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Budget 2025: "sidérés" et "en colère", Coquerel et de Courson ressortent bredouilles de Matignon

Le président de la commission des Finances et le rapporteur général étaient venus réclamer les lettres plafonds du projet de budget 2025.

Le président de la commission des Finances de l'Assemblée nationale, Eric Coquerel (LFI), et le rapporteur général Charles de Courson (Liot) se sont dit "en colère" après être ressortis bredouilles mardi de Matignon, où ils étaient venus réclamer des documents clés du projet de budget pour 2025.

"On est assez sidérés (...) parce qu'on nous a refusé la consultation de ces documents", a déclaré Bruno Coquerel à sa sortie de Matignon, une demi-heure environ après son arrivée. "C'est un droit constitutionnel qui est octroyé au président de la commission des Finances et au rapporteur général du budget, on nous l'a refusé", a-t-il ajouté, accusant le président Emmanuel Macron de "mettre en danger la démocratie".

"C'est un droit constitutionnel qui (nous) est octroyé, on nous l'a refusé", a-t-il ajouté, accusant le président Emmanuel Macron de "mettre en danger la démocratie". Il a annoncé qu'il se rendrait à Bercy mercredi pour tenter d'obtenir ces lettres-plafonds, qui fixent les crédits des ministères pour 2025 et serviront à construire le prochain budget.

Des documents "nécessaires"

Les deux députés étaient arrivés rue de Varenne à pied, en provenant de l'Assemblée, vers 12H30. Ils n'ont pas été reçus par le nouveau Premier ministre Michel Barnier, absent à ce moment-là, mais par son chef de cabinet Baptiste Rolland et la secrétaire générale du gouvernement Claire Landais, à qui ils avaient demandé, à défaut d'obtenir les lettres-plafonds, d'au moins pouvoir les "consulter".

Ces documents ont été communiqués aux ministères en août par le gouvernement démissionnaire, mais pas aux responsables de la commission des Finances qui les réclament depuis. Ils avaient lancé un ultimatum à Matignon: à défaut de les recevoir lundi, ils iraient les chercher eux-mêmes.

Ces documents "sont nécessaires pour accomplir notre travail de parlementaires", avait préalablement déclaré Eric Coquerel. Son collègue Charles de Courson avait demandé que le Parlement soit "respecté", en l'absence de majorité claire.

"Deux mois de retard"

Ralentie par les élections législatives anticipées puis la nomination d'un Premier ministre sur le tard début septembre, la préparation du prochain budget revêt un enjeu d'autant plus important cette année que les finances publiques de la France sont exsangues, reléguant le pays parmi les mauvais élèves européens. Dans un courrier adressé "très tard" lundi soir aux deux députés, Michel Barnier a expliqué, selon ces derniers, que le budget serait "construit sur la base des lettres-plafonds", tout en se réservant le droit de la amender.

Attelé à la constitution d'un gouvernement, M. Barnier y promet de communiquer pour la fin de la semaine "une version provisoire" du "tiré à part", rapport récapitulant le montant des crédits par mission et les orientations générales du budget, dont la transmission était prévue avant le 15 juillet en vertu des dispositions de la loi organique.

C'est trop tard, a tranché Eric Coquerel, alors que l'horloge tourne pour déposer au Parlement le projet de loi de finances (PLF): "On a deux mois de retard" sur le calendrier prévu, "on nous prévoit un retard de huit jours pour déposer le budget", un décalage "inédit sous la Ve République".

Economie d'une dizaine de milliards d'euros

Michel Barnier, qui fera sa déclaration de politique générale "début octobre", envisage de présenter le volumineux PLF au Parlement le 9 octobre, au lieu du 1er, comme le recommande pourtant la loi organique. Le Parlement doit disposer ensuite de 70 jours pour se prononcer et le Conseil constitutionnel de cinq jours pour étudier les probables recours, avant publication d'ici au 31 décembre.

Les lettres-plafonds de Matignon reproduisent à l'euro près pour 2025 les crédits de 2024 (492 milliards d'euros), de quoi engendrer une économie d'une dizaine de milliards d'euros, ce montant n'étant pas indexé sur l'inflation. Début septembre, Éric Coquerel et Charles de Courson, ainsi que leurs homologues au Sénat, avaient obtenu du ministère de l'Économie et des Finances des documents relatifs à la préparation du PLF.

Dérapage

Parmi ceux-ci figurait une note du Trésor prévenant d'un risque de dérapage du déficit public par rapport aux prévisions du gouvernement, à 5,6% du PIB en 2024 et à 6,2% en 2025, à politique inchangée. Après un premier décrochage du déficit à 5,5% du PIB en 2023, le ministre démissionnaire de l'Economie, Bruno Le Maire, avait annoncé 25 milliards d'euros d'économies dès 2024, mais seuls 10 milliards ont été concrétisés avant les élections législatives.

Largement insuffisant, selon la note du Trésor, qui estime à 110 milliards d'euros les économies nécessaires pour atteindre l'objectif du gouvernement sortant de réduire le déficit à 3% du PIB en 2027, une cible considérée comme désormais inatteignable par la Cour des comptes.

T.L avec AFP