11.11.06
l'âme des jardiniers
Mon amie Still a ouvert a cette adresse un nouveau blog consacré à son jardin. Comme Dame Still est une de ces enchanteresses avisées qui savent offrir aux miracles une attention patiente et tenace, je n'ai aucun doute sur la reconquête de son jardin.
Mais la lecture de son blog m'amène à deux observations:
La première, c'est que tout jardin a son, voire ses objets persécuteurs. Chez Still, lierre et clématite.
Chez moi, ce sont les bambous, qu'une main criminelle planta en liberté non surveillée, et d'immondes petites fleurs blanches à parfum d'ail.
La deuxième reflexion découle sans doute de la première: seuls les citadins sans verdure croient l'âme jardinière bénigne, paisible et dénuée de rancoeur. Ceux-là sont bons pour s' aller voter, aux prochaines élections, pour le candidat le plus altruiste.
L'âme jardinière est un humus, nécessitant le compostage de sentiments âcres et violents pour que surgisse la légèreté. Le jardinier sait que les ennemis le guettent, qu'ils sont partout, sous la terre, dans le vol d'un oiseau qui fera choir la graine honnie. Le jardinier, civilisé, taira son monologue, qui restera intérieur.
Mais , franchement, ce que cet homme tranquille, ce que cette femme sereine est capable de lâcher comme bordée d'injures basses et crapuleuses à l'adresse d'une adventice un peu plus sournoise qu'une autre, ce déferlement de haine à l'egard d'une racine obtuse, ce hurlement silencieux de victoire quand on brandit la tête, euh non, la queue de l'adversaire...
Ceux-là mêmes qui prônent la négociation en toutes circonstances, les avez-vous vu partir, la bêche -ou la pioche à l'épaule, quand le cas est grave- avec un rictus que ne démentirait pas Gouvernator? Encore heureux que certains d'entre nous résistent à la tentation de la guerre chimique. Pas tous hélas.
Et je ne parle pas de l'envie. Ni de l'hypocrisie.
De la luxure peut-être, quand après toutes ces turbulences du coeur jardinier, on froisse la menthe dans ses doigts, ou bien l'étonnante feuille du dimorphoteca qui sent le poivre et la mer...
Moyennant quoi, les jardiniers sont des gens charmants.
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6 commentaires:
Ce billet évoque pour moi les querelles des jardiniers de mon enfance, qui mangenr aujourd'hui les pissenlits par la racine, selon leur propre expression.
Le premier à avoir des tomates, celui dont les pommes de terre étaient plus belles que celles des autres, celui dont le chat avait déterré les semis... je revois mon Papy fulminer, lui habituellement si paisible. Et il en reparlait encore, le lendemain, voire des années plus tard : "ah, qu'est-ce qu'il a fait le malin, Marcel, l'année où ses tomates ont mûri avant tout le monde!"
(merci anita)
Moi j'ai toujours admiré les jardiniers. Dieu, ce qu'il faut de patience et d'amour pour maîtriser un peu cet art ! D'ailleurs, face aux caprices de Dame Nature, le maîtrise-t-on jamais ?
On ne peut pas maîtriser la nature... On peut tout juste composer avec elle, quand elle est consentante... Et quand elle ne consent pas et qu'il reste quelque chose de l'âme pionnière ( ou d'une amicale et ferme pression du voisinage terrifié par l'Amazonie en train de se développer sous leurs yeux), la lutte est aussi âpre que tu le dis .
Pour ta récompense , promis demain je poste cette fleur blanche odorante...juste pour bien identifier l'ennemi. WANTED!
Anitta: Un bon humus est , comme le disait recemment Moukmouk, un composé bien tempéré. Alors oui, il y a ussi de l'amour. Et très souvent de la générosité.
Samantdi: je connais trois lieux qui réveille d'insoupçonnés MR Hyde: le jardin, la cuisine et ...le pont d'un voilier!
Moukmouk: tu me rappelles une phrase de Vigneault: "comment laisser tourner le monde, tout en restant un bon voisin?
Still: nous sommes les Robin des Jungles. C'est pour les plus faibles que nous nous battons! Bon,d'accord. c'est aussi pour les plus fleuries...
reveillent, bien sûr.
Mais c'est un superbe texte ! ^_^
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