Échouer tôt pour réussir vite

Une idée géniale, un financement récolté facilement, une réalisation optimisée et efficace, une mise sur le marché dynamique avec un marketing percutant et au final, un monumental flop. Lorsque l'on se pose la question de savoir pourquoi tant de start-ups ou de projets d'entreprise ont abouti à ce triste résultat, on se rend compte que paradoxalement, c'est dû à la culture du succès. En étant littéralement obnubilé par tout ce qui peut optimiser une idée, y compris en accélérant sa production, on va ainsi oublier tout ce qui peut la faire échouer. Prenons l'exemple extrêmement simple de refonte d'un site web dans un schéma classique. On va lister les contenus proposés par l'entreprise, demander une maquette à la web agency en charge du projet, choisir le plus beau design, puis produire le code et l'intégration. À chaque étape, on va vers le mieux, on vise le succès. Avec une approche orientée design thinking, on peut de la même façon commencer par lister les contenus potentiels. Mais l'étape suivante sera alors, de les valider auprès des utilisateurs finaux. Pour cela, il faudra prototyper ces contenus, par exemple avec un système de tris de cartes et on va rapidement réaliser par exemple que des contenus que nous jugions judicieux sont rejetés par les utilisateurs, que les utilisateurs sont en attente de fonctionnalités que nous n'avions pas prévues et qui impliquent un niveau technologique supérieur à celui que nous avions envisagé initialement. Une entreprise fonctionnant selon un modèle traditionnel va alors ressentir une forme d'échec. Mais dans le cas d'une approche de design thinking, cet échec est le garant même de la bonne procédure à suivre. Avec ce prototypage précoce, on va éviter de faire travailler inutilement les designers web, les développeurs et toute la chaîne de production aval. On va laisser le temps aux développeurs d'explorer de nouvelles pistes techniques et les designers vont structurer leur création en l'orientant utilisateur. On peut ainsi mettre en place des sessions d'idéation au cours desquelles on utilisera la méthode du « Pourquoi cela ne marchera pas ». Il s'agit d'établir une liste de raisons pour lesquelles une solution peut être mise à mal. Cette pratique serait considérée comme négative et nuisible par beaucoup de tenants des méthodes traditionnelles. Alors qu'en fait, elle permettra d'anticiper les remèdes à apporter. Et puis en plus, cela risque d'être amusant pour les participants. On sait que l'erreur est humaine et qu'elle est à l'origine de tout progrès. Avec le design thinking, on va essentiellement s'attacher à ne pas envisager l'erreur et l'échec sous un angle négatif, mais comme une composante première de l'approche itérative.