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Dernière mise à jour : 22.02.2025
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4752 LIBERTE ET EGALITE

Publié le 12/04/2024 à 05:53 par cafenetphilosophie Tags : sur moi monde chez homme enfants fond amis travail société nature art pouvoir demain

Rubrique "La liberté au sein de laCité". Suite du billet n°4745.

 

Extrait de Philosophie pour tous, Tome VII, A.MENDIRI,Amazon.

 

Prochain billet demain samedi 13 avril.

 

 

 

L'instauration d'une démocratie authentique est une entreprise extrêmement difficile et délicate. J.J Rousseau en dégage trois conditions dans la mesure où la démocratie est un régime politique qui assume la liberté naturelle de l'homme et se doit de servir l'intérêt général. En premier lieu, les citoyens doivent obéir à des lois et non à des hommes; en second lieu, la loi doit émaner de la raison et non des penchants de l'homme et ce, en vue de servir l'intérêt général, c'est-à-dire, de manière indissociée, l'intérêt collectif de la Cité et l'intérêt individuel authentique de chacun de ses membres; en dernier lieu, cette démarche requiert beaucoup de vertu, car il n'est pas aisé de renoncer à ses intérêts particuliers mais également aux sources des inégalités criantes, notamment la recherche du luxe.

C'est pour toutes ces raisons que Rousseau en conclut que la démocratie n'est pas faite pour des hommes mais seulement pour un peuple de dieux s'il en existait. C'est pourtant à cette tâche que Montesquieu s'attelle. Puisque qu'un régime de liberté requiert la vertu des citoyens et que les hommes ne sont généralement pas vertueux, il convient de pallier cette insuffisance en créant des institutions vertueuses qui contraindront l'homme à agir politiquement comme s'il était vertueux alors qu'au fond de lui-même peut-être qu'il ne l'est pas.

La clé des conceptions de Montesquieu réside dans l'idée de contre-pouvoir. En effet, tout pouvoir tend à l'excès de pouvoir et seul le pouvoir arrête le pouvoir. Dès lors, il convient que tout pouvoir soit équilibré et contrôlé par un contre-pouvoir. De telles dispositions conduiront les gouvernants à faire des compromis et à prendre des décisions "modérées", éloignées de tout excès. Par ce biais, la démarche politique rejoint l'idéal platonicien et rousseauiste d'établir des mesures raisonnables.

Les démocraties modernes, lorsqu'elles ont été en mesure de s'organiser de manière pacifique et durable, se sont fixées de tels objectifs. Le principe de la séparation des pouvoirs entre les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire est une clef de voûte de tout système démocratique. Car cette séparation conduit au fait fondamental que tous les pouvoirs ne sont pas entre les mêmes mains.

Cependant, les démocraties ainsi conçues présentaient encore des faiblesses théoriques ou institutionnelles et ce sur deux plans bien distincts. Le premier pilier d'une démocratie réside dans le caractère électif de ses représentants. Si ces élections sont régulières et libres, elles dégagent une majorité chargée de gouverner. Mais de ce fait, la démocratie peut se transformer en une dictature provisoire d'une majorité sur des minorités tout au long du mandat que les électeurs lui ont confié.

Dès lors, afin d'éviter ce risque et afin d'instaurer un véritable État de droit, c'est-à-dire un État où les décisions sont prises en fonction du droit existant et non en fonction du caprice du Prince, est-il opportun que la Constitution des États démocratiques, autrement dit les règles fondamentales régissant le pouvoir politique, prévoit des droits fondamentaux dont le respect soit à l'abri des majorités successives issues des processus électoraux. Tel est le second pilier des régimes démocratiques avec l'organisation d'élections libres et régulières.

Cependant comme le souligne Will Kymlick (XX° siècle, Canada) : "On peut dénoncer l'hypocrisie d'un système qui assure l'égalité théorique des droits sans assurer la possibilité pratique d'en profiter. C'est la différence entre droits formels et droits réels. Dans la pratique, les libéraux ont surtout insisté sur la liberté de choix individuels au détriment de l'accès des individus aux ressources culturelles".

