C’est en retournant « Les Nymphettes meurent aussi »
du grand Giorgio Scerbanenco - sorti chez 10/18 - que j’ai découvert on ne peut
plus simplement Mimmo Rotella.
Qui d’autre que lui pouvait être utilisé afin d’illustrer les magnifiques enquêtes de Duca Lamberti, cet ex-docteur radié de l’ordre des médecins, devenu officieusement commissaire ?
A travers sa saga Lamberti (mais pas que) Scerbanenco évoque une Italie fracturée, déformée, désenchantée, décrit Milan à travers ses rues pelées, éventrées, ses beautés déchirées, défigurées.
Cette même Italie, Rotella la montre également par ses affiches autrefois bariolées, mais que la ville n'a pas épargnées. Des promesses de rêves qui n'ont pas su résister aux temps ni - à en juger leurs pelages - aux habitants. Ces derniers les ont déchirées, lentement, méthodiquement, par ennui, méchanceté, parfois même par plaisir. Mais Mimmo Rotella s'empare de cette destruction. Avant que ces promesses ne disparaissent totalement, il les a mémorisées, et nous les transmet comme témoignage urbain. Elles ont existé.
Combien de personnages femmes chez Scerbanenco - et il y en a ! - sont décrits comme ayant été, il fut un temps, des créatures sculpturales, bella ragazza. Aujourd'hui, elles sont vieilles, fatiguées, on a abusés tant et plus de leur énergie. Par la force des choses, elles se sont perdues, se sont oubliées, mais ont toujours, au loin, cette flamme. Encore faut-il la percevoir.
Duca Lamberti, lui, la perçoit. Duca, un homme dont la vie brisée ne trouve un
semblant de raison d’être que dans l’amour qu’il porte à Livia Ussaro, celle
qu’il aime, « sa Minerve », une vaillante au visage torturé, constellé
de cicatrices dues au rasoir dansant d'un fou furieux de Milan (dans "Vénus Privée "). Le visage de Livia, qu'elle tente de cacher avec ses cheveux, qu'elle espère vainement camoufler en tournant le dos au soleil, est en lui-même une oeuvre de Rotella. Une beauté que la folie des villes sauvages a marquée à jamais. Là encore, un témoignage urbain.
Comédie Humaine à l’italienne, comédie "nera " italienne, Scerbanenco/Rotella, c’est évident.
A ce duo déjà explosif, on peut ajouter le réalisateur Fernando Di Leo qui, grand admirateur de Scerbanenco, a adapté au cinéma deux de ses livres : "Les Enfants du Massacre " (La Jeunesse du Massacre - 1969) et le fameux "Milan Calibre 9 " (1972), dont l'introduction, portée par l'incroyable musique de Stelvio Cipriani et du groupe Osanna, est l'une des plus écrasantes qui m'ait été donné de voir.
Yves Boisset a également adapté « Venus privée » avec son film « Cran d’Arrêt » - scénarisé par Scerbanenco lui-même.
Giorgio Scerbanenco sur Wikipédia =>
ICI
Fernando di Leo sur Wikipédia =>
ICI
MIMMO ROTELLA
Domenico Rotella, dit Mimmo, est né à Catanzaro (Italie) en 1918.
Décédé en 2006. Il est un important protagoniste du Nouveau Réalisme. Il est
sensible au lyrisme plastique des affiches placardées sur les murs de la ville,
et soumises aux intempéries et aux lacérations d’anonymes. Il fait ses études à
l’Academia di Belli Arti de Naples. Il s’intéresse à la photographie et au
photomontage, à la technique du collage et de l’assemblage, à la poésie phonétique
et à la musique des sociétés primitives. L’art de Mimmo Rotella, abstrait, est
alors fait de larges signes graphiques sur des fonds nettement découpés. Sa
première exposition personnelle est organisée en 1951 à Rome. Après un séjour à
l’Université de Kansas City en 1951/1952 ( bio piquée
ICI )
Wikipédia de Mimmo Rotella =>
ICI
Calendrier Mercedes 2013, inspiré par le travail de Mimmo Rotella.
Plus d'infos => ICI
Rotella / Scerbanenco / Di Leo