• Et si nous parlions grammaire ?

    Une rubrique pour parler grammaire, conjugaison et orthographe grammaticale. N'hésitez pas à poser vos questions en commentaire d'un article quel qu'il soit, ou via l'onglet Contact. J'essaierai d'y répondre dans la mesure de mes moyens.

    Liste des articles :

    La grammaire à l'école élémentaire

    Types et formes de phrases

     CM : Plus-que-parfait

    Qualifier les compléments (1)

    Qualifier les compléments (2)

    Qualifier les compléments (3)

    Qualifier les compléments (4)

  • Qualifier les compléments (4)
    Merci à Sophie Borgnet pour ses personnages !

    Maintenant que nous avons fait le tour des compléments du verbe, passons aux autres mots que nous pouvons compléter.

    Compléter le nom

    Allez savoir pourquoi ce complément-là pose tant de problèmes aux élèves (et parfois à leurs enseignants) !

    Peut-être à cette fameuse manie de l'analyse grammaticale grâce aux réflexes construits autour de questions-types auxquelles correspondraient des réponses-types ?

    C'est ainsi qu'il nous arrive de lire, y compris chez des adultes ayant mission de transmettre les connaissances, que, dans la phrase : Les marins portent des tee-shirts à rayures. ou dans celle qui explique que La hauteur de la Tour Eiffel est supérieure à celle de la Statue ... de la Liberté., puisque nous répondons quatre fois à la question « à quoi ? » ou « de quoi ? », nous allons forcément découvrir quatre Céhohi ! Et c'est encore pire chez nos élèves à qui manque la base des bases : la conscience de la notion de nom ! 

    C'est pourquoi il nous faut urgemment repartir du début, ce qui devrait se faire dès la Maternelle (et jusqu'au CM2), lors de séances de langage impromptues, au sujet de ce que nous pouvons dire...

    Imaginons des tout-petits qui nous parlent de leurs vélos. L'un évoque son vélo bleu, l'autre son vélo de course, un troisième son vélo à roulettes et un dernier son vélo qui va très vite ! L'air de rien, juste en faisant parler des petits enfants, nous avons implicitement travaillé toutes les expansions du nom d'un seul coup. Et nous pouvons continuer en leur posant des questions :

    → « Louis nous a parlé de son vélo bleu. Qu'est-ce qui peut être bleu aussi ? Donnez-nous le nom d'objets qui sont bleus. »

    → «Inaya nous a dit qu'elle avait un vélo de course. Connaissez-vous des noms d'objets qui sont "de course" ? »

    → « Jade a dit qu'elle avait un vélo à roulettes. Y a-t-il d'autres objets à roulettes ? Pouvez-vous me donner leur nom ? »

    → « Imane nous a dit qu'il a un vélo qui va très vite. Connaissez-vous des noms de choses, d'animaux ou de personnes qui vont très vite ?... Une voiture qui va très vite ? Oui, très bien. Et encore ?... »

    Suite à ces séances informelles, si au CP puis au CE1 et même CE2, nous avons par de très nombreux exercices exercé nos élèves:

    → à bien repérer les noms et à ne jamais les prendre pour des verbes

    → si, à l'oral et à l'écrit, nous les avons entraînés à compléter ces noms par des adjectifs, qu'ils  savent repérer et nommer

    → si, à l'oral comme en maternelle, ils ont fréquemment complété des noms par d'autres noms ou par des propositions relatives,

    nous n'aurons pas de difficulté au CM1 à faire découvrir aux élèves qu'il n'y a pas que les adjectifs qui complètent les noms et qu'il arrive aussi qu'ils soient complétés par d'autres noms !

    Ce qui nous ramène à notre premier exemple. 

    Les marins portent des tee-shirts à rayures.

    Il nous sera facile de leur faire dire que :

    Le nom rayures donne un complément d'information sur les tee-shirts que portent les marins. Il complète donc le mot tee-shirts. Le mot tee-shirts est un nom communà rayures est un complément de nom puisqu'il complète un nom.

    Et nous pourrons même leur faire créer eux-mêmes leur trace écrite qui dira à peu près :

    Parfois, les noms sont accompagnés d'un complément qui en précise la forme, la matière, le contenu, la possession, l'époque, etc. Toutes ces précisions sont des compléments de ce nom. Les noms qui sont complément de nom sont très souvent introduits par une préposition.

    Compléter l'adjectif

    Ah, celui-là, il n'est que pour nous ! Avec dix puis huit malheureuses heures de français par semaine, je ne pense pas que nous ayons le temps en Primaire de le travailler par écrit jusqu'à la prise de conscience et la formalisation.

    Restons donc entre adultes même si, dès la Maternelle, plutôt que de leur apprendre à tracer des lignes verticales avec de la peinture, et puis des lignes verticales avec des feutres, et puis de lignes verticales avec le doigt dans de la semoule, et puis encore et toujours des lignes verticales, nous pouvons (et même nous devons), enrichir tous azimuts leur langage, non pas seulement avec deux mots par jour, mais aussi grâce à des exercices qui les amènent à travailler implicitement la structure de la langue.

    Maman a été contente...

    à enrichir en demandant de préciser son idée. On obtiendra :

    elle a été contente... de son cadeau, ... de la photo de classe, ... de voir mes cahiers, ... du spectacle, ... de la peinture que j'ai rapportée, ... et même... du collier de nouilles !

    Cela ira donc très vite si tous les adultes présents ici :

    → se souviennent que le réflexe questions-types = réponses-types est un réflexe à combattre

    → se souviennent qu'il faut toujours chercher à comprendre qu'apporte comme précision le mot qu'on analyse

    → reconnaissent facilement les adjectifs

    Il nous suffira de savoir que :

    Parfois, les adjectifs sont accompagnés d'un complément qui les précise.

    Exemples : Cet exercice est facile à faire. La pluie est bonne pour les plantes. Ta gourde est pleine d'eau fraîche. Un coffre rempli de pierres précieuses est caché dans ce château.

    Toutes ces précisions sont des compléments de cet adjectifs. Les mots qui sont complément de l'adjectif sont très souvent introduits par une préposition.

    Un complément du nom particulier : l'attribut

    Petit rappel :

    Les verbes d'état :

    Comme leur nom l'indique, ils indiquent un état (être candidat, devenir grand, rester calme, demeurer persuadé de ceci ou cela, sembler sérieux, paraître un personnage original).

    Les verbes d'état ne sont que six et peuvent tous être remplacés par le verbe être :

    être, paraître, sembler, demeurer, rester, devenir.

    On peut ajouter à cette liste quelques locutions verbales : avoir l'air, passer pour, ...

    Un verbe d'état ne peut pas être complété par un complément d'objet qu'il soit direct ou indirect puisqu'il indique un état et non une action.

