprimer
Avant de signer sans rimer ?
Ô déesse aérïenne (ODSARIN)
Qui fais que nous nous cachons,
Laisse tes coups de torchons
Écumer, comme une chienne !
L'État veut nous visser, citoyens ! Méditons
Au symbole de la semeuse (et m'éditons).
P.4S. du 14/10/24 : emplacements précis du lieu de naissance de Nerval, de son dernier logement (dont j'étais voisin lorsque nous avons démarré nos Desdichados en 2000), et de la grille de la rue de la Vieille-Lanterne où il fut retrouvé pendu le 26 janvier 1855 (avec son chapeau sur la tête). J'en ai reconstitué la position d'après ces documents et en superposant le plan du théâtre de la Ville – Sarah Bernhardt à celui du quartier. Notez que sur la deuxième image, le véhicule de Google Street View a photographié un sans-abri, évoquant la pauvreté de Nerval à la fin de sa vie. La troisième image est un croquis de Victorien Sardou, la quatrième une gravure de Gustave Doré, et la cinquième a été créée par une intelligence artificielle d'après ce dessin d'Henri Chapelle.
Des Rois, sans pouffer, Cette nuit, rayant Il désire à quelque [se brancher : se pendre] Il va s'endormir Timide écolier, |
|
[Voir aussi ces réponses des oulipotes]
Sept sonymes
[Après avoir repris la contrainte du
sonyme
(quatre vers de 4, 4, 3 & 3 mots) pour
traduire ce
poème de
Caradec,
j'ai eu envie d'y adapter chacun des sept distiques de notre
souffre-douleur favori.]
El Desánimo
Je suis noir ébène, —
Le veuf, — l'épuisé
Prince d'Aquitaine
Au donjon brisé :
Mon étoile est morte, —
Et mon luth grêlé
De Malaise porte
Un soleil brûlé.
Dans la nuit tombale,
Tu m'as consolé.
Cède la ritale
Mer, son modelé,
La fleur qui dispose
De mon coeur fâché,
Ô charmante rose
Et pampre attaché !
Amour, Phébus suis-je ?...
Grand preux ou Biron ?
Un royal vertige
Empourpre mon front.
Rêvant, dans la grotte
Où nage un tendron,
À cette marotte :
Franchir l'Achéron,
J'ose comme Orphée
Chanter tour à tour
Complaintes de fée
Ou de troubadour.
P.S. du lendemain : un sonyme peut aussi être accompagné de deux autres quatrains pour obtenir un triangle d'inégalités intransitives entre strophes, chaque vers étant associé à son nombre de mots. La plus petite solution est alors {1,4,4,4} < {2,2,4,5} < {3,3,4,4} (< {1,4,4,4}). En atteignant un vers de six mots, on peut même se contenter de deux tercets en plus du sonyme : {1,4,5} < {2,2,6} < {3,3,4,4} (< {1,4,5}). Et en revenant à des vers d'au plus cinq mots, on peut aussi obtenir une somme plus petite que les trois quatrains si l'on décompose les douze vers en un sonyme, un quintil et un tercet : {1,1,4,5,5} < {2,2,5} < {3,3,4,4} (< {1,1,4,5,5}). Voici trois rapides illustrations de cette idée, micro-traduisant Un grand sommeil noir de Verlaine, dont la première strophe est déjà un impeccable sonyme (nous l'avions repéré en 2021). Comme pour mes précédents poèmes selon des inégalités intransitives, les flèches des illustrations correspondent au sens >, c'est-à-dire ici l'inverse du sens de lecture.
Un grand sommeil noir
Tombe sur ma vie :
Dormez, tout espoir,
Dormez, toute envie !
Ne voyant plus rien,
Je perds la mémoire
Envers mal et bien...
Éliminatoire !
Fragile berceau
Qu'une main balance
Au creux d'un caveau :
Silence, silence !
*
Un grand sommeil noir
Tombe sur ma vie :
Dormez, tout espoir,
Dormez, toute envie !
Je ne vois plus rien,
Je perds la mémoire
Superfétatoire...
J'y meurs, comme un chien
Se contrebalance :
Silence, silence !
*
Un grand sommeil noir
Tombe sur ma vie :
Dormez, tout espoir,
Dormez, toute envie !
Je ne vois plus rien,
Je perds la mémoire
Du mal et du bien...
Hallucinatoire !
