Le blogue de Robert Rapilly

Un voyage d'envers / L'encrier revanche

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Un voyage d'envers, à paraître le 21 novembre à la Contre-Allée, est une histoire composée en sept ans, cosignée Philippe Lemaire découpeur-colleur des somptueuses ambimages. Ce retour d'El Ferrocarril de Santa Fives célèbre la rencontre du métallo lillois Manuel Mauraens et de l'Indienne inca Abipone Lules. C'est peu dire que, depuis 2011, auteurs et maison d'édition avons grandement misé en ce Voyage.

                 

Patience et longueur de temps ici, force et rage là. L'espoir éditorial luit.

Auparavant, 9 novembre, L'encrier revanche sera un pantoum à la gloire des bousilleurs. Soufflé et taillé sans pause en sept semaines aux éditons Invenit, l'ouvrage imite l'art du verre. Recueil à "réalité augmentée" vertigineuse : en tournant les pages, nous manipulerons l'encrier en 3 dimensions pendant que la musique hyaline de Lætitia Gallego & Martin Granger estampera nos tympans par le cornet du smartphone.

                   

Nota bene — Le calendrier ci-dessous sera complété au fur et à mesure des lectures, causeries et concerts...

  • Samedi 10 novembre 2018 à partir de 16 heures, lecture d'extraits de "Un Voyage d'Envers" lors d'une exposition des ambimages de Philippe Lemaire à L'Espace du Dedans, 28 rue de Gand à Lille.
  • Vendredi 16 novembre à 18 heures au MusVerre de Sars-Poteries, concert de l'Humeur Vitrée et lecture de "L'encrier revanche" par RR.
  • Dimanche 18 novembre à Villeneuve-d'Ascq, Philippe Lemaire et Robert Rapilly serons présents au salon du livre de l'Espace Concorde.

El Dochadides

Les mots, du moins les idées, apparaissent en ordre inverse du Desdichado. Un exercice fluide et plaisant : réciter l’original en survolant à rebours celui-ci, où dansent boum boum de légères chevilles.

Quand la fée a crié, la sainte à demi-voix
depuis l’orphique lyre à son tour y nuance
que, l’Achéron franchi, vainqueur j’allai deux fois
où la sirène nage ; en sa grotte, ma transe.

La reine, d’un baiser, m’empourpre le minois ;
je suis Léon d’Uzès ou l’évêque Constance
alliant rose et pampre ainsi qu’un vin de noix
dont, désolé, mon cœur prise l’efflorescence.

Romain Pausilypon, me reviens-tu d’au loin ?
Secourable sois-tu lorsqu’en ma tombe terne
la mélancolie ombre un noir soleil en berne !

En constellant ce luth, feu mon astre orphelin
vit abolir la tour d’Aquitaine. Et moi, Lige
inconsolé, car veuf et ténébreux, qui suis-je ?

Toumpan Moby Dick

Nommons "toumpan" la forme de ce pantoum rétrograde, dont les rimes s’ordonnent :
aFaF — BaBa — cBcB — DcDc — eDeD — FeFe
En lisant à voix haute, on devrait ressentir un effet voisin, cependant distinct de celui du standard pantoum. La trame ici reprise vient du poème La Montagne, page 246 du "Petit traité de poésie française". Implorons l’indulgence de Théodore de Banville, qui aurait sans doute désapprouvé la distribution inusitée des rimes : du quatrième vers d’une strophe au premier de la suivante, il n’y a pas d’alternance du genre des rimes.

Post-scriptum en me relisant deux mois plus tard / Exactement inverse de l’effet crescendo du pantoum, j’éprouve en relisant ce "Toumpan Moby Dick" une sensation d’effacement au fil des strophes : les vers apparaissent, s’estompent, disparaissent.

Cachalot de force et d’esprit
Tête d’étrave et flot céleste
Tout un océan le nourrit
C’est Moby Dick qu’un harpon leste

Où la nef au couchant s’illune
Cachalot de force et d’esprit
Le géant domine la hune
Tout un océan le nourrit

Dans les feux d’inquiet duel
Où la nef au couchant s’illune
Gloire d’un défi mutuel
Le géant domine la hune

L’oracle tourmentait l’abysse
Dans les feux d’inquiet duel
Dont la pâleur sourde surgisse
Gloire d’un défi mutuel

Oyez ce grondement amer
L’oracle tourmentait l’abysse
D’Achab dessous dessus la mer
Dont la pâleur sourde surgisse

Tête d’étrave et flot céleste
Oyez ce grondement amer
C’est Moby Dick qu’un harpon leste
D’Achab dessous dessus la mer

Fatrasie prototype écrite la veille. L’absence d’un sens suivi permet immédiatement de tourner un pantoum en toumpan (et réciproquement) : par l’inversion des strophes, lues de la fin au début.

Fanfare sans tambour ni fifre ni trompette
Cornerez-vous parfois vos hymnes assourdis
Dont ne jodle nul cri que l’écho ne répète
Du haut d’un belvédère entre quatre jeudis

Colonne d’air ou peau pour engourdissement
Fanfare sans tambour ni fifre ni trompette
Au plaisir d’orchestrer une pause qui ment
Dont ne jodle nul cri que l’écho ne répète

Que glisse la pavane aux défuntes cadences
Colonne d’air ou peau pour engourdissement
Ô valse sous la piste où syncopé tu danses
Au plaisir d’orchestrer une pause qui ment

Ton rigaudon fourbu craint-il du rossignol
Que glisse la pavane aux défuntes cadences
Sur dissonante pente elle y descend du sol
Ô valse sous la piste où syncopé tu danses

Galops ad libitum des chevaux qu’on achève
Ton rigaudon fourbu craint-il du rossignol
Que la note de fin soit rhapsodie ou brève
Sur dissonante pente elle y descend du sol

Cornerez-vous parfois vos hymnes assourdis
Galops ad libitum des chevaux qu’on achève
Du haut d’un belvédère entre quatre jeudis
Que la note de fin soit rhapsodie ou brève

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