    L'attribut du sujet :

    Le mot ou le groupe de mots qui attribue une qualité (une manière d'être) au sujet d'un verbe d'état (et de quelques autres verbes comme s'appeler, se montrer, se trouver, se nommer, se faire,  ...) s'appelle tout naturellement un attribut du sujet.

    Exemples : Paul est fiévreux. Il semble malade. Malgré les médicaments, sa température reste élevée. Heureusement, son oncle est médecin. Il nous rassure : « Cette maladie se fait rare aujourd'hui. Elle s'appelle la rougeole ! Elle n'est pas à redouter. »

    Contre-exemples (pour éviter le pilote automatique qui associe verbe d'état = attribut) : Paul est à Paris. J'appelle mon chien.

    Remarquons que dans les exemples, l'attribut désigne une qualité attribuée au sujet (la fièvre de Paul, sa maladie, l'élévation de la température, l'oncle médecin, ...) ou encore une manière d'être du sujet alors que dans les contre-exemples, le pseudo-attribut ne désigne absolument pas une qualité attribuée au sujet (Paris n'est pas Paul, pas plus que moi, je ne suis mon chien).

    L'attribut de l'objet :

    Ça, comme le complément de l'adjectif, c'est pour nous, pas pour les élèves. Alors pourquoi en parler, me direz-vous ?...

    Eh bien pour ne pas dire d'âneries et pour sélectionner avec rigueur les phrases que nous présenterons à nos élèves pour un exercice d'analyse grammaticale.

    Imaginons que, par exemple, nous donnions cette phrase :

    Les élèves ont imaginé un véhicule moitié avion et moitié train.

     et que nous nous apprêtions à leur en faire analyser chacun des groupes.

    Comme d'habitude, nous leur demandons d'abord de trouver le verbe conjugué et de l'analyser :

    → ont imaginé : verbe imaginer, premier groupe, mode indicatif, passé composé, 3e personne du pluriel

    Ce qui les amène à analyser le sujet de ce verbe, celui qui a imaginé :

    → Les élèves : groupe nominal, masculin pluriel, sujet du verbe imaginer.

    Une fois ces deux éléments placés, comme le verbe imaginer a toujours un objet, nous le cherchons (au besoin à l'aide de la voix passive)

    un véhicule (moitié avion et moitié train) : groupe nominal, complément d'objet du verbe imaginer.

    Et là, nous arrivons à cette partie que j'ai indiquée en grisé et entre parenthèses parce que, dans de très nombreuses classes, enfants comme adulte n'auront pas forcément réalisé que ce groupe est une « qualité » attribuée au véhicule, ou, plus simplement, une manière d'être de ce véhicule, et non un simple complément de nom qui ferait partie GN complément d'objet. Nous l'analysons, nous adultes, ainsi :

    moitié avion et moitié train : GN coordonnés, attributs du complément d'objet direct véhicule

    Je conviens avec vous que la différence est subtile, raison de plus pour ne pas y confronter les enfants. Quelques exemples pour nous aider à ne pas tomber dans le piège :

    Le travail sur écran l'a rendu myope. - On surnomma Louis XIV, le Roi Soleil. - Lorsqu'une ville était fortifiée, on la jugeait imprenable. - J'aime ma maison, je la trouve charmante. - J'ai trouvé les portes fermées.

    En conclusion :

    C'est sur ce petit casse-tête que nous finirons cette série d'articles. Cela nous permettra d'établir quelques règles d'or à appliquer dans nos classes, qu'elles soient de TPS ou de CM2 :

    → Nous devons avoir les mêmes ambitions pour nos tout-petits, nos petits, nos moyens ou nos grands élèves : celles d'enrichir leur façon de parler, d'écrire, de lire et de penser.

    → Cet enrichissement passe par la structuration de la langue, à leur niveau, par des exercices d'abord très concrets, basés sur les échanges langagiers oraux, puis de plus en plus abstraits, jusqu'à arriver progressivement à l'analyse grammaticale des mots d'une phrase.

    → Pour mener à bien cet enseignement, nous devons nous-mêmes avoir les idées claires sur une grammaire scolaire simple et efficace, basée sur l'analyse du rôle des éléments qui constituent la phrase au niveau de la compréhension et sur ce qu'ils apportent au discours 

    → Pour cela, il convient de ne jamais raisonner en terme de questions-types apportant des réponses-types, ni, au risque de nous transformer en Monsieur Jourdain, en terme de place du mot ou groupe de mot dans la phrase.

    Dans la même série :

    Qualifier les compléments (1)Qualifier les compléments (2)Qualifier les compléments (3)   ; ...


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  • Qalifier les compléments (3)

    Avant de passer aux compléments qui ne complètent pas un verbe, voilà  le grand oublié de l'École Primaire, le complément d'agent (disparu des programmes du Primaire en 1972, après n'avoir été enseigné qu'aux CM2 et Cours Supérieur et 6e et 5e des Collèges) et son corollaire, la voix (ou forme) passive (disparue des programmes de l'École Primaire, beaucoup plus tardivement, en 2002).

    Si son rôle est intéressant, même pour des bons élèves de CM2, c'est surtout pour les enseignants qui y découvriront une manière simple de :

    ◊ distinguer un verbe conjugué à un temps composé de la voix active d'un verbe conjugué à la voix passive

    ◊ repérer plus aisément le complément d'objet direct et le sujet d'une phrase à la voix active

    Définir le sujet n'est pas toujours simple.

    ♠ Si nous disons à nos élèves qu'il est placé avant le verbe (encore cette fichue manie de faire de la grammaire comme on emboîterait des Lego), c'est très souvent faux ! Bonjour alors aux « Au milieu est le sujet du verbe couler » dans les phrases qui nous informent que Au milieu coule une rivière.

    ♠ Si nous disons qu'il désigne la personne qui fait l'action, nous perdons les élèves dès que, dans une phrase, un sujet totalement passif subit  tout un tas de choses malgré lui (La souris est poursuivie, attrapée et dévorée par le chat. → Qu'a-t-elle fait, cette pauvre petite souris ? Rien de rien... Et pourtant c'est bien elle le sujet de ces trois verbes !)

    C'est pourquoi il vaut mieux s'en tenir à deux définitions simples auxquels les utilisateurs de Du Mot Vers la Phrase ou d'OrthoGraph' sont habitués :

    ♥ Le sujet commande le verbe (Il conduit la voiture-verbe

    ♥ On le trouve en posant la question: « Qui est-ce qui commande (ou conduit) le verbe ... ? » ou « Qu'est-ce qui commande (ou conduit) le verbe ... ? » et en y répondant par « C'est ... qui commande (ou conduit) le verbe ... »

    Exemples :

    D'une voiture tomba un jour une grosse cruche. Passe une petite souris.