Accelerando,
Verlaine balance
Au creux d'un caveau :
Silence, silence !
[Voir aussi la réécriture du même
poème de Verlaine par
Robert Rapilly, sous forme de
trois sonymes successifs. Elle est antérieure
à mes triangles ci-dessus, qui s'en inspirent.]
P.P.S. du 24/10/24 : Autre traduction sonymique d'un grand classique. Notez que le « septuor » final est particulièrement bien adapté à ces sept strophes, et que celle entre parenthèses est exactement au milieu, comme si elle matérialisait le miroir inversant le genre des rimes (ce que Mallarmé avait probablement déjà prévu, mais qui se remarque moins dans sa version en quatre strophes de différentes tailles).
Dans l'Angoisse, fore
Cet ongle d'onyx
D'un lampadophore
Cerné de bombyx.
Brûle en du phosphore
L'esprit du Phénix,
Cendres sans amphore
Qu'imagine Nyx.
Plus rien de sonore
Au salon, nul ptyx
Ne tombe, incolore,
Dans aucun hélix.
(Le Néant s'honore
De puiser au Styx
Pleurs du Monsignore
Pour sa Béatrix.)
Mais la croisée ixe
Au nord le décor
Où, guère prolixe,
Agonise un or,
Miroir d'une rixe
Qui prit son essor
Contre quelque nixe
Morte nue, encor
Que le cadre fixe
L'éclat du fluor,
Aussitôt y mixe
Le pur septuor.
[Voir aussi ces réécritures d'autres poèmes comme suites de sonymes par les oulipotes]
Sonymes holorimes
[demi-sélénets holorimes
en 4/4/3/3 mots]
Extrémiste
Je ne consens, triste,
À voter vide en
Jeune con centriste,
Hâve hôte évident.
[Variante :
Je ne consens, triste,
Au vote où ratés
Jeûnent, con centriste,
Ô vautours hâtés !]
*
Apolitique
En jeux nigauds, listes,
Je ne combats ni
Anges ni gaullistes,
Jeune con banni.
*
Donald's dream
Qu'au mensonge rie
Ce crétin sire ? Ouah,
Comme en songerie
Secrète, ainsi : roi !
*
Trépas du mécréant
Au lit se marie :
La mort a lavé,
Ô lisse Marie !,
L'amoral avé.
*
Éros & Thanatos I
Prude amant veut faire
L'amour en tailleurs.
Prudemment, veuf erre
Là, mourant ailleurs.
*
Éros & Thanatos II
Voile à Sapho lie,
Poe, et te décris !
Voilà sa folie,
Poète des cris.
*
Four oulipien
Ressens ce sec âtre :
Vos cas bleus, étroits,
Recensent ces quatre
Vocables et trois.
Mots croisés paronymiques
[Daniel Bilous a
proposé à la
liste oulipo de croiser des mots qui en
donnent d'autres attestés quand on y ajoute ou retranche une
lettre. Ci-dessous, mes définitions tentent de décrire aussi
bien le mot de la grille que son paronyme et la lettre qui en
diffère (comme dans ces
paronymes autodescriptifs
de 2016, ce qui les rend assez difficiles à résoudre mais pas
autant que dans
ces alexandrins de 2002).
La solution est disponible sur
une page séparée.]
Horizontalement :
I. Un état d'esprit sans haine donne une santé de fer.
II. De l'eau sur cette pierre terne révèlera sa translucide beauté.
III. Quand il n'y a plus de paix, la moindre demande de grâce
devient un noeud coulant.
IV. Parfois les baleines sortent leurs têtes, mais même sans elles,
on les repère grâce au panache de brume rejeté par leur narine.
V. Dénudez vos seins et collez la figure de bébé contre eux
pour amorcer l'allaitement.
Verticalement :
1. Ce calibre pour languettes se fabrique en déposant
douze grammes de carbone sur un simple té d'architecte.
2. Ce navire échoué ne contient qu'oeufs près d'un cube de granit.
3. Voyez-vous ces quelques signes sur la partition ?
Eux, avec doigté, exigent le silence.
4. Ce fou sans lit se prend pour un poinçon.
5. Tal étudia d'abord la littérature, mais sans en avoir
l'air, il devint rapidement champion d'échecs à Riga.