Déjà Aristote dénonçait dans "Le Politique" les inégalités sociales comme un obstacle à l'organisation d'une Cité libre et à l'exercice de la raison chez les citoyens. " Dans toutes les cités, la cité comprend trois groupes: les gens très riches, les gens très pauvres,et, en troisième lieu, les gens qui tiennent le milieu entre les précédents. Ainsi donc, puisqu'on accorde que ce qu'il y a de mieux c'est la mesure et le juste milieu, il est évident que, pour les dons de la fortune, le mieux de tout est d'en avoir moyennement. Obéir est alors très facile: au contraire, l'excès de beauté, de force, de noblesse ou de richesse, ou bien, à l'opposé, l'excès de pauvreté ou de faiblesse ou une très grande indignité rend difficile la soumission à la raison: dans un cas apparaissent les ambitieux démesurés et plutôt les grands criminels, dans l'autre les malfaiteurs et surtout les petits délinquants: les crimes et délits se commettent soit par démesure, soit par malfaisance. De plus, les classes moyennes, ce sont elles qui, se dérobant le moins aux charges et les briguant le moins n'ont pas ces attitudes toutes deux nuisibles aux cités".

Nous remarquons cependant que Aristote ne réclame pas, afin d'assurer liberté et harmonie sociale une égalité parfaite entre les citoyens. Certes, la Révolution française reconnaît dans sa fameuse Déclaration des droits une égalité de droit entre tous les citoyens. Cela signifie que ceux-ci ne peuvent être, au regard de l'application de la loi, victime d'une quelconque discrimination, quelle qu'en soit la nature, raciale, sexuelle, religieuse, politique etc. Mais il ne s'agit en rien d'une égalité quant à la possession de biens ou d'une égalité matérielle. Car une telle égalité constituerait une autre forme d'injustice puisque des compétences ou des rôles inégaux au sein de la société seraient traités de manière égale, rendant difficile sinon impossible le bon fonctionnement de la division sociale des tâches.

C'est ce que soutient Hume (XVIII° siècle) dans son "Traité de la nature humaine": « Les historiens et même le bon sens, peuvent nous faire connaître que, pour séduisantes que puissent paraître ces idées d'égalité parfaite, en réalité elles sont, au fond impraticables, et si elles ne l'étaient pas, elles seraient extrêmement pernicieuses pour la société humaine. Rendez les possessions aussi égales que possible: les degrés différents de l'art, du soin, du travail des hommes rompront immédiatement cette égalité. Ou alors, si vous restreignez ces vertus, vous réduisez la société à la plus extrême indigence, et, au lieu de prévenir le besoin et la mendicité chez quelques-uns, vous les rendez inévitables à la communauté entière. La plus rigoureuse inquisition est également nécessaire, pour déceler toute inégalité dès qu'elle apparaît, ainsi que la juridiction la plus sévère, pour la punir et la rectifier. Mais, outre que tant d'autorité doit bientôt dégénérer en tyrannie, et être exercée avec une grande partialité, qui peut bien en être investi dans une situation telle que celle ici supposée?"

Comme on le voit, cette analyse de Hume nous éloigne d'un régime de liberté. Dès lors, le véritable problème qui se pose au sein des sociétés libres consiste à déterminer quel degré d'inégalité matérielle est acceptable sans mettre en danger les idéaux d'une démocratie qui ne peut se voir exclusivement fondée sur le respect de droits formels et non réels.

En effet, si on s’accorde sur le principe selon lequel des inégalités de revenus sont légitimes et justes, il reste à se demander jusqu’à quel point il est possible de tolérer les écarts de revenus entre les plus faibles et les plus élevés. Cet écart peut-il être quantifiable ? Doit-on le fixer de un à deux, de un à dix, de un à mille et ainsi de suite ? La conscience morale commune trouve tout naturellement indécents des écarts extravagants. Comment légitimer qu’un homme ou plutôt la fonction sociale qu’il remplit valent par exemple mille fois la valeur sociale d’un autre homme ?