    Elle aperçoit la cruche.

    Qui conduit la voiture-verbe ? Qui commande le verbe tomba ? → C'est une grosse cruche qui tomba.

    Qui conduit la voiture-verbe ? Qui commande le verbe passe ? → C'est une petite souris qui passe.

    Qui conduit la voiture-verbe ? Qui commande le verbe aperçoit ? → C'est elle qui aperçoit.

    Et comme ceci fonctionne même lorsque le sujet subit l'action au lieu de la faire, il est bientôt temps pour nous, et éventuellement pour nos élèves de CM ensuite, de nous intéresser aux formes (ou voix) que peut prendre le verbe.

    Découvrir la forme (voix) active et la forme (voix) passive

    Un groupe de comédiens envahit la rue piétonne.

    La rue piétonne est envahie par un groupe de comédiens.

     Dans la première de ces phrases, le sujet un groupe de comédiens est actif. C'est lui qui fait l'action d'envahir un objet, la rue piétonne.

    Dans la seconde, en revanche, l'objet la rue piétonne est devenu un sujet qui subit l'invasion tout en restant passif devant cette action de l'envahir. 

    En nous intéressant à la forme prise par le verbe envahir dans ces deux phrases, il nous est facile de noter ce qui s'est passé entre ces deux phrases :

    ◊ Dans la première phrase, le verbe est conjugué sous sa forme active car le « conducteur de la voiture verbe » est l'acteur (ou agent) de l'action qu'il exprime

    ◊ Dans la seconde phrase, cet acteur (ou agent) n'est plus le conducteur de la voiture-verbe conduite par un sujet qui subit l'action qu'il effectue. Le verbe est conjugué sous sa forme passive. On note que, pour cette forme, nous avons utilisé l'auxiliaire être au même temps que le verbe de la phrase active suivi du participe passé du verbe de la phrase active.

    Exemples :

    Un groupe de comédiens envahira la rue piétonne. La rue piétonne sera envahie par un groupe de comédiens.

    Un groupe de comédiens envahit la rue piétonne. La rue piétonne fut envahie par un groupe de comédiens.

    Un groupe de comédiens a envahi la rue piétonne. La rue piétonne a été envahie par un groupe de comédiens.

    Un groupe de comédiens avait envahi la rue piétonne. ⇒ La rue piétonne avait été envahie par un groupe de comédiens.

    Nous retiendrons (et ferons éventuellement retenir à nos élèves de CM par de nombreuses manipulations orales) que :

    Dans certains cas, le sujet ne fait pas l'action exprimée par le verbe ; il la subit seulement. On dit que le verbe est conjugué à la forme (ou voix) passive.

    À la forme (ou voix) passive, le verbe transitif est à une forme composée où son participe passé est conjugué avec l'auxiliaire être conjugué au même temps que le verbe de la phrase active.

    Nota bene : Il ne faut pas confondre les temps simples des verbes transitifs directs conjugués au passif, 

    Exemples : elle est envahie ; j'étais abattu ; tu seras accompagné ; ...

    avec les temps composés de certains verbes intransitifs conjugués à l'actif avec l'auxiliaire être.

    Exemples : elle est venue ; j'étais sorti ; tu seras allé ; ...

    Nous verrons plus tard comment éviter cette confusion (voir Troisième et Quatrième Conclusions).

    Analyser les GN d'une phrase passive

    Cet exercice est intéressant pour l'enseignant, non seulement pour mieux comprendre le rôle du sujet dans une phrase, comme nous l'avons vu ci-dessus, mais aussi pour repérer grâce à la compréhension  le complément d'objet direct de la phrase active.

     Reprenons notre exemple ci-dessus en l'enrichissant de quelques compléments circonstanciels.

    Pendant l'été, un groupe de comédiens envahit chaque après-midi la rue piétonne.

    Devant une telle phrase, nous savons que certains de nos élèves – et malheureusement quelques collègues dressés au jeu de Lego grammatical – risquent de mettre en route le pilote automatique et de ne pas trouver le sujet (qui n'est pas le premier groupe de la phrase !) et encore moins le complément d'objet direct (qui n'est pas placé directement après le verbe !)...

    Grâce à la règle sur le sujet énoncée ci-dessus, le sujet émerge très facilement :

    Qui conduit la voiture-verbe ? Qui commande le verbe envahit ? → C'est un groupe de comédiens qui envahit quelque chose.

    Le groupe de comédiens est le sujet acteur (ou agent) de l'action d'envahir.

    Et grâce à la notion d'objet travaillée précédemment (Qualifier les compléments (1)), nous savons que :

    la rue piétonne est l'objet de l'action d'envahir exécutée par le sujet, agent de l'action d'envahir. ⇒ comme il n'est pas introduit par une préposition et que le verbe envahir ne fait pas partie de la liste des verbes transitifs indirects, le GN la rue piétonne est le complément d'objet direct du verbe d'action transitif direct envahir.

    Et grâce à la transformation passive, nous en avons confirmation :

    Pendant l'été, la rue piétonne est envahie chaque après-midi par un groupe de comédiens.

    Ici, le sujet n'est plus agent de l'action. Il la subit.

    Qui conduit la voiture-verbe ? Qui commande le verbe est envahie ? → C'est la rue piétonne qui est envahie. (Remarquons au passage que nous ne serions pas obligés comme dans la phrase active de compléter le verbe envahir).

    Le complément d'objet direct de la phrase active est devenu le sujet de la phrase passive.

    Première conclusion : Pour s'assurer d'avoir bien repéré le complément d'objet direct du verbe à la forme active, nous pouvons opérer une transformation passive. Le sujet du verbe à la forme passive est le complément d'objet direct du verbe à la voix (ou forme) passive.

    Deuxième conclusion : Seuls les verbes d'action transitifs directs peuvent être mis à la voix (ou forme) passive.  

    Quant au sujet de la phrase active, qu'est-il devenu ? Nous le retrouvons facilement puisqu'il reste l'acteur ou agent de l'action d'envahir !

    Mais nous remarquons que :

    ◊ même s'il reste utile à notre propos, et même fondamental – en effet, il vaut mieux que la rue piétonne soit envahie par des comédiens que par des soldats en armes, des aliens aux intentions coupables ou des fauves assoiffés de sang ! –, il n'est plus indispensable (Pendant l'été, la rue piétonne est envahie chaque après-midi. , c'est moins précis mais tout à fait compréhensible)

    ◊ il est introduit par la préposition par (il pourrait l'être aussi par la préposition de : Pendant l'été, la rue piétonne est envahie chaque après-midi de comédiens qui se mêlent aux promeneurs.)