P.S. du 30/10/24 : autres mots croisés paronymiques, avec cette fois les symétries du carré Sator, comme en 2020. Attention, les 3e & 4e mots de la grille sont attestés dans de riches dictionnaires mais interdits au Scrabble. En revanche, tous les paronymes sous-entendus y sont autorisés (celui du 3e dans la version anglaise du jeu). La solution est de nouveau disponible sur cette page séparée.
1. Les grenouilles ne cessent de crier : supprimons l'eau pour les détruire.
2. Comme la taxe romaine suscite trop de haine, remplaçons-en
un tiers par un simple thé : inscris-le en commentaire !
3. Quand leur teacher ronfle, eux se changent
pour finir à l'eau, turbulents gamins québécois !
4. Allons sur la plage : ces chapeaux chinois blancs sont la santé !
5. Il commença à chanter les notes... et nous stupéfia.
6. Au banquet des vendangeurs suisses, refaisons le thé
danser pour obtenir un retour de la nouvelle vague.
P.P.S. du 2/11/24 : mots carrés minimalistes & monothématiques (solution)
1. Rayer ou consigner gentiment
2. Chef d'un chapiteau fraternel
3. Renfort de métal gris charitable
4. Ponte turc au bas du dos tolérant
[Voir ces autres mots croisés paronymiques des oulipotes]
Sonymes
palindromes de mots
[Robert Rapilly a construit quatre subtils
sonymes
palindromes
de mots. En voici trois de ma plume,
reprenant la même structure, et s'efforçant de changer les
catégories grammaticales des mots répétés. Le second transforme
une synérèse en diérèse, et le troisième ose lourdement le faire
deux fois.]
Quatrain, sombre ! et grave,
Sublime un train-train !
— Un sublime, grave
Et sombre quatrain ?
*
Sait dr[ui]de où lanterne
La mouche tsé-tsé.
Mouche la lanterne !
(Ou druïde sait.)
*
La l[ueu]r c[ya]n présente
Livre son bla bla.
Son livre présente
Cy-an lu-eur là.
Sonymes
hétérodigrammatiques
[Autre surcontrainte appliquée à la structure du sonyme
— quatrain de 4/4/3/3 mots —,
après les traductions de grands classiques,
holorimes et
palindromes de mots ci-dessus.
Notons que le 7e quatrain de
ces hétérodigrammes
de 2019 était déjà un sonyme fortuit.]
D'une âpre élégance
Fut l'adroit voyou
Avec son immense
Brio d'interview.
Qu'un bruit apocryphe
Tombe juste à chaud,
Cela m'ébouriffe
Pendant notre show :
D'un air prosélyte,
Vers l'azur axez !
Au vieux mégalithe
Avons-nous accès ?
Si Dieu nous exempte
Des orgueil et maux,
Cultivons la menthe
Avec jolis mots !
Au silo je stocke
Maïs, orge ou riz,
Enfin cela troque
Dans nombreux ferrys.
J'obtiens ma pastèque
Et nos produits frais,
Déclinant tout cake
Aux alcools sucrés.
Il fait moult astuce
En buvant du rhum,
L'admirable gusse
D'origine rom.
Il prend une espèce
D'applejack au gin,
Brute tard épaisse,
Ostrogoth sous jean !
En mec fort loquace,
Le trop soûl skinhead
Juge plus cocasse
Sa prude barmaid.
Avec peu d'étoffe
Je ponds un haïku.
Ma minable strophe
Irrite, du coup.
Oh l'extrême gaffe
Que là j'inventai !
Or mon stylographe
A voulu noter...
Dans sa chambre glauque,
L'ord junky fumait
L'hypnogène coke...
Parbleu, ça promet !
On fixe l'abysse
Qui me dit : sautez
Dans le précipice
Où je vivotais !
Allez dans la fosse !
— Quel fut l'intérêt ?
— Une mort atroce
Vous y conduirait.
Sonyme palindrome littéral
[Robert Rapilly a
démontré qu'un palindrome
littéral peut être coulé
dans la structure d'un
sonyme.
Voici celui que j'ai tenté juste après lui.]
L'autorité sur sa pupille
Fit commettre un attouchement.
L'inquiète et lasse jeune fille
Ne dit rien, malheureusement.
Tu
as
sa
tutelle.
Elle
usa. Ce
sot
T'ose, casuelle...
Elle
tut
assaut.