Il semble difficile de quantifier ce qui relève de la simple appréciation qualitative, la perception du rôle joué par les différentes fonctions sociales variant avec les époques, les valeurs dominantes, les individus eux-mêmes. C’est à ce titre que les conclusions du philosophe contemporain américain J.Rawls développées dans « Théorie de la justice » paraissent résoudre cet épineux problème, à la fois en contournant l’impossible quantification de la valeur des fonctions sociales tout en préservant le souci de la justice. Pour ce dernier « les inégalités socio-économiques… par exemple des inégalités de richesse et d’autorité, sont justes si et seulement si elles produisent, en compensation, des avantages pour chacun et, en particulier, pour les membres les plus désavantagés de la société…il n’y a pas d’injustice dans le fait qu’un petit nombre obtienne des avantages supérieurs à la moyenne, à condition que soit améliorée la situation des moins favorisés ». Cela suppose que les gouvernants compensent à la fois par des mesures fiscales affectant les plus favorisés et des mesures sociales bénéficiant aux moins favorisés les inévitables inégalités de revenus et de possession se déployant au sein des sociétés.

Cependant, selon Tocqueville, (XIX° siècle) le souci de l’égalité la plus grande possible taraude les citoyens des sociétés démocratiques. Prenons connaissance à ce propos des analyses conduites par Tocqueville dans ce célèbre extrait « De la démocratie en Amérique » : « Je pense donc que l’espèce d’oppression dont les peuples démocratiques sont menacés ressemblera à rien de ce qui l’a précédée dans le monde ; nos contemporains ne sauraient en trouver l’image dans leurs souvenirs. Je cherche en vain moi-même une expression qui reproduise exactement l’idée que je m’en forme et la renferme : les anciens mots de despotisme et de tyrannie ne conviennent point. La chose est nouvelle, il faut donc tâcher de la définir, puisque je ne peux la nommer.

Je veux imaginer sous quels traits nouveaux le despotisme pourrait se produire dans le monde : je vois une foule innombrable d’hommes semblables et égaux qui tournent sans repos sur eux-mêmes pour se procurer de petits et vulgaires plaisirs, dont ils emplissent leur âme. Chacun d’eux, retiré à l’écart, est comme étranger à la destinée de tous les autres : ses enfants et ses amis particuliers forment pour lui toute l’espèce humaine ; quant au demeurant de ses concitoyens, il est à côté d’eux, mais il ne les voit pas ; il les touche et ne les sent point ; il n’existe qu’en lui-même et pour lui seul, et, s’il lui reste encore une famille, on peut dire du moins qu’il n’a plus de patrie.

Au-dessus de ceux-là s’élève un pouvoir immense et tutélaire, qui se charge seul d’assurer leur jouissance et de veiller sur leur sort. Il est absolu, détaillé, prévoyant et doux. Il ressemblerait à la puissance paternelle si, comme elle, il avait pour objet de préparer les hommes à l’âge viril ; mais il ne cherche, au contraire, qu’à les fixer irrévocablement dans l’enfance : il aime que les citoyens se réjouissent, pourvu qu’ils ne songent qu’à se réjouir. Il travaille volontiers à leur bonheur ; mais il veut en être l’unique agent et le seul arbitre ; il pourvoit à leur sécurité, prévoit et assure leurs besoins, facilite leurs plaisirs, conduit leurs principales affaires, dirige leur industrie, règle leur succession, divise leurs héritages : que ne peut-il leur ôter entièrement le trouble de penser et la peine de vivre ?

Après avoir pris ainsi tour à tour dans ses puissantes mains chaque individu, et l’avoir pétri à sa guise, le souverain étend ses bras sur la société tout entière ; il en couvre la surface d’un réseau de petites règles compliquées, minutieuses et uniformes, à travers lesquelles les esprits les plus originaux et les âmes les plus vigoureuses ne sauraient se faire jour pour dépasser la foule : il ne brise pas les volontés, mais il les amollit, les plie et les dirige ; il force rarement d’agir, mais il s’oppose sans cesse à ce qu’on agisse ; il ne détruit point, il empêche de naître ; il ne tyrannise point, il gêne, il comprime, il énerve, il éteint, il hébète, et il réduit enfin chaque nation à n’être plus qu’un troupeau d’animaux timides et industrieux, dont le gouvernement est le berger."

Cela confirme, si cette analyse de Tocqueville est prise en compte, que la démocratie est un régime complexe et qu’il convient d’être vigilant si l’on veut préserver ce juste milieu entre la sauvegarde de la liberté et le souci de l’égalité et donc de la justice.