    C'est donc un complément, puisqu'il complète le verbe envahir, indirect, puisqu'il est introduit par une préposition, utile à notre propos mais pas indispensable. Comme il nous informe sur l'agent de l'action d'envahir, nous pouvons le désigner par le terme de complément d'agent du verbe envahir, conjugué à la forme (ou voix) passive.

    Troisième conclusion : Quand nous mettons le verbe d'une phrase active à la voix (ou forme) passive, le sujet de l'action (ou agent) complète le verbe à la voix (ou forme) passive. Comme ce complément nous renseigne sur l'agent de cette action, nous le qualifions de complément d'agent.

    Quatrième conclusion : Le complément d'agent nous renseigne sur la personne, l'animal ou la chose qui fait l'action exprimée par le verbe à la voix passive. Il est introduit par les prépositions par ou de.

    Dans la même série :

    Qualifier les compléments (1)Qualifier les compléments (2) ; ... ; Qualifier les compléments (4)


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  • Qualifier les compléments (2)

    Les compléments circonstanciels

    Comme leur nom l'indique, les compléments circonstanciels indiquent une circonstance de l'action exprimée par le verbe.

    A priori, c'est tout simple mais il n'y a qu'à suivre une discussion entre collègues, que ce soit sur les réseaux sociaux, dans une salle des maîtres ou en animation pédagogique pour savoir à quel point on peut pinailler sur ce type de complément !

    ◊ Un peu d'histoire...

    ♦ Observons :

    Autrefois, avant 1972, date du premier chambardement dont l'école actuelle est issue, on considérait que :

    « On distingue plusieurs sortes de compléments :

    1) le complément direct d'objet

    2) le complément de temps

    3) le complément de lieu

    4) le complément de manière »

    (Livre unique de Français, Cours Moyen, L. Dumas, 1931)

    Un peu plus tard, on apprenait aux élèves que :

    « Les compléments de circonstance ne sont pas indispensables. Mais ils sont utiles par les renseignements qu'ils donnent sur le lieu, le temps, la cause de l'action, la manière dont elle s'effectue, ... »

    (Grammaire, Cours Moyen 1re année, G. Villars, J. Marchand, G. Vionnet, 1963)

    Enfin, tout juste cinq ans avant le grand chambardement, on enseignait que :

    « Le groupe complément qui permet d'indiquer le lieu où se passe l'événement exprimé par le verbe est appelé complément circonstanciel de lieu. Il répond à la question posée après le verbe. Il précise : le lieu où l'on est - le lieu d'où l'on vient - le lieu où l'on va.
    Quand on veut attirer l'attention sur le lieu où se passe l'événement, on place le complément circonstanciel de lieu en tête de phrase. »

    (De la lecture à l'expression française, Rigaud-Vasconi, 1967)

    Nota bene : trois autres séances sont consacrées dans ce dernier ouvrage aux compléments circonstanciels (CCT, CCM, autres CC) en suivant exactement la même démarche.

    ♦ Analysons :

    Lorsque nous lisons ces trois résumés à apprendre par les élèves après avoir travaillé la notion de manière active et concrète (voir La grammaire à l'école élémentaire) nous constatons que :

    ⊗ L'adjectif circonstanciel est apparu tardivement (tant mieux, parce que c'est du charabia pour adultes et ça n'aide pas les élèves à mieux comprendre et mieux s'exprimer). On a d'abord parlé de complément (ce qui est très vague mais reste exact) puis de complément de circonstance (ce qui a le mérite de préciser un point important sans tomber dans le charabia). 

    ⊗ On considérait que ces compléments précisaient l'action exprimée par le verbe en donnant le lieu, le temps, la manière, la cause, etc. de cet action (ou événement), ce qui a totalement disparu après le chambardement de 1989 ou 2002.

    ⊗ On n'a commencé à parler de la possibilité de déplacer ces compléments que tardivement et uniquement dans un but stylistique. Un  de ces trois manuels explique qu'ils ne sont pas indispensables mais simplement utiles (s'ils sont utiles, alors, pourquoi chercher à les supprimer ?)

    ⊗ On y a passé de plus en plus de temps : d'une leçon consacrée à tous les compléments dits du verbe, qu'ils soient d'objet ou de circonstance, on passe à quatre leçons pour la notion de complément circonstanciel

    Après cette digression historique, revenons au but de cette série d'articles : enseigner une grammaire élémentaire qui permettra à nos élèves de mieux comprendre ce qu'ils lisent et mieux s'exprimer, tant à l'oral qu'à l'écrit.

    Pour cela, voyons ensemble quelques renseignements nous permettant de définir quel est le sens et l'utilité de ce type de complément.

    ◊ Il indique une circonstance

    Le complément circonstanciel indique une circonstance de l'événement exprimé par le verbe (action, état) : lieu de l'événement, moment de l'événement, cause de l'événement, but de l'événement, etc.

    Elle attache son vélo au lampadaire. → au lampadaire précise le lieu où elle attache son vélo, c'est un complément circonstanciel de lieu.

    Quand nous regardons l'immensité de l'univers, nous semblons minuscules. → Quand nous regardons l'immensité de l'univers précise le moment où nous semblons minuscules, c'est un complément circonstanciel de temps.

    À cette réunion, je meurs d'ennui ! → À cette réunion précise le lieu où je meurs, c'est un complément circonstanciel de lieu.
    → d'ennui précise la cause de cet événement, c'est un complément circonstanciel de cause

    La plupart du temps, les compléments circonstanciels sont introduits par une préposition. Mais il arrive que ce ne soit pas le cas :

     La nuit, je dors.

    J'irai à la Poste cet après-midi.

    ◊ Il ne peut pas toujours être déplacé

    Malgré cette loi qui nous semble intangible, mais qui n'a pourtant qu'une petite quarantaine d'années, il arrive de temps en temps qu'on ne puisse pas déplacer ce complément, sauf à se prendre pour Monsieur Jourdain et son maître de philosophie.

    Exemple :

    Lola rejoindra ses amis au terrain de jeux après l'école.

    si l'on peut facilement dire :

    Après l'école, Lola rejoindra ses amis au terrain de jeux.
    Lola rejoindra ses amis
    après l'école au terrain de jeux.

    il est plus compliqué, voire bizarre, de dire :

    Au terrain de jeux, Lola rejoindra ses amis après l'école.

    Pourtant, si nous nous attachons au sens de chacun des groupes de cette phrase, nous voyons bien que :

    au terrain de jeux indique une circonstance de l'action de rejoindre ses amis

    au terrain de jeux précise le lieu où Lola rejoindra ses amis

    ⊗ et en plus, comme dirait notre manuel de 1963, au terrain de jeux est utile mais pas indispensable !

    Il est donc clair que au terrain de est bel et bien complément circonstanciel de lieu.

