4B a2 : la rubrique des copinautes 2☻�

Comme je suis enseignante, j’attends toujours les grandes vacances d’été pour me refaire, mentalement et physiquement, une santé. Pourtant, en 1986, ce n’est pas sans appréhension que je vois arriver cette longue période de « remise en forme » car, pour la première fois, je vais devoir la passer seule. Alors, je décide de partir 2 mois pour la France où je me sens tellement chez moi. Je divise le mois de juillet entre une retraite dans un foyer de charité à Stressaint, en Bretagne et un séjour de trois semaines chez mon amie, Maximilienne, à Domfront, en Normandie. Au début du mois d’août, je rejoins Ars où je retrouve un groupe belge afin d’y vivre un grand rassemblement de chrétiens, venus d’un peu partout, pour écouter  les plus fameux orateurs du Bon Dieu. C’est une grande fête que ce rassemblement d’Ars, on y attend quelques huit mille personnes et celles qui n’ont pas su se loger au village ont une immense prairie à leur disposition où elles peuvent camper sans problèmes. Tel est mon cas… A Ars, je fais la connaissance de Jean Vanier, fondateur de « l’Arche », institution comptant des communautés pour handicapés psychomoteurs graves, disséminée sur tous les continents. J’y rencontre aussi Danièle Bourgeois, venue du Canada, pour présenter sa communauté de personnes divorcées, de plus j’y noue de solides amitiés. Mais la cession d’Ars ne dure que cinq jours et j’ai encore plus de trois semaines de vacances devant moi. C’est maintenant que commence mon aventure en solitaire…

Quand je prends le volant, ce matin-là, je n’ai qu’un seul désir : partir vers le Sud qui regorge d’endroits plus fabuleux les uns que les autres, je dispose d’une bonne carte de France et d’une liste de campings, je mets donc le cap sur le Sud, pour rejoindre Lyon. En traversant Lyon je remarque la direction « Grenoble », je ne suis encore jamais passée par là…cap sur Grenoble ! Avant que Rik ne me quitte, je me déplaçais en Land Rover, mais aujourd’hui, séparation oblige, j’ai troqué la Land, qui tirait notre caravane, pour une petite Renault 4 L d’occasion, offerte par Rik, ce qui me donne l’impression de rouler avec une voiture miniature mais je m’en fiche.

Entre Lyon et Grenoble, j’ai le temps de m’interroger sur ma destination et comme j’en ai l’habitude, c’est au Bon Dieu que je pose la question :

-« Nous allons où, Seigneur » ?

-« Villars de Lans »

Cette réponse fuse immédiate et précise dans mon cœur. Villars de Lans, c’est où, c’est quoi ? Cet endroit m’est parfaitement inconnu et pourtant il me semble le connaître ! Priorité des priorités : je parque ma voiture quelque part et je regarde la carte…oui, là,  avant d’arriver à Grenoble, je dois prendre à droite et ce n’est pas bien loin, de plus, comme par hasard, il y a un camping, et j’y serai cet après-midi ! Pleine d’enthousiasme, je me remets en route. Je me suis déjà bien rapprochée de Grenoble, quand je remarque un gros nuage blanc semblant se dégager de l’arrière de mon véhicule… je reste incrédule.   

                                                -"Quoi, ma voiture à moi oserait faire des fantaisies" ?
                                                  Oups, deuxième nuage blanc :

                                                -« Mais ce n’est pas possible qu’un ennui m’arrive

                                                     maintenant" ?

                                                      Oups troisième nuage :

                                                 -« Est-ce vraiment bien moi qui dégage ces

                                                      nuages » ?    

                                                     Oups, nuage suivant : « Mais que vais-je

                                                     devenir » ?

                                                     Nuage suivant :

                                                 -« Pas de doute je vais tomber en panne » !

                                                     Au suivant :                                                                                   

                                                 -« Si ça se trouve, j’arriverai au camping en pleine nuit » !

                                                     Nuage suivant :

                                                 -« En tout cas, Bon Papa, tu vas m’aider, dis » !

Et je continue de rouler avec mes énormes bouffées blanches par derrière… Je roule en tout un bon quart d’heure dans l’inquiétude, en faisant, tel un indien, mes signaux de fumée répétitifs et comme je tiens mon rétroviseur à l’œil, j’y aperçois soudain une 4 L orange encore loin derrière moi :

-« Pas de doute, voilà un véhicule du Touring-club, je vais ralentir et quand, il sera plus près, je mettrai mes signaux de détresse ».

Le Touring-club reste derrière moi et je me lance sur le premier parking qui se présente, le Touring-club me suit et arrête son engin près d’un petit poteau orange. Un homme en salopette orange sort du véhicule et se met à chipoter au petit poteau assorti à sa tenue, puis il se dirige vers moi qui, remplie d’espoir, l’attends, impatiemment.

-« Vous avez des problèmes, madame » ?

-«  N’avez-vous donc pas remarqué les nuages que fait ma voiture » ?

-« Si bien sûr, voulez-vous de l’aide » ?

-« Je vous en prie, monsieur » !

Et voilà que la salopette orange retourne au poteau orange pour parler dedans…

Puis, le monsieur revient vers moi et me dit alors :

-« C’est réglé, un garagiste va venir vous dépanner, il vous faudra attendre une petite demi-heure au plus, ça vous va » ?

-« Mais enfin, monsieur, ce n’est pas vous qui allez réparer ma voiture » ?

-« Ce n’est pas moi, madame, mais un garagiste qui va venir vous aider».

-« Mais dans ce cas, monsieur, que faites-vous » ?

-« Moi ? Je répare les bornes téléphoniques. Ne vous tracassez plus, on va vous dépanner. Au revoir, madame ».

Je suis trop estomaquée pour éclater de rire en réalisant ma comique méprise c’est en attendant le garagiste que je me rends compte à quel point la Providence m’accompagne et que ce qui vient d’arriver est à peine croyable.

La Providence… n’est-ce pas le visage de Dieu quand Il se fait Mère ?

Cily