Le visage de Caitlin Mitchell apparaît sur l’écran de l’ordinateur. En ce mois de février 2021, la pandémie de Covid-19 n’a pas fini de faire des ravages, les frontières des Etats-Unis sont toujours bouclées et la rencontre avec l’experte américaine en stratégie politique numérique n’a pas pu se faire en présentiel. Après tout, quoi de mieux qu’une « visio » pour parler de campagne virtuelle ?
Côté français, le « steering committee » (comité de pilotage) de La République en marche : ce groupe informel rassemble autour de Stanislas Guerini, le délégué général du parti, plusieurs personnalités chargées de préparer la présidentielle 2022. Autour de la table se réunissent tous les vendredis l’ancienne communicante de l’Elysée, Sibeth Ndiaye, le député européen Stéphane Séjourné, les numéros deux du parti, Jean-Marc Borello et Marie Guévenoux, ou encore le député Roland Lescure… C’est ce dernier, élu de la circonscription des Français d’Amérique du Nord, qui a organisé le rendez-vous.
Ces proches d’Emmanuel Macron sont tout ouïe. Et pour cause, Caitlin Mitchell est auréolée d’un beau palmarès. En tant que conseillère principale de la campagne numérique de Joe Biden, elle a fait partie de l’équipe qui a défait à son propre jeu, celui des réseaux sociaux, l’ogre Donald Trump et son compte Twitter suractif aux 90 millions d’abonnés. La jeune femme déroule son mantra pour établir la « conversation » avec les électeurs hésitants. Une gageure, notamment en période de pandémie de Covid-19, alors que les campagnes américaines reposent habituellement sur le porte-à-porte et des armées de volontaires. « C’est le défi majeur des réseaux sociaux, résume Roland Lescure. C’est extrêmement facile de parler à la bulle de vos soutiens, c’est assez facile de parler à la bulle adverse, mais ce n’est pas là que l’élection se fait. La question est de savoir comment on essaie de rejoindre les bulles intermédiaires, où se situent les indécis. »
Boucles WhatsApp, Telegram, posts Facebook, Messenger, TikTok, Instagram… tous les réseaux sociaux sont bons pour entretenir cette « conversation ». Tous ou presque… Twitter manque à l’appel. Ce réseau social est pourtant le plus politique. Sauf qu’il est resté le terrain de jeu de Donald Trump jusqu’à sa suspension, le 8 janvier 2021, à la suite de l’assaut du Capitole. Et pour les démocrates, il n’est plus qu’un lieu de « clashs ». Impossible d’y dialoguer.
« Sur Twitter, plutôt que de répondre directement aux provocations et de rentrer dans les polémiques, les démocrates en ont profité pour diffuser une communication positive sur leurs propositions », explique Roland Lescure. Une tactique de l’esquive assumée. Dans un article intitulé « Comment l’équipe numérique de Joe Biden a dompté l’Internet MAGA » (du slogan trumpien « Make America Great Again ») publié début décembre 2020, le New York Times liste, parmi les enseignements de la campagne numérique de Joe Biden, celui-ci : « Eteindre Twitter ».
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