    ◊ Sa suppression n'a aucun intérêt

    Bien sûr, grammaticalement parlant, dans la phrase ci-dessus (Lola rejoindra ses amis au terrain de jeux après l'école), nous pouvons supprimer les deux compléments circonstanciels (après l'école ; au terrain de jeux). Grammaticalement parlant...

    Si nous restons au niveau du sens et de ce que nous cherchons à apprendre à nos élèves, en revanche, l'action de supprimer ces compléments ne présente strictement aucun intérêt. En effet, seuls des détraqués complotistes auraient intérêt à appauvrir la compréhension de textes longs et l'expression orale et écrite d'une génération d'enfants !

    Bien au contraire, lorsque le petit Jordan nous apporte son jogging d'écriture du jour (raconte ton dimanche), et que nous le lisons (ponctuation et orthographe restituée pour que la lecture soit moins pénible à nos yeux d'adultes) :

    Je me suis levé. J'ai déjeuné. Je me suis habillé.J'ai joué. J'ai mangé. On a regardé un film. J'ai goûté. J'ai fait mes devoirs. J'ai mangé. J'ai pris ma douche. Je me suis lavé les dents. Je me suis couché.

    nous n'avons qu'un but, lui faire ajouter les circonstances qui précisent chacune de ses actions !

    Ce qui nous permet de revenir à la phrase ci-dessus et de dire que ce qui nous intéresse dans l'histoire de Lola, ce qui en est le propos principal, c'est le lieu et le moment où elle doit rejoindre ses amis. C'est la première chose que nous demandera un enquêteur si malheureusement Emma n'est pas rentrée après cette sortie.

    Concluons donc :

    Le complément circonstanciel n'est pas indispensable au point de vue grammatical, mais il l'est à son sens.

    ◊ Attention aux verbes de situation dans l'espace !

    Il va à New York.

    Elle habite près de la forêt.

    Il reste dehors.

    J'y suis.

    Nous avons vu dans l'article précédent (Qualifier les compléments 1) que les Instructions Officielles, négligeant totalement le sens de ces propositions, classent ces compléments dans le groupe des compléments d'objet indirect, ne s'attachant qu'à la préposition, quand il y en a une, et à l'impossibilité de les supprimer et de les déplacer  !

    Il m'est même arrivé (assez fréquemment hélas) de rencontrer des collègues persuadé.e.s de prouver leurs dires en confondant l'adverbe de lieu y avec le pronom indirect homophone.

    Je persiste et signe, face à tous les grammairiens de la terre s'il le faut : « Faites ce que vous voulez dans vos universités et vos instituts de recherche mais, par pitié, laissez en paix les petits enfants qui apprennent à parler, écrire et lire le français ! »

    Bien que ces mots ne soient pas une simple circonstance de l'événement relaté, bien que nous constations qu'ils ne sont pas simplement utiles mais bel et bien indispensables à la grammaticalité de la phrase, les jeunes enfants voient très bien que tous ces mots expriment le lieu où se déroulent ces événements. Apprenons donc à nos élèves que ces mots ou groupes de mots sont des compléments de lieu.

    ◊ En conclusion :

    Ne serait-il pas plus simple, pour ne pas entraîner les élèves sur des fausses pistes, et pour faire de la grammaire scolaire un outil utile pour bien comprendre et bien s'exprimer, de la débarrasser de son charabia ?

    Nous avons vu dans les extraits de manuels scolaires anciens que, lorsque l'adjectif circonstanciel est venu s'ajouter à la notion de circonstance, les rédacteurs de manuels ont été obligés de passer de une à quatre leçons pour que les élèves soient sûrs de leur travail.

    Nous avons vu que les derniers programmes en viennent à mélanger allègrement des objets d'une action introduits par une préposition avec les lieux où se déroulent des actions ou états, introduisant de ce fait la confusion autant chez les enseignants que chez leurs élèves.

    Nous avons vu que tous ces excès de formalisme encouragent les enseignants à ne plus faire d'analyse grammaticale du tout (phrase récurrente sur les réseaux d'enseignants : « Si nous-mêmes, nous hésitons et ne sommes pas d'accord entre nous, c'est bien que c'est beaucoup trop difficile pour des enfants ! »).

    Nous avons enfin vu que, dans certains cas, on peut avoir besoin de compléter une action ou un état par un lieu (ou une mesure : Il pèse cinquante-quatre kilogrammes. - Ce film dure deux heures trente).

    Toutes ces raisons me poussent à proposer une solution pratique qui évite tous ces écueils incompréhensibles pour des enfants (et même parfois pour leurs professeurs) :

    Et si nous parlions tout simplement de compléments de lieu, de temps, de manière, de cause, de but ou de moyen ?

    → Nous ne mentirions pas

    → Cela ne nous empêcherait pas d'évoquer au cours de nos dialogues pédagogiques la notion de circonstance de l'action préparant ainsi nos élèves pour la Sixième

    → Nos élèves ne perdraient pas de temps à jouer les universitaires, tout en continuant à progresser dans le domaine de l'expression et de la compréhension.

    Qu'en pensez-vous ?

    Dans la même série :

    Qualifier les compléments (1) ; ... ; Qualifier les compléments (3) ; Qualifier les compléments (4)


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  • Les compléments

    Avant de commencer à s'écharper sur l'usage dans la grammaire française des extensions nombreuses et variées du nom « complément », posons-nous d'abord deux petites questions ?

    À quoi peut bien servir ce travail d'analyse grammaticale pour un élève de 7 à 12 ans ?

    À ceci, je répondrai par une seule phrase :

    Cela sert à mieux comprendre et à mieux se faire mieux comprendre.

    Et c'est tout.

    Pour plus de précisions à ce sujet, je vous renvoie vers La grammaire à l'école élémentaire.

    Quel intérêt y a-t-il à transmettre ce travail de désignation à nos élèves de 7 à 12 ans ?

    Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement et [, normalement,] les mots pour le dire arrivent aisément. (Nicolas Boileau [sauf l'ajout]). Il y a donc tout intérêt à doter les élèves d'un vocabulaire commun leur permettant d'échanger autour de la langue française, de sa signification, de sa construction et son orthographe.

    Oui mais voilà :

    Cela, c'était vrai jusqu'aux années de grands chambardements, où, tout à coup, toute la nomenclature élémentaire, primaire, de la grammaire scolaire a été déclarée obsolète, stupide et même dangereuse.

    La première attaque que je connaisse date de 1972, la deuxième, de 1989, la troisième, de 2002, et la quatrième, de 2015, si mes souvenirs sont bons. Chacune de ces attaques a été suivie d'un retour en arrière, avec des concessions à chacun des deux partis en présence, anciens comme modernes.

