Faleceu em 5 de dezembro passado.
As escolhas musicais de Jean d'Ormesson:
«J'ai souvent dit que j'aime Bach et Offenbach ; l'opérette et les œuvres sacrées se mêlent d'ailleurs dans mes souvenirs d'enfance. Ma mère, fervente catholique, raffolait de la musique légère. Nous vivions en Bavière, où mon père exerçait son activité de diplomate avant l'avènement du nazisme. Je crois encore entendre les chants de Noël qui jouaient un tel rôle en ce temps-là dans la vie des Allemands - comme si le pays, en décembre, se transformait en une gigantesque chorale ! Mais c'est la voix du ténor Richard Tauber, dans Lehar et Benatzky, que j'associe à mes premières émotions au disque. Le goût du chant ne m'a d'ailleurs jamais quitté. J'avoue ne plus écouter Tauber, mais Callas souvent, et Ferrier plus encore.»
«S'il est un compositeur pourtant qui a pris le pas sur tous les autres, c'est Mozart. Pardon si je radote ; j'ai tellement écrit sur cet amour que certains lecteurs vous feront sans doute le reproche de m'y ramener ! Mais il y a une pièce qui est pour moi un pilier du quotidien, tant il est rare que je passe plus d'une semaine sans l'écouter : le Concerto n° 21. Et même un modèle : j'aimerais écrire comme l'Andante. Parce que la légèreté y atteint une profondeur interdite au pompeux. Cette légèreté mélancolique, je l'ai cherchée avec passion, chez les jeunes filles comme en littérature. Il y a quelques mois, j'ai découvert la version de Mitsuko Uchida, qui est celle que j'écoute le plus aujourd'hui. Vous savez, depuis quelques années, la surdité me gagne. Les conversations face à face ne me posent pas de problème, ni les sons amplifiés. Mais les salles de spectacle ne me conviennent plus. Alors je lis le théâtre, et j'écoute la musique au disque.»
«Du reste, je ne me suis pas tant lié aux artistes au cours de ma vie. Contrairement à ce que certains peuvent croire, je suis un solitaire. Très peu de vraies amitiés m'ont accompagné. Il en est une pourtant dont je suis infiniment reconnaissant, c'est celle d'Arthur Rubinstein. Je l'ai aimé à la folie ; il me faisait tellement rire ! On sait quel magnifique imitateur il pouvait être, mais ce don allait bien au-delà de la simple drôlerie. Il suffit d'écouter l'extraordinaire interprète de Chopin qu'il fut pour le comprendre. Rubinstein était un perturbateur, un homme en rupture des conventions formelles. Ses pirouettes châtiaient la fatuité, ses réparties en décalage par rapport au raisonnement ordinaire en soulignaient la vacuité. Comme Einstein, il était de ces esprits auxquels le réel apparaît sous des angles inaccessibles aux simples mortels.»
Textos transcritos da revista Diapason, jan. 2015