[Voir aussi cette réponse d'Alexandre Carret]
P.S. du même jour : p'tits
vers palindromes
(passez votre souris sous les lignes de
X
pour afficher les solutions)
Ces quatre C font de l'alcool :
X'XX X XXXX XX XXXXXXX.
L'on
a tubé le butanol.
(octosyllabe okapi)
*
En mirant goulûment le soda-Cinzano,
XX X XX XXXXXX XXX XXXXXXXXX.
On
a ci rematé cet américano.
(alexandrin okapi)
*
Flânant près du clavier, Anthony marmotta
« X XXX XXXXXXXXXX XXXXX », XXXXXX XXXX.
« À
ton fortepiano zonai », Petrof nota.
*
Pour soulager la malade pucelle,
XXXX XXXX, XXX-X, XX XXXXXXXXX.
Elle
cira, vas-y, sa varicelle.
*
La brune offre à la Femme une ardeur sexuelle :
XXXX XXXX XXXXXXXX XXX XX XXX, XXXXXXXXXXX.
Elle
unit nocturne Ève en rut, continuelle.
*
Repentante cachant son ruban de dentelle,
XXXX XXXXX, XX XXXXXX, XX XXX XX XXXXXXXXXX.
Elle
terra, jà sainte, et nia sa jarretelle.
Variante exclamative sans synérèse abusive :
XXXX XXXXX, XX XXXXX, XX XX ! XX XXXXXXXXXX.
Elle
terra, jà lâche, eh çà ! la jarretelle.
*
Ayant tracé le court avec sable, grains pâles,
XXX, XX-XXX XX XXXXXXX, XXXX XXXXXXX XXXXXX.
Sel,
là-bas sa marelle, elle ramassa balles.
Variante en hendécasyllabe : Elle ramassa pas à pas sa marelle.
P.P.S. du 10/11/24 : sonyme palindrome phonémique
Rets vantant nos thèmes
Mène aux fêlés vers.
Rêvez les phonèmes
M'étonnant envers !
et sonyme palindrome syllabique
Tout recèle en paire
Nerfs : tu sers discours.
Cours !, disserte unaire,
Perlant ces retours.
[Voir aussi cette réponse d'Alexandre Carret]
Massacrant tant d'art,
S'abat la saga
À blabla standard
D'avatar gaga.
*
En ses termes rêches,
Le lettré se sent
De refermer brèches
D'exemple récent.
*
Si d'instinct viril,
Il prit blinis, vin,
Liszt inscrivit-il
L'infini divin ?
*
Profonds sont vos torts,
Ô trop sots robots !
Prononçons vos morts,
Composons nos mots.
*
Qu'un brun cumulus
Plut sur l'urubu
Fut cru tumulus,
Surplus futur bu.
Sonyme aux rimes à signes extérieurs de richesse
Les sons se répètent
Assez peu. D'ailleurs,
Laissons ce poète
À ses pesanteurs.
et sonyme-barre (donc ne rimant pas)
Monceau n'y mesure
Tant d'heureux nigauds.
Mon sonyme-barre
Tend deux reniements.
[Voir aussi ces réponses d'Alexandre Carret & Robert Rapilly]
P.S. du 18/11/24 : Jean Roche a proposé à la liste oulipo de composer un distique holorime d'alexandrins terminant par « la palissade / lapalissade ». Voici celui que j'ai improvisé.
Ce grand verbicruciste est d'un mortel humour :
Laclos tuera ferme et c'est sa lapalissade :
« La clôture a fermé, cessa la palissade. »
[Voir aussi ces réponses d'Alexandre Carret & Robert Rapilly]
Sonyme de tétradécasyllabes
[Robert Rapilly a composé des sonymes de mètres
très
courts
& très longs, dans l'état d'esprit de
ceux-ci d'il y a trois ans.
Il a même illustré le cas de
vers de quatorze syllabes.
Je reprends son idée ci-dessous, mais en décomposant
autosimilairement les vers de quatre mots en 4/4/3/3
syllabes (comme dans ce
sonnet d'ouïseaunets
de 2021) et ceux de trois mots en 4/4/6 et 8/3/3 syllabes.]
Examinons soigneusement construction pimentée :
Tétrasyllabe itératif, trisyllabe enformais...
Jarnicoton, calembredaine inexpérimentée !
Incommunicabilités underground désormais.
