Jean Baptiste Willermoz photo Wikipédia

La désignation d'une loge comme "juste et parfaite" est une tradition remontant aux origines de la franc-maçonnerie.

En examinant les anciens catéchismes britanniques, on trouve l'expression "true and perfect Lodge" dès 1696 à Édimbourg, ainsi qu'en Irlande et en Angleterre, selon les "Early masonic catechisms" de Knoop, Jones et Hamer publiés en 1943.

Cependant, la situation se complique du fait que le grade de maître n'apparaît dans les premiers documents qu'en 1725. Avant cette date, il n'y avait que deux grades, ce qui rend les critères de ce qui constitue une loge "juste et parfaite" moins clairs. Ce court exposé vise à démontrer deux points. Premièrement, à aucun moment, dans aucun rituel ou instruction, ancien ou moderne, il n'est indiqué que sept maîtres sont nécessaires pour qu'une loge soit considérée comme "juste et parfaite". Deuxièmement, dans le rite écossais rectifié, la qualification de "juste et parfaite", selon un document de Willermoz, semble relever d'un domaine différent, plutôt que d'un simple comptage quantitatif et hiérarchique.

Voici quelques traductions des catéchismes britanniques post 1725:

Combien font une loge vraie et parfaite ?

Sept.

En quoi consistent-ils ?

Un maître, deux surveillants, deux compagnons et deux apprentis. (Willkinson MS (1726))

Qu’est-ce qui fait une loge juste et parfaite ?

Sept ou plus.

En quoi consistent-ils ?

Un maître, deux surveillants, deux compagnons et deux apprentis. (Masonry Dissected (1730)

On remarque qu'il est toujours question que de 3 maîtres, le nombre sept est complété par des compagnons et des apprentis.

Qu'en est-il en France?

On peut lire dans le catéchisme des franc-maçons de 1745

Combien faut-il de personnes pour composer une loge ?

Trois la forment, cinq la composent, et sept la rendent parfaite.

Qui sont ces sept ?

Le Grand-Maître, le premier et le second Surveillant, deux Compagnons et deux Apprentis.

Qui compose cette Loge juste et parfaite ?

3, 5 et 7 ; savoir, un Maître Vénérable, 2 Surveillants, 2 Compagnons et 2 Apprentis.                                                            (ici il s'agit du sceau rompu de 1747)

Toujours en 1747 le Nouveau catéchisme des Francs-Maçons précise la progression 3-5-7 :

Combien y a-t-il de sortes de Loges ?

Trois, savoir, la simple, la juste et la parfaite.

Qui compose la Loge simple ?

Trois, un vénérable, et deux Surveillants.

Qui compose le juste ?

Cinq, un Vénérable, deux Surveillants, un Maître et un Apprenti-Compagnon.

Qui compose la parfaite ?

Sept, un Vénérable, deux Surveillants, deux Maîtres, et deux Apprentis-Compagnons.

La progression de l'état simple à juste et à parfait est clairement expliquée.

Nous conclurons ici ce rappel historique. Cependant, comme mentionné dans l'introduction, il n'existe en effet aucune référence, dans aucun rite ou instruction, passée ou présente, stipulant la nécessité de sept maîtres pour constituer une loge juste et parfaite. Nous allons maintenant découvrir que Willermoz avait une approche totalement différente de la loge juste et parfaite.

Qu'en est-il du rite écossais rectifié?

Le texte que nous utilisons aujourd’hui dans les loges pratiquant le rite écossais a été codifié au Convent de Lyon, en 1778.

Où avez-vous été reçu ?

Dans une loge juste et parfaite, où règnent l’union, la paix et le silence.

Qu’entendez-vous par une loge juste et parfaite ?

Trois la forment, cinq la composent et sept la rendent juste et parfaite.

À Wilhelmsbad en 1782, rien n'a été changé.

Aucune précision n'a été donnée sur une organisation quelconque selon fonction et grade.

Cependant, dans l'Instruction secrète de J.-B. Willermoz, page 1038, on trouve des réflexions qui diffèrent des précédentes. Voici un texte qui repositionne la problématique de la loge juste et parfaite, non pas sur un simple comptage quantitatif et hiérarchique des membres présents, mais sur des considérations spirituelles symbolisées par les nombres trois, cinq et sept, marquant un véritable changement de perspective.

Pour saisir la pensée de Willermoz, il est à noter que la phrase "trois la forment, cinq la composent et sept la rendent juste et parfaite" évoque une formule alchimique.

Les qualificatifs "juste" et "parfaite" sont très évocateurs. Il est difficile de les réduire à une simple question de comptage quantitatif et hiérarchique des personnes présentes.

Lorsqu'on interroge un maçon sur le lieu de sa réception, il répond : dans une Loge juste et parfaite ; trois la forment, cinq la composent, sept la rendent juste et parfaite. Cette réponse est ancrée dans la science fondamentale. Cependant, les maçons modernes qui ont essayé de l'expliquer par des définitions conventionnelles n'ont pas réussi à fournir une explication satisfaisante, et on ne peut la trouver qu'en revenant à l'initiation de la Franc-Maçonnerie elle-même. Elle enseignait que la Loge où l'homme a été reçu est sa propre forme corporelle, qui est le Temple de son intelligence. Cette forme, qui portait à l'origine le nombre trois, porte aujourd'hui, par une transmutation néfaste, le nombre cinq, abstraction faite de toutes les puissances vivantes qui lui sont associées. Mais ce nombre n'est présent que par l'union du deux et du trois. Le nombre trois exprime spécialement les trois principes simples et fondamentaux de toute corporéité, nommés soufre, sel et mercure, d'où le corps humain tire son origine, comme tous les autres corps de la nature élémentaire.Ces trois Principes se manifestent dans les différentes substances qui composent le corps, et il est juste de reconnaître la présence du soufre ou du feu dans le fluide nommé sang ; celle du Principe sel ou eau dans les tissus mous ou insensibles ; et celle du mercure ou terre dans les parties solides ou denses. Dans ce sens précis, ces trois éléments forment l'enveloppe matérielle de l'homme. Toutefois, elle resterait inanimée sans les nerfs et les muscles, qui sont les organes de la sensibilité et du mouvement, jusqu'à ce qu'elle reçoive un principe capable de l'animer... (En lien avec Job 10:10 et suivants). Il est donc exact de dire que cinq éléments composent l'enveloppe de l'homme. Néanmoins, elle n'est encore qu'une enveloppe inerte sans vie ni mouvement, et seul le nombre sept peut la rendre complète et parfaite. L'âme passive, bien connue par le nombre six qui lui est attribué, vient lui conférer la vie passive... (ici se trouvent des références au second degré). Enfin, le nombre sept, celui de l'Esprit ou de l'Intelligence, vient parfaire l'enveloppe. C'est le nombre du maître ; c'est l'acte de repos ou septénaire qui caractérise la formation spécifique de l'homme. Car une Loge ou un Temple implique nécessairement la présence d'un être supérieur pour l'occuper... (s'ensuit l'explication du sept comme étant six plus un).

ET

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