    Ce qui fait que désormais, dans les écoles, et même au ministère, selon les années de scolarisation des enseignants et des rédacteurs de programme, nous nous trouvons face à des factions rivales qui ne jurent que par ce qu'ils ont connu étant jeunes adultes, lorsqu'elles ont été formées au métier d'enseignant ou de grammairien. Certains collègues sont même contraints de s'en référer aux années où ils étaient enfants de Primaire, puisqu'ils ont été recrutés sur le tas comme « contractuels ».

    Et ceci, je pèse mes mots, devient vraiment catastrophique ! Et cela rend les leçons de grammaire totalement sans intérêt pour les enfants, pour ne pas dire pire !

    C'est ainsi qu'au ministère, des grammairiens arrivés d'une planète inconnue peuvent construire des programmes à base de copiés-collés auxquels personne ne comprend rien et dont l'utilisation comme amélioration de la compréhension et de l'enrichissement du langage écrit est plus qu'improbable.
    Nous avons tous en mémoire l'apparition du  prédicat, vraisemblablement arrivé à partir des programmes scolaires québecois, alors que le mot n'avait jamais été employés dans des programmes scolaires français. 

    Ces concepteurs de programmes scolaires peuvent aussi se saisir d'un mot (indirect, par exemple), l'associer à une notion très vaguement comprise (l'objet, par exemple, dont le critère de reconnaissance a été déconnecté du sens pour ne plus s'attacher qu'à sa place dans la phrase, comme lorsque le maître de philosophie se moque du Bourgeois Gentilhomme dans la comédie du même nom) et employer cette association en dépit du bon sens, quand ça les arrange.
    C'est ainsi que, observant que le groupe nominal  « à Paris », introduit par la préposition à, est donc de construction indirecte et qu'il est très difficilement déplaçable, et en négligeant le sens qui indique clairement que c'est un complément qui indique le lieu où habite Pierre, on utilisera le terme suffisamment opaque de complément d'objet indirect pour ce groupe nominal dans la phrase Pierre habite à Paris alors que Paris n'est en aucun cas l'objet sur lequel s'exerce l'action d'habiter !

    Ils peuvent aussi bâtir leur analyse grammaticale sur des questions de base (voir l'illustration ci-dessus) et poser ces questions en les déconnectant de la signification de la phrase (exemple : Pierre est riche. Pierre est comment ? riche. Riche se retrouve affublé de la fonction complément de manière au lieu d'être un attribut du sujet, alors que si nous posons la question Pierre est quoi ? l'adjectif riche devient complément d'objet direct... si, si...). Ils peuvent aussi faire le contraire et s'attacher à la place du mot dans la phrase (exemple : Pierre est à la plage. Ah, facile, à la plage est placé à droite du verbe être, c'est donc un attribut du sujet).

    Après ce musée des horreurs, rempli de glaces déformantes,

    et fidèle aux préceptes que j'ai développés dans l'article qui expliquait l'ouverture de cette nouvelle rubrique (La grammaire à l'école élémentaire), il m'a semblé nécessaire de remettre un peu d'utilitaire au centre de cette grammaire qui n'a plus rien d'universel depuis la dernière attaque (qui a fait très mal) et concevoir à l'usage des enseignants d'école élémentaire un petit cours, très simple, remettant la recherche du sens au cœur de l'analyse grammaticale.

    Qualifier les compléments

    Pour classer les compléments selon leur sens, il nous faut d'abord :

    Classer les verbes selon leur sens :

    Ce classement est important car la signification d'un verbe a des conséquences sur leurs relations avec les autres mots de la phrase.

    1) les verbes d'état

    Comme leur nom l'indique, ils indiquent un état (être candidat, devenir grand, rester calme, demeurer persuadé de ceci ou cela, sembler sérieux, paraître un grand personnage).

    Les verbes d'état ne sont que six et peuvent tous être remplacés par le verbe être :

    être, paraître, sembler, demeurer, rester, devenir.

    On peut ajouter à cette liste quelques locutions verbales : avoir l'air, passer pour, ...

    Nous verrons plus tard qu'un verbe d'état ne peut pas être complété par un complément d'objet qu'il soit direct ou indirect.

    2) les verbes d'action

     Tous les verbes, exceptés les six verbes d'état, indiquent une action : courir, manger, discuter, ..., mais aussi dormir, réfléchir, apprécier, ... et autres actions sans mouvement apparent, et même recevoir, écouter, ..., où l'action visible ou audible semble faite par celui qui envoie ou qui parle.

    Les verbes d'action sont classés en deux catégories, selon qu'ils exercent ou non leur action sur quelqu'un ou sur quelque chose qui est l'objet de cette action.

     ◊ Les verbes d'action transitifs

    Lorsqu'un verbe exerce son action sur un objet (quelqu'un, quelque chose),on le qualifie de verbe transitif.

    Par exemple : Le chien attrape la balle. → la balle est l'objet que le chien attrape. ⇒ le verbe attraper est un verbe transitif.

    Ou encore : En juin, les professeurs rêvent de vacances. → les vacances sont l'objet dont rêvent les professeurs. ⇒ le verbe rêver (de) est un verbe transitif (indirect)

    Nous verrons plus tard que seuls les verbes transitifs peuvent être complétés par un complément d'objet direct ou indirect.

     ◊ Les verbes d'action intransitifs

    D'autres verbes expriment une action qui ne s'exerce sur rien de particulier, comme briller, galoper, courir, mourir, naître, aboyer, ...

    Ces verbes-là sont dits intransitifs.

    Nous verrons plus tard qu'un verbe d'action intransitif ne peut pas être complété par un complément d'objet qu'il soit direct ou indirect.

     ◊ Les verbes d'action transitifs qui peuvent être utilisés sans précision sur l'objet de l'action

    Pierre mange. Tout va bien, il n'est plus malade, lui qui ne mangeait plus se remet à dévorer !

    Dans ces phrases, les verbes manger et dévorer n'exercent pas leur action sur un objet précis.

    Il n'en reste pas moins que les verbes manger et dévorer peuvent, contrairement aux verbes intransitifs, continuer à exercer une action sur des objets multiples et variés.

    Pierre mange une assiette de pâtes. Tout va bien, il n'est plus malade, lui qui ne mangeait plus rien se remet à dévorer tout ce qu'on lui présente !

    Comme nous avons maintenant compris comment classer les verbes selon leur sens, nous pouvons nous attaquer au sens des différents compléments en commençant par le plus maltraité par la dernière attaque...

    2) Le complément d'objet

    Comme son nom l'indique, un complément, cela complète (verbe transitif qui peut être utilisé sans précision sur l'objet de l'action).

    Et que complète-t-il ? Un autre mot ou groupe de mots, forcément. En lui apportant une précision.

    Et quelle est cette précision ? L'objet, c'est écrit là, juste après le mot complément !