Faux pauvre
[sonnet d'alexandrins illustrant cette
variante des rimes à
signes extérieurs de richesse, dans laquelle les vers sont
holorimes à part leur pénultième syllabe et la consonne
d'appui de la dernière, volontairement différentes]
Mac ascète
Là, pou sied refusé par ce mandarin dit
Pauvret mendigot, mais jurant sur bain de pure
Peau vraiment d'y gommer jus rance urbain nature.
La poussière fusait, parsemant d'art bénit
Haillons doublés de soie, où le velours fleurit
D'éclats réfléchis d'or — humble, sans démesure.
Déclarez fléchi d'ore un bleu sang d'éraflure,
Aïe ! onde où blé d'eux s'oit : houle veut lourd profit,
Barrique à débarras qu'embaume arbre d'ermite.
Barricadez baraque en beau marbre construite !
Mes serfs, vidant thon, lump, ont peuplade à vaudou.
Le repas semble fait pour les champs : son de diète,
Mais servi dans ton long, pompeux, plat d'acajou.
L'heureux passant bluffait, pourléchant son assiette.
[Voir aussi cette réponse d'Alexandre Carret]
Solénet
auto-acrostiche de mot :
— sélénet = deux quatrains
de pentasyllabes à rimes croisées fmfm fmfm ;
— chaque quatrain est un
sonyme = dont les
vers comptent successivement 4, 4, 3 et 3 mots ;
— la lecture verticale des premiers mots des huit vers
reproduit la fin du même poème.
Luth amer d'Orphée,
Y geint l'Aquitain !
À quel coryphée
Conduit ce huitain ?
Encore un bas score,
Petit : ton luth y
A conduit encore,
Petit à petit.
[Voir aussi ces réponses d'Alexandre Carret & Robert Rapilly]
P.S. du lendemain : idem mais en lisant les deux premiers mots de chaque vers pour reproduire la fin du même poème. L'alternance est inversée en mfmf pour que le dernier vers puisse rester un pentasyllabe.
Vite, ensemble, on tend
Au gîte qui tremble.
Peu longs, nonobstant,
Allons vite ensemble
Au gîte ; peu longs,
Allons vite au gîte,
Allons, vite allons,
Vite, vite, vite.
[Voir aussi cette réponse très verlainienne d'Alexandre Carret]
P.P.S. du 26/11/24 : tentative à la limite en lisant les trois premiers mots de chaque vers pour reproduire la fin du même poème — ce qui pose de sérieux problèmes. La prononciation voulue pour certains des « M » est indiquée entre crochets.
Aphasie
Elle m'appelle « il ».
Elle m'appelle « elle ».
« M » appelle M[il].
Appelle ! M'appelle !
M'appelle, m'appelle...
M : M[onsieur] ? M : M[il] ?
— Arrête, ma belle,
Ce crispant babil !
Mots croisés figurés
[Rémi Schulz
a
composé sur la
liste oulipo des mots croisés dont les cases
noires imitent une constellation. Je reprends ci-dessous son idée
dans une grille un peu plus grande. La solution est disponible
sur une page
séparée.]
Horizontalement :
I. dérive
II. flancs d'un cétacé démonstratif — la classe
III. service pour faire le point — trouvent un rapport
IV. découper des bouts de chou
V. coupe évoquant un ballon — drôle d'oiseau parfois gamin
VI. viet — elle ne perd pas le nord, la petite
VII. la terre est retournée où ils sont passés
VIII. débit de ganache — dans le vent en Ukraine
IX. instrument de batterie pour étoiles
Verticalement :
1. bois ce calambour sans faute
2. stoppa l'action d'un petit noir
3. méritent une correction
4. une seconde après le suivant — demi-somme — à ruminer
5. premier échange après un décrochage — ouverture pour violon
6. mal ravaler
7. sort incertain et bifurquant
8. balais naturellement parfumés — sujet central d'un film
9. Québécoise du midi
[Voir aussi mes partitions célestes de 2017]
Excentricité
Quand son maître explique
Que toute exception
Doit se mettre au centre
Pour les texticiens,
Il aime être intense,
Et moult excité
Dans un mètre allègre
Sa cathexis peint.
L'âne trime et juge
Que la rime est belle
Au milieu du vers.
Mais c'est lamentable !,
Lors s'exclame en rage
Son bilieux mentor.
[Voir aussi cette réponse d'Alexandre Carret]