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Championnats d'Europe de judo: Agbégnénou, nouvelle formule

A moins d’un an des Jeux olympiques, la sextuple championne du monde et quintuple championne d’Europe monte sur cet Euro à Montpellier pour marquer psychologiquement la concurrence continentale. La Rennaise a prévu de changer son plan de bataille.

En foulant le tatami de Montpellier, Clarisse Agbégnénou se rappellera peut-être que c’est là qu’elle a initié sa première période domination sur les moins de 63 kilos. Un deuxième titre européen avant son premier or mondial. Sa deuxième ère après Rio 2016 la verra prendre quatre titres mondiaux et le graal olympique. A-t-elle entamé un troisième mandat de règne sur sa catégorie depuis qu’elle est maman ? La compétition continentale devrait permettre de savoir où elle se place.

Nous sommes restés baba devant son chef d’œuvre de Doha en mai. Pas un tour de magie. Onze mois seulement après la naissance de sa fille, Athéna, elle ciselé son sixième sacre mondial avec la rage. Après trois premiers tours accrochés, elle a piétiné la concurrence avec la même assurance pré-grossesse. En août, au Masters à Budapest, elle livre deux grosses batailles face aux Japonaises Nabekura puis Takaichi. Ça passe sur la première, pas contre la deuxième au bout d’un duel de 9 minutes irrespirables. Elle conclura tout de même avec un bronze qui lui a laissé un grand sourire et des axes de travail. Judo, jiujitsu-brésilien et ‘mouvement’ sont toujours à son menu. Elle a haussé le curseur physique.

"Je me suis dit que je devais démarrer plus fort mes combats. Je mets moins d’impact physique que par le passé, je tâtonne, je jauge. Si tu fais ça tu cours derrière au score à cause des pénalités. Si je mets cette forte intensité l’adversaire ne tiendra pas", annonce-t-elle. En mode Mike Tyson ! A la manière d’une Audrey Tcheuméo capable d’inscrire l’adversaire dans le tatami dès la première minute, dès la première séquence. Plus question donc de laisser les combats s’éterniser. La capacité à finir est prépondérante dans des journées bien fournies en combat. Laisser des plumes dans un golden score (prolongation), c’est autant d’énergie en moins au tour suivant.

"Je vais chercher de la sérénité, me jauger"

Manon Deketer, troisième des Mondiaux 2022 (en l’absence d’Agbégnénou), revient d’une rupture des ligaments croisés. D’ici Paris 2024, la concurrence sera internationale. "L’envie est revenue", clame-t-elle ce mardi d’octobre sur le tatami de l’Insep. A Montpellier, Agbégnénou va avoir de quoi tester ses nouvelles armes. La Kosovarde Fazliu, numéro une mondiale, la Britannique Renshall, l’Israélienne Sharir, la Portugaise Timo. Il ne manquera aucune fille forte à l’appel. Fazliu a battu la Française lors de sa première compétition individuelle d’après grossesse. Elle avait célébré ce succès comme on fête une médaille. Depuis, la jeune femme aux cheveux courts a pris une autre dimension en gagnant le Masters grâce à sa poigne d’airain.

Agbégnénou n’est pas du genre à tendre deux fois la joue : "Je vais chercher de la sérénité, me jauger, mettre les pendules à l’heure et surtout leur mettre un impact psychologique ce serait bien. Ce serait bien de gagner en ayant mis un impact physique comme ça les filles se diront ‘elle est revenue, ça va être très compliqué’." Elle avoue qu’elle doit toujours jongler avec de bonnes doses de fatigue. Le régime aussi est un tout petit plus compliqué avec un kilo supplémentaire à faire disparaître au moment de la balance. Après Montpellier, on ne le reverra à l’ouvrage que début 2024 au tournoi de Paris. La saison prochaine ne sera vraisemblablement pas sa dernière. Ses derniers JO oui mais pas le point final de sa carrière maousse.

A 30 ans, elle garde l’esprit léger sachant bien quel lièvre est le plus important à courser. Elle ne parle pas de sa 17e place mondiale qui ne lui offre pas pour le moment un statut de tête de série. Le viseur est posé sur le 30 juillet 2024 : "la seule chose grave ce serait de perdre aux JO. Cet Euro ce sont des prises d’informations, de l’entraînement. Si je perds tout avant les JO et que je gagne à Paris ça me va. L’objectif c’est d’y arriver prête et opérationnelle." Le rendez-vous montpelliérain va regorger d’informations pour le logiciel Agbégnénou. En attendant la prochaine mise à jour.

Morgan Maury