    Cela nous permet d'énoncer la première règle qui régit le complément d'objet :

    ◊ Le complément d'objet complète toujours un verbe !

    Son rôle, sa fonction, c'est d'indiquer l'objet sur lequel s'exerce l'action exprimée par le verbe.

    Par exemple : Le chat dévore une souris. une souris est l'objet de l'action de  dévorer exécutée par le chat. ⇒ le GN une souris est le complément d'objet du verbe d'action transitif dévorer.

    Cet exemple, et tous ceux que nous pourrons trouver d'autre (J'essuie la vaisselle. - Jules César a vaincu les Gaulois à Alésia - Les enseignants attendent les vacances avec impatience. - ...) nous permet d'énoncer la seconde règle :

    ◊ Le complément d'objet ne peut compléter qu'un verbe d'action !

    Nous avons remarqué plus haut que certains compléments d'objet sont introduits par une préposition.

    Par exemple : Mon ami pense à la prochaine rentrée scolaire. La prochaine rentrée scolaire est l'objet des pensées de mon ami. Mon ami exerce son action de penser sur la prochaine rentrée scolaire. ⇒ le GN prépositionnel à la prochaine rentrée scolaire est le complément d'objet du verbe d'action penser

    On dit que ce complément d'objet est indirect car le verbe penser a besoin de la préposition à pour introduire son complément.

    Ce qui nous amène à les troisième et quatrième règles.

    ◊ Le complément d'objet est direct lorsqu'il complète par un objet l'action d'un verbe transitif direct !

    La plupart des verbes d'action transitifs sont directs. Nous rencontrerons donc essentiellement des compléments d'objet directs.

    ◊ Le complément d'objet est indirect lorsqu'il complète par un objet l'action d'un verbe transitif indirect ! 

    Les verbes d'action transitifs indirects sont si peu fréquents qu'on peut en dresser la liste : dépendre de, douter de, habituer à, se moquer de, nuire à, s'occuper de, penser à, plaire, à, profiter de, réfléchir à, ressembler à, rêver de, se servir de, songer à, se souvenir de, tenir à.

    ◊ Quelques précisions pour les courageux :

    ♦ Le complément d'objet second :

    À ces verbes transitifs indirects, nous pouvons ajouter une série de verbes qui  sont complétés par deux objets. Le premier d'entre eux le complète directement et le second, indirectement, par l'intermédiaire d'une préposition.

    Par exemple : Jules César prive Vercingétorix de sa liberté.

    Vercingétorix est l'objet de l'action de priver qu'exerce Jules César, ce complément d'objet n'est pas introduit par une préposition, c'est le  complément d'objet direct du verbe priver

    de sa liberté est un autre objet de l'action de priver qu'exerce Jules César. En revanche, ce complément d'objet est introduit par une préposition, c'est le complément d'objet indirect du verbe priver (qu'on a pu un temps appeler complément d'objet second).

    ♦ Le complément d'attribution

    On a peu à peu classé dans la catégorie des compléments d'objet seconds un type de compléments, cousin des compléments d'objet, le complément d'attribution. On le classe désormais dans la catégorie des compléments d'objet indirects.

    Pourtant, dans l'optique d'une grammaire servant à mieux comprendre et à mieux s'exprimer, c'est un complément qui ne manque pas d'intérêt ! Surtout pour les enfants qui, comme nous le savons, aiment connaître les personnes dans l'intérêt desquelles s'accomplit une action !

    Car c'est cela dont nous informe un complément d'attribution. Il nous dit à qui est « attribué » l'objet de l'action.

    Par exemple : Le génie a donné une lampe à Aladin.

    la lampe est l'objet de l'action de donner, c'est donc le complément d'objet direct du verbe donner

    Aladin est la personne à qui le génie a attribué la lampe, c'est donc le complément d'attribution donner.

    (à un de ces jours pour tenter d'éclaircir la notion de circonstance)...

    Dans la même série :

    ... ; Qualifier les compléments (2)  ; Qualifier les compléments (3)  ; Qualifier les compléments (4)


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  • Types et formes de phrases
    Merci à Gabriel Grossi, du blog Littérature Portes ouvertes, qui m'a un peu plus convaincue
    de ce que je souhaite dire sur le sujet. 

    À l'école primaire, le but central est l'expression, orale et écrite, et la compréhension du discours, oral ou écrit. Tout ce qui est nomenclature ne sert qu'à permettre aux enfants de pouvoir nommer ce qu'ils font et comprendre un peu mieux les propos des autres en leur donnant les mots nécessaires à l'analyse du discours.

    Au CP :

    Types et formes de phrases

    Quand les enfants entrent au CP, tous ou presque ont acquis à la fois pratique et compréhension de l'intonation. Lorsque nous les écoutons parler entre eux ou avec nous, nous comprenons tout de suite à l'intonation s'ils déclarent, interrogent, intiment un ordre ou s'exclament. Nous remarquons aussi qu'ils savent, au moins partiellement, exprimer une négation ou une affirmation.

    Le CP va leur apprendre à la fois à traduire et comprendre ces nuances dans le discours écrit grâce à la ponctuation.

    C'est un fait à prendre en compte dans le choix d'une méthode d'apprentissage de l'écriture-lecture. Si toutes les phrases sont déclaratives, si la négation n'est qu'à moitié exprimée, sous prétexte de « coller au langage oral », l'enfant aura plus de peine à intégrer ce nouveau système et à s'en servir lorsqu'il lit ou écrit.

    Dans le cadre d'une méthode bien faite, c'est-à-dire donnant de nombreuses occasions de lire et d'utiliser les signes de ponctuation, les enseignants ont de multiples occasions de parler et de faire parler de points d'interrogation, grâce auxquels nous interrogeons, de points d'exclamation, grâce auxquels nous nous exclamons et de points (normaux, tout simples, ...) qui nous servent à déclarer quelque chose. Ils introduisent ainsi un vocabulaire indispensable à la communication autour des écrits lus et surtout produits par la classe ou, vers la fin d'année, par les enfants.

    Cette notation écrite de l'intonation mène parfois hélas certains enseignants désemparés à faire travailler la ponctuation en lecture de manière mécaniste, à l'aide de leçons à appliquer sans comprendre (comme, à titre d'exemple à ne surtout pas suivre : « Quand je vois un point d'interrogation, je « monte la voix » et je compte mentalement jusqu'à trois avant de continuer à lire. » et autres billevesées du même style) ou de flèches tracées au-dessus des mots, pour « aider les élèves »... à n'acquérir d'autonomie que s'ils ont la chance d'avoir autre chose que l'école pour apprendre à bien lire et aimer lire !

