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Date de création : 26.02.2011
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26.11.2024
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Rubrique "Cours: l'art". Suite du billet N°4699.
Extrait de Manuel de Philosophie, A.MENDIRI, Amazon.
Prochain billet demain dimanche 15 septembre
Ainsi la qualité d’une œuvre, sa beauté, qualité et beauté qui en font un chef-d’œuvre, recèlent-elles sans doute par essence un pouvoir d’attraction sur les esprits qui légitiment à certains égards les préventions de Platon vis-à-vis de la création artistique, lorsque celle-ci s’éloigne des valeurs qui fondent une civilisation donnée. Il convient donc de s’interroger sur le statut qu’occupe la beauté au sein de l’art en se demandant notamment quelle est la finalité et le sens réels de cette beauté et, au-delà, si la création artistique et la visée de la beauté ont indissociablement parties liées.
Mais avant d’aborder ces questions, faut-il encore s’interroger sur le sens métaphysique de la beauté, sur la présence de cette dernière au sein de l’Etre, (c’est-à-dire sommairement, au sein de tout ce qui est ou encore plus grossièrement au sein de tout ce qui apparaît) même si, éventuellement, cette présence n’a de sens que par la médiation et au cœur de la conscience humaine.
Si l’homme est le seul être conscient ou si, à défaut il est le seul dont les capacités conscientes se voient aussi développées, il découle de ce constat que la révélation consciente de la beauté est son apanage. L’opinion commune a tendance à relativiser l’idée de beauté et à considérer que ce qui est beau pour les uns ne l’est pas forcément pour les autres. Nous serons amenés à aborder cette question de la subjectivité ou de l’objectivité de la beauté. Mais dans l’immédiat, quelle que soit la réponse apportée à ce débat, force est de constater que les uns et les autres, à partir de manifestations sensibles particulières, sont amenés à porter un jugement de valeur mobilisant cette idée de beauté.
Dès lors, il semble difficile, comme le font les empiristes, ceux qui prétendent que nos idées proviennent entièrement de l’expérience, que l’idée de beauté naisse dans l’esprit de l’homme à force de considérer tels ou tels types de formes, naturelles ou culturelles, comme étant belles, bref puisse sourdre de la répétition de ces expériences et en fin de compte d’une forme d’habitude. Car ce qui est en cause ici, c’est la capacité même à pouvoir porter de tels jugements, c’est l’origine ultime de cette capacité, indépendamment des formes qui lui ont donné l’occasion de s’exercer.
Il nous semble en conséquence que la position rationaliste classique, celle qui consiste à attribuer cette capacité à une compétence innée de l’esprit humain, soit plus cohérente, même si, il faut bien le reconnaître, elle n’est pas dépourvue d’obscurité et ce, dans la mesure où tout ce qui relève de l’existence potentielle est toujours difficile à penser et à se représenter. « Connaître, c’est reconnaître », proclamait Platon. Si je peux juger qu’une réalité est belle, peu importe si ce jugement entraîne l’accord des autres, peu importe si je me heurte à l’indifférence ou à un jugement niant cette beauté, car dans tous les cas ces jugements divergents ne sont possibles que dans la mesure où nous partageons la possibilité d’émettre de tels jugements.
Ce n’est pas le cas, vraisemblablement de l’animal, même si la qualité et le caractère chatoyant des formes naturelles jouent un grand rôle dans la nature, en particulier en vue de perpétuer les espèces lors des périodes de reproduction. Il est frappant de constater combien, dans le monde animal, les femelles sont sensibles, lors des parades sexuelles qui précèdent l’accouplement, aux attraits déployés par les mâles. Ces formes chatoyantes, séduisantes, attractives jouent un rôle décisif et on peut donc en conclure que si la sélection naturelle les a retenues c’est précisément en fonction de leur utilité en vue de perpétuer les espèces adaptées à leur environnement.
Ces constats soulèvent, nous semble-t-il, de nouveaux problèmes métaphysiques à propos du statut ontologique de la beauté, c’est-à-dire à propos de la réalité et du sens de cette beauté naturelle. En premier lieu, il y a tout lieu de supposer que l’animal n’est pas conscient de cette beauté. Mais qu’est-ce que cela signifie « ne pas être conscient » ? Rappelons que ce qui semble distinguer l’homme des autres espèces animales, c’est que l’animal se contente de savoir de manière innée alors que l’homme sait qu’il sait, ce dernier type de savoir définissant le savoir conscient par excellence.
Mais même si l’animal se contente de savoir et non de savoir qu’il sait, on doit s’interroger sur l’origine et la possibilité même de ce savoir. En conséquence, nous retrouvons au niveau de l’animal les mêmes hypothèses que celles formulées à propos de l’homme : la sélection naturelle a-t-elle conservée les formes qui, par hasard, ont assuré la survie des espèces ou bien est-ce que c’est l’intérêt vital de ces formes, leur capacité à attirer l’attention, qui leur ont valu d’être conservées ? Comme on peut le constater, le débat reste ouvert.
Quelle que soit la réponse apportée à ce problème métaphysique, est-il possible de dégager des critères permettant de comprendre les raisons qui amène, au moins l’esprit de l’homme sans préjuger de ce qu’il en est pour les autres espèces animales, à juger que telle ou telle réalité est belle ? Aristote (IV° siècle av JC) s’y est risqué. Il estime que le sentiment de beauté provient d’un accord, d’une harmonie, d’une parfaite adéquation entre la forme et le fond de la réalité concernée, ou si l’on préfère entre le sens, la raison d’être de cette réalité et la forme permettant d’exprimer effectivement ce sens et cette raison d’être. Si un cheval de course est considéré comme beau, comme racé c’est précisément parce que la forme effilée de ces membres est en accord avec la fonction course.
Cette conception, qui présuppose la réalité objective de la beauté, assise sur des critères rationnels et logiques, s’est vu radicalement remise en cause par Kant. Pour ce dernier, la beauté est gratuite, c’est-à-dire non liée à des raisons objectives quelconques, que ce soit l’utilité des formes, le sens qu’on leur attribue et donc l’harmonie éventuelle entre une forme et une raison d’être. Une fleur peut être jugée belle alors même qu’il n’y a aucun rapport entre sa forme et sa fonction, à savoir le rôle qu’elle joue dans la reproduction végétale. D’ailleurs, le contemplateur ignore la plupart du temps cette fonction ou ne l’a pas présente à l’esprit lorsqu’il émet ce jugement.
Le jugement amenant la reconnaissance qu’une réalité est belle proviendrait selon Kant d’une harmonie intérieure entre nos facultés, tout particulièrement entre l’imagination et l’entendement ou la faculté de comprendre, harmonie provoquée par la rencontre de telle ou telle réalité sensible. Ce jugement n’a donc pas pour origine une qualité objective des choses, mais une harmonie subjective entre nos facultés face à telle ou telle réalité perçue. Si j’imagine qu’une fleur incarne une qualité humaine quelconque, éveille en moi un sentiment et si l’entendement se représente clairement ce produit de l’imagination, si un accord s’établit entre cette imagination et cet entendement, alors le sentiment de beauté naît en moi. La beauté est dans le regard et non dans la chose regardée.