    Aux CE1 et CE2 :

    Partant de cela, le CE1, puis le CE2, suite du CP au niveau de la lecture, continueront à travailler cette compréhension sensible des types/formes/genres/classes/espèces/sortes/états/tournures/aspects/tours/styles de phrases.

    Si cela n'a pas déjà été entamé au CP, l'enseignant pourra commencer à travailler l'écriture de la phrase déclarative : « Quand je veux déclarer quelque chose, je commence ma phrase par une majuscule et je la termine par un point. »

    Il pourra le faire à l'aide de phrases à remettre en ordre dans lesquelles les mots de début et de fin de phrase sont déjà marqués de leur majuscule ou de leur point (ex : Le - la - la - leurs - forêt. - bûcheron - enfants - bûcheronne - dans - et - abandonnent). Il pensera à systématiquement signaler ou faire signaler par les enfants dans toutes les phrases qu'il dictera ou qu'ils écriront ensemble au tableau.

    Chaque jour, au cours de la lecture collective à voix haute, il fera remarquer l'intonation qu'a prise, ou n'a pas prise, l'élève qui a lu telle phrase exclamative ou interrogative, emploiera le vocabulaire découvert au CP ou mis en place de manière systématique depuis le début de l'année : ponctuation, point (normal), point d'interrogation, point d'exclamation, phrase déclarative, phrase interrogative, phrase exclamative ; marque de la négation (les lunettes de Petit Non), phrase négative, phrase affirmative.

    Si l'enseignant s'attache à faire lire chaque jour à ses élèves, à voix haute, des textes signifiants, ce vocabulaire grammatical sera bien vite enregistré. Il sera complété par :

    ⇒ des séances de grammaire-conjugaison pendant lesquelles on travaillera explicitement : la forme négative, la forme affirmative, la forme interrogative

    ⇒ des travaux collectifs de production d'écrit, en français (créations de contes, récits, comptines, poèmes collectifs, rédaction de lettres collectives, comptes-rendus), mais aussi en QLM (rédaction de résumés, de comptes-rendus) et pourquoi pas mathématiques (résolution et invention de de problèmes, description de figures complexes) permettant à l'enseignant de réemployer le vocabulaire grammatical acquis pour en faire un vocabulaire vivant, utile à la vie de tous les jours

    C'est ainsi que nos élèves devraient arriver au Cycle 3 et aborder (ou pas) ces fichus types et formes de phrases !

    Aux CM1 et CM2 :

    C'est là qu'à la page 22 du programme de Cycle 3, quatre malheureuses demi-lignes ont mis le feu aux poudres :

    Types et formes de phrases

    complété quelques pages plus loin par l'utilisation des mots types et formes dans la liste de la terminologie utilisée (et non, nuance, à utiliser) :

    Types et formes de phrases

    Et là, que faire ?

    ♥ Pour commencer lire très attentivement l'article en lien : Types et formes de phrases : quelles différences ?).

    Il explique très clairement ce qui s'est passé et pourquoi on a chamboulé quelque chose qui donnait toute satisfaction à beaucoup de monde.

    ♥ Et ensuite, trois voies sont possibles :

    ◊ Adopter Picot (et John L. Austin) et utiliser désormais l'approche énonciative même si nous n'avons pas l'impression de vraiment comprendre comment nous expliquerons aux enfants que telle phrase qui se termine par un point d'interrogation est une phrase de type interrogatif mais de forme exclamative

    ◊ Ou se dire, avec Gabriel Grossi (et Noam Chomsky) que pour l'école primaire, après tout, l'approche syntaxique, qui se base sur l'étude de la ponctuation reste quand même bien plus simple

    ◊ Ou enfin, troisième voie, toute simple, ne pas employer le mot type et n'utiliser le mot forme que lorsqu'on parle de faire passer une phrase de la forme négative à la forme affirmative ou encore de mettre tel ou tel verbe à la forme interrogative ?

    J'avoue honnêtement que c'est de loin la troisième voie que je choisirais.

    En effet, sachant que dans la plupart des documents qu'on trouve sur Internet, et que les professeurs de collège utilisent, c'est l'approche syntaxique qui est utilisée dans la distinction entre types et formes de phrases, que les manuels de 6e (Fleurs d'encreInvitation au voyageL'Attrape Livres) que j'ai consultés en ligne n'abordent carrément pas cette distinction ou n'y consacrent qu'une leçon, très brève et visant clairement plus l'expression orale qu'autre chose, rien ne sert de chercher à obtenir de nos élèves de Primaire qu'ils apprennent par cœur, sans rien y comprendre, les thèses de l'approche énonciative.

    Cette dernière, beaucoup plus proche, comme le souligne Gabriel Grossi dans son article, de l'analyse de l'acte de langage que d'une analyse grammaticale, pourra par ailleurs, toujours sans parler de type ni de forme être abordée en lecture lorsque nous analyserons avec nos élèves les propos des protagonistes du récit : « Que pensez-vous de la phrase où le maître demande aux élèves « Pouvez-vous baisser les stores ? » Les interroge-t-il vraiment ou leur donne-t-il un ordre poli ?... Et là, lorsque les parents s'étonnent de retrouver la cuisine sens dessus dessous et qu'ils disent : « Comment cela a-t-il pu se produire ? » en regardant leurs enfants d'un œil soupçonneux, ne croyez-vous pas qu'ils ont déjà une petite idée et que cette phrase est plus un cri de colère qu'une véritable question ?...»

     Le temps que nous gagnerons à ne pas dresser de liste exhaustive des types et formes de phrases pourra alors être utilisé à faire pratiquer aux élèves :

    ⇒ l'interrogation avec inversion du sujet, aux temps simples, qui est souvent encore délicate pour les enfants les plus éloignés de la culture littéraire

    Exemples : Manges-tu de bon appétit ? Serez-vous chez vous ce week-end ? Soprano est-il votre chanteur préféré ?

    ⇒ cette même interrogation avec inversion du sujet aux temps composés, ce qui est souvent délicat pour tout le monde, même au CM2

    Exemples : Avez-vous remarqué cet oiseau ? Étiez-vous souvent sortis de votre quartier ? Les chevaliers français furent-ils vaincus par les archers anglais ?

    ⇒ l'interro-négation, encore plus compliquée, même pour certains adultes

    Exemples : N'aimeriez-vous pas nous rejoindre à la plage cet après-midi ? N'as-tu jamais envisagé de faire contrôler ta vue ?

    ⇒ et, cerise sur le gâteau, parce que nos élèves auront beaucoup lu à voix haute et commenté leurs lectures, l'interrogation indirecte où là, nous retrouverons un concept où l'approche énonciative trouve toute son utilité

    Exemples :

    Je me demande si cet article vous a rendu service.

    J'aimerais savoir ce qui vous semble peu clair dans l'enseignement de la